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Mais à quoi peut bien servir DJ Khaled ? [DOSSIER]

Mais à quoi peut bien servir DJ Khaled ? [DOSSIER]

A l’occasion de la sortie de son huitième album « I Changed A Lot », la question se pose plus que jamais. Portrait de celui qui mérite sans délais sa propre télé-réalité…

Khaled Bin Abdul Khaled aime parler. D’ailleurs il parle beaucoup, tout le temps, sans interruption. Que ce soit sur disque, en interview ou sur les réseaux sociaux, jamais il ne s’arrête. Tout au plus marque-t-il une (courte) pause histoire de reprendre sa respiration. Cette logorrhée qui s’articule autour d’une poignée de gimmicks répétés à l’infini (« We the best », « Another one »…) sans pour autant s’adresser à quelqu’un de particulier est devenue sa marque de fabrique.

DJ Khaled ou le mec qui n’a pas besoin d’instru pour avoir plus de flow que ton rappeur préféré (et qui accessoirement a dû rendre marteau plus d’un prof quand il était assis au fond de la classe).

Bon après sur le fond, personne excepté le principal intéressé (encore que rien n’est sûr) n’a vraiment saisi où il souhaite en venir. Mais à la limite peu importe, solidement arrimé à ses certitudes, ce troll de génie est au-dessus de ce genre de considérations toutes juste bonnes pour les « fuck boys » (autre expression déposée).

Bordel mais QUI a bien pu prendre cette photo ???

Selon ses propres termes, DJ Kahled se veut « une source d’inspiration ». Il est le meilleur, et le monde entier doit impérativement être mis au parfum. Chaque sortie d’album est ainsi l’occasion de faire tourner à plein régime cette dialectique du vide dont le pinacle a certainement été atteint ce jour où son single I Hold You Down s’est classé numéro 1 des charts – en réalité numéro 1 des charts urbains, mais Khaled n’est pas homme à s’encombrer de ce genre de détails.

Là où d’autres se seraient fendus d’un simple tweet de remerciement, lui est allé tourner une vidéo longue de 12 minutes aux Bahamas où l’on assiste les yeux écarquillés à toutes sortes de dingueries.

Soit pêle-mêle : boire au goulot dans une piscine une bouteille de champagne qui fait la moitié de sa taille, pousser des cris à tout va, prendre une douche avec sa joaillerie, manger des œufs à pleine bouchée, plonger gracieusement de son bateau avec ses Air Jordan… Le tout assorti de punchlines aussi wtfuckesques que « ils ne veulent pas que tu fasses des 360 sur un jet ski » (?!?). Et aussi ce genre de trucs :

Parfaitement immunisé contre toute forme de remise en question, DJ Khaled vit à un degré 1 dans un monde légèrement réenchanté.

Un monde où il peut comparer sans pression son poulain Ace Hood à Nas (nan mais ACE HOOD quoi !). Un monde où lui et Jay Z seraient « tous les deux des génies » car nés sous le même signe du sagittaire. Un monde où quand un journaliste l’interroge sur ses sources d’informations, il cite sans sourciller « la rue ». Un monde où il peut clamer sur tous les toits qu’Obama apparaitra en featuring sur son prochain morceau. Un monde où les paires de sa collection de sneakers se voient attribuées très sérieusement des surnoms comme « Don’t ever play yourself » ou « Perhaps some dinner, anyone? »

DJ Khaled symbolise mieux que quiconque tout le baroque et l’absurdité du rap mainstream. À ceci près que l’on se demande toujours ce qu’il fait exactement de ses journées.

De l’art subtil du placement de produit pour son restaurant « Léchage de Doigts »

Certes il sort régulièrement des albums aux allures de playlists Spotify dont les titres et pochettes laissent tous plus perplexes les uns que les autres, mais un rapide examen des crédits nous indique qu’excepté faire le pitre sur les intros et dans les clips, ni il n’écrit, ni il ne produit, ni il ne compose ces chansons qu’il étiquète impudemment à son nom.

Quant à son statut autoproclamé de « DJ », il faut croire qu’il équivaut à celui de guitariste chez Lil Wayne. Si l’on en juge par cette vidéo un brin déconcertante, pour Khaled être DJ se limite à porter un casque de travers et afficher une duck face lorsqu’il tripote de manière hasardeuse les boutons d’une console.

Aux courageux journalistes qui ont tenté un jour d’en savoir plus, ils se sont vus répliquer sans guère plus de précisions que son boulot consiste à « faire le Khaled ». Une réponse dont le commun des mortels devra se satisfaire tant ses interviews tournent inlassablement à l’éloge unilatéral de sa réussite sans précédent, de son triomphe sans pareil, de son succès sans égal… #Fatigue

Un constat auquel a du se frotter le pourtant expérimenté Larry King qui après 40 minutes de sparring, abasourdi par l’inanité de ses réponses, finira par lui demander totalement dépité comment il avait fait pour prendre autant de poids ! Réponse les yeux dans les bleus du Khaled : en mangeant beaucoup… #GrosseFatigue

Miroir, miroir, dis-moi qui est le plus Khaled de tous les Khaled ?

DJ Khaled a beau appartenir au club des fat boys du rap US (après tout il a commencé sa carrière en tenant le parapluie de Fat Joe), à l’instar de Rick Ross il est depuis devenu un ardent ambassadeur des salles de sport.

Les plus attentifs noteront peut-être qu’il a beau en faire des tonnes sur Instagram, il n’a toujours pas l’air d’avoir perdu le moindre demi-gramme. Qu’importe, cela ne l’empêche pas de s’exhiber topless pour le plus grand plaisir de ces dames de ses haters et de dispenser à profusion des leçons de vie en direct des tapis de courses.

[Attention : la courte vidéo qui suit est réservée à un public averti]

Contrairement à ce qu’il affirme donc, DJ Khaled aujourd’hui âgé de 38 ans n’est pas près de changer. Grand bien lui fasse. Son outrance, ses excentricités, sa candeur font de lui l’un des personnages les plus en vue de la scène US. Et d’ailleurs avec 5 albums classés dans le top 10, 4 singles certifiés platine et une place de choix au classement des millionnaires du rap jeu, pourquoi en serait-il autrement ?

Il est fort à parier que l’année prochaine, l’année suivante, et toutes celles qui suivent, il continuera de célébrer tel un disque rayé son incommensurable triomphe avec toujours le même panache et la même insistance. Et de l’autre côté du hublot, les mêmes personnes se demanderont toujours avec ce même mélange d’incrédulité et de fascination, à quoi peut bien servir DJ Khaled.

En attendant une chose est sûre, et ne l’oubliez jamais : « Ils ne veulent pas que vous soyez dans un jacuzzi sur une île ! »

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