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Rap et Sexe : Les liaisons dangereuses ? [DOSSIER]

Rap et Sexe : Les liaisons dangereuses ? [DOSSIER]

Le Rap américain n’a pas attendu Nicki Minaj pour parler de sexe.

Only de Nicki Minaj, Drake et Lil Wayne a-t-il franchi la limite ? Les textes du troisième single de Nicki Minaj sont assez explicites. Trop pour certains. La première mesure nous plonge directement dans le vif du sujet. « Je n’ai jamais baisé Wayne, je n’ai jamais baisé Drake. Mais si ça avait été le cas nous aurions fait un ménage à trois et je les aurai laissé me bouffer le cul comme un cupcake. » Drake et Weezy qui l’accompagnent sur cette chanson vont également très loin. L’un parle de la poitrine de la rappeuse et l’autre se demande si elle n’est pas « en manque de bite » – Au calme – Nicki Minaj on l’a encore vu récemment avec son clip Anaconda n’est pas une sainte. Il n’empêche. Devait-elle tomber aussi bas ? Starrene Rhett Rocque , journaliste new yorkaise freelance pour différents supports comme BET.com, Vibe, Ebony Magazine ne partage pas notre épouvante. « Je ne pense pas que Only aille trop loin » explique-t-elle. « C’est la situation de la musique actuelle : tout le monde veut être aussi choquant que possible et ça en devient fatiguant. » Cette escalade est-elle vraiment un phénomène récent ? Cette vulgarité a-t-elle toujours excisté dans la culture afro-américaine ? Ses propos grossiers apparaissent-ils que dans les autres genres musicaux ? Voici quelques éléments de réponses.

Tout le monde veut être aussi choquant que possible…

Le Rap c’était plus propre avant ?

Les textes grossiers, vulgaires et explicites ont toujours existés dans le Rap US. Là-bas sexe et Rap ont toujours marché main dans la main. Dans les années 80 le groupe de Miami 2 Live Crew de Miami consacrait déjà des albums entiers à l’anatomie des femmes et à ce qu’ils avaient prévus de leurs faire subir. Dès 1985 ils deviennent populaires avec le single We Want Some Pussy. En 1989, leur album As Nasty As They Wanna Be deviendra même le premier album du South à être disque de platine…

https://www.youtube.com/watch?v=u6VTj7LhCtE

L’origine de la « Bad Bitch »…

Du côté des femmes. Il faudra attendre le milieu des années 90, pour avoir le pendant féminin du hustler, dealer ou killer : la « bad bitch ». Un créneau dans lequel va s’engouffrer la tête la première Lil Kim, Foxy Brown puis plus tard Trina de Miami, Charlie Baltimore au autres Khia… Ainsi Lil Kim en 1996 dans No Time récitait à côté de Puff Daddy « Regarde maman monter et descendre sur ta bite, ma mâchoire fait le taf. Dis mon nom bébé, avant que t’éjacules, j’irai te lécher les fesses. » On le voit ces quelques mesures n’ont rien à envier au récent délicat poème de mademoiselle Minaj…

https://www.youtube.com/watch?v=h7M0LP3Nb2Q

Les textes obscènes sont une facette de l’histoire musicale Afro américaine…

Mais d’où vient ce goût immodéré pour les textes en dessous de la ceinture ? Selon Starrene Rhett Rocque « Les textes obscènes sont une facette de l’histoire musicale Afro-américaine depuis des années ». La journaliste nous donne les exemples de la chanteuse de soul Millie Jackson (elle s’était fait connaitre avec des titres comme Fuck You Symphony ou Slow Tongue ) ou du grand comique Richard Pryor père spirituel des Chris Rock et autres Kevin Hart. Un autre artiste a marqué la jeunesse et inspiré des rappeurs comme Too $hort ou Snoop Dog : Blowfly. Lui était populaire dans les années 60 avec des chansons comme Suck My Dick, Porno Freak ou une reprise polissonne du classique d’Otis Redding : Shittin’ on the Dock of the Bay. « Ces artistes étaient trash mais pas juste pour le plaisir d’être trash », clarifie Starrene Rhett Rocque. « Ils étaient amusants et il y avait encore de la valeur musicale en termes de son. Ils n’étaient pas en concurrence pour voir qui pouvaient dire la chose la plus abusée possible ! »

https://www.youtube.com/watch?v=Z6-lE6seydA

Le Rap est de l’art qui représente la vie et le sexe…

Il faut arrêter avec la constante recherche de buzz qui finalement sacrifie l’intégrité artistique

Revenons au Rap. Est-ce la seule musique avec des textes aussi explicites ? Bien sûr que non. Le Rock où le R&B parfois ont fait des petits détours en dessous de la ceinture. Dancing With Myself de Billy Idol est une ode à la masturbation, Rocket Queen de Guns N Roses parle d’exploits d’une femme, Love To Love You de Donna Summer la reine du disco décrit un rapport sexuel… Le Rap par son format (les textes sont souvent à la première personne et les textes sont « punchy ») marque évidemment plus facilement les esprits. Ensuite on a aussi tendance à plus se pencher sur le Hip-Hop car « c’est la musique la plus populaire à travers le monde » rappelle Starrene Rhett Rocque. « Aujourd’hui le Hip-Hop est devenu la Pop ! » La journaliste new-yorkaise ne veut pas pour autant dédouaner les acteurs du Hip-Hop : « Il faut arrêter avec la constante recherche de buzz qui finalement sacrifie l’intégrité artistique ». Est-ce la clef du « problème » ? Le Rap est de l’art qui représente la vie et le sexe est une composante de la vie. Personne ne veut censurer ou brimer les artistes. Mais est-ce que Only ou Anaconda de Nicki Minaj sont-ils artistiquement irréprochables ? Il y a-t-il eu une vraie recherche ? Le public veut-il encore de la subtilité ? Seul le temps nous le dira…

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