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Walid, bien plus qu’un rookie [INTERVIEW]

Walid, bien plus qu’un rookie [INTERVIEW]

Entre Sevran, Lacrim et éclosion précoce.

Crédits Photos : Antoine Ott.

Présent dans le game depuis de nombreuses années, Walid intrigue. De par son jeune âge et l’assurance qu’il dégage face au micro, le bonhomme impressionne. A 13 ans, son morceau On a peur du ciel avait même eu les faveurs d’un certain Lacrim… C’est dire le potentiel de l’artiste. Quelques années plus tard, il fait part de sa maturation dans un nouveau projet, baptisé Foetus, comme un symbole. Toujours accroché aux mêmes bases, décrivant la rue et ses à-côtés, le voilà qu’il se ramène dans les locaux de Booska-P pour une interview.

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Tu débarques avec un nouveau projet, « Foetus ». Quel est ton état d’esprit à l’heure actuelle ?

Aujourd’hui, on est fier de ce projet. On a travaillé en totale indépendance avec mon grand frère, qui est également mon manager et producteur. On l’a fait nous-mêmes, dans le sens où j’ai mon propre studio. Il est chez moi ce studio, je suis libre d’y aller quand je veux. On a essayé d’aller un peu partout en ce qui concerne le style musical, on n’avait pas de direction artistique précise, on voulait faire selon nos envies.

Il y a un truc qui te caractérise depuis tes débuts, c’est la rigueur. T’es toujours dans la même optique ?

Toujours ! On essaye de se concentrer sur les petits détails, car c’est ça qui fait la différence. C’est en te posant des questions sur les détails que tu atteins la perfection. Même à l’époque, mon grand frère était déjà mon manager et producteur, c’est lui qui m’a inculqué cette rigueur, le fait d’arriver à l’heure aux rendez-vous, de bien travailler, de soigner mes visuels, etc. On a continué sur notre lancée.

Tu parles des visuels, justement, tu as balancé énormément de clips cette année.

On en a balancé énormément ouais ! Au moins cinq issus de ce projet. On est plutôt fier, car dans l’ensemble on a eu des bons retours.

Les visuels, c’était comme un step à passer ?

Exactement, puis quand tu tapais mon nom sur YouTube, tu ne tombais que sur mes vieilles vidéos. Je n’avais même pas mué ! Du coup, avoir des nouveaux clips aujourd’hui, ça permet aussi de juger mon évolution, mais aussi d’aller chercher ceux qui ne me connaissent pas encore.

Tu étais extrêmement jeune lorsque tu t’es lancé… Comment tu as vécu cette position de rookie ?

On a commencé à me reconnaître dans la rue, au quartier, quand j’avais 12 ou 13 ans. Je ne te mens pas, au départ, je ne réalisais pas vraiment, car quand tu vois des millions de vues, ça reste seulement de simples chiffres. Après lorsque tu vas au centre commercial avec tes potes et qu’on te demande des photos, ça fait bizarre. Mais parler avec les gens, échanger sur la musique, c’est quelque chose qui m’a toujours plu… Je vivais ma meilleure vie (rires).

J’ai écrit mes premiers textes en cachette (…). Je voulais faire la différence entre certaines choses, entre ce que je vivais et ce que je voyais

On revient à tes débuts, qu’est-ce qui t’as donné le déclic ?

J’avais mon grand frère et des gens plus âgés que moi qui étaient de véritables passionnés de rap. Donc, j’ai grandi avec là-dedans, ils m’ont hyper bien vendu le délire (rires). J’ai kiffé et je me suis dit, pourquoi pas moi. J’ai écrit mes premiers textes en cachette, avant de le présenter à mon frère. Je voulais vraiment faire la différence entre certaines choses, entre ce que je vivais et ce que je voyais. J’ai gardé ça jusqu’à aujourd’hui, le son qui me définit le mieux c’est Mauvais élève.

Tu as une exposition assez folle avec Lacrim qui t’a pas mal poussé. Tu peux te confier là-dessus ?

On avait eu quelques contacts lors de la sortie de mon premier son, mais il a eu des ennuis avec la justice. Il m’a ensuite recontacté peu avant la sortie d’On a peur du ciel. Il a dit très simplement : « j’aime ce que tu fais, faut qu’on se rencontre ». C’était un truc de fou lorsqu’il a partagé le clip, le million de vues est venu très rapidement. Aller le voir en Algérie et faire un concert avec lui là-bas, c’était une des plus belles expériences de ma vie. J’ai beaucoup de reconnaissance envers Lacrim, c’est quelqu’un qui m’a donné une chance. Quand tu as 13 ans et qu’un artiste comme lui te contacte, c’est quelque chose de dingue, un véritable kiff. Mais c’était naturel, au feeling.

Dans ton projet, tu dis justement « on veut percer sans être des stars ».

Garder les pieds sur terre, rester humble, c’est la clef de la réussite. En vrai, il n’y a pas mieux. Quand tu vois quelqu’un comme Jul qui reste lui-même et qui ne se prend pas la tête… C’est un mec simple qui bosse sans s’inventer une vie. Sa réussite, ça veut tout dire. Nous, on a toujours voulu faire de l’argent, mais sans le montrer. Le rap, à la base, on le fait par passion et par la suite, ça devient forcément un travail. Au fond, je me dis que j’aimerais bien faire de l’argent autrement qu’avec le rap. J’aurais peut-être posé que pour moi, mais j’aurais sans doute continué. Faire de l’argent grâce au rap, ça a un gros inconvénient : la notoriété. On est des mecs discrets à la base. Dans mes clips, il n’y a par exemple pas de grosses voitures, tout le monde est en survêt’.

on a toujours voulu faire de l’argent, mais sans le montrer. Le rap, à la base, on le fait par passion et par la suite, ça devient forcément un travail

Cela rejoint tes paroles qui sont dans la description pure de ce que tu vis chez toi, à Sevran.

J’ai toujours été comme ça. J’ai commencé à 12 ans, je n’avais encore pas connu grand chose, alors j’ai raconté ce que je voyais, ce que je vivais. Dans le morceau Vi-ser, je ne dis à aucun moment que j’ai vi-ser. Au quartier ça vi-ser, c’est l’usine, c’est une réalité que je décris, mais je ne vends pas de drogue. Je n’ai pas envie de m’inventer un personnage.

Comment ta famille réagit à cette carrière dans le rap ?

Vu que mon grand frère m’aide, ma famille proche nous a toujours soutenu. Ils ont toujours aimé le fait que je fasse de la musique, car les heures que je passe au studio, ce sont des heures que je ne passe pas dehors. On a réussi à faire un studio chez nous, donc c’est un truc qui fonctionne. La famille un peu plus éloignée a mis un peu de temps à apprécier tout ça, mais aujourd’hui ça va, ils sont fiers. La famille, c’est important. C’est pour ça que j’aborde beaucoup ce thème dans Foetus. Si tu n’as pas la bénédiction de ta famille, tu n’avances pas.

Et du côté des cours ?

Au collège, on ne réalisait pas trop, que ce soit moi ou mes potes. C’est au lycée que tout a changé, que ça a commencé à être un peu plus relou (rires). Quand tu marches dans les couloirs, il y a toujours du monde pour te dire un truc. Me faire de vrais potes à l’école, ce n’est pas trop mon truc. J’ai toujours été comme ça, je me protège un minimum. Là, vu que ce sont des gens de mon âge, tu peux avoir un peu de jalousie mal placée, avec notamment des phrases qui ne passent pas. Mais répondre et s’énerver, c’est une perte de temps. Je ne préfère pas donner raison à ceux qui ne m’aiment pas. C’est comme si tu répondais à chaque commentaire YouTube sous tes clips (rires).

J’ai beaucoup de reconnaissance envers Lacrim, c’est quelqu’un qui m’a donné une chance

Entre le lycée, la famille, le rap, comment tu arrives à t’organiser ?

On va prendre un exemple simple, c’est comme un jeune footballeur qui est en centre de formation. Il termine sa journée de cours et va s’entraîner, il a une ligne de conduite à suivre et reste concentré sur son travail. Moi, c’est un peu pareil, sauf que tu remplaces le stade par le studio.

Tu travailles toujours de la même manière qu’à tes débuts ? On pense aux beatmakers, tu as notamment Bersa sur ton projet.

Tout dépend, il y a des morceaux comme Vi-ser que je peux faire en une nuit. Tu trouves une gimmick qui va bien et ça part. Le titre Ma Famille, je l’ai enregistré sur trois instrus différentes, ce qui n’a rien à voir. Comme pour Marie Jeanne. En fait, dès que je vois que je peux m’améliorer, je le fais. Je peux réécouter un morceau et changer certaines punchlines, réécrire des couplets pour que ça sonne mieux… Je suis du genre perfectionniste.

C’est pour cela que tu as mis du temps à sortir ce projet ?

J’étais bloqué au milieu de certains trucs administratifs, mais j’avais aussi envie de le faire chez moi. Construire ce studio, ça nous a mis un certain temps. Une fois que c’était terminé au niveau de la logistique, on a enregistré le projet en seulement quelques mois. Maintenant, je peux même m’enregistrer tout seul, même si en général, c’est mon grand frère qui s’en occupe.

Sevran, c’est un truc de fou avec 13 Block, Maes, Benab, Kalash Criminel, Dabs

Pour terminer, il y a une grosse scène à Sevran… Tu portes une attention particulière à l’essor musical de ta ville ?

A Sevran, il y a tous les styles, tous les goûts. A une époque, il n’y avait que Kaaris de vraiment là, mais maintenant c’est un truc de fou avec 13 Block, Maes, Benab, Kalash Criminel, Dabs ! Si jamais tout le monde s’accorde sur un morceau un jour, ça peut être incroyable.

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