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L’homosexualité dans le rap, on en parle ?

L’homosexualité dans le rap, on en parle ?

Longtemps tabou, le sujet s’est (presque) banalisé…

« You can’t be fuckin’ people in the ass and say you’re gangsta » – Method Man

Alors qu’il y a encore peu l’homosexualité n’avait même pas le droit de cité, aujourd’hui tout rappeur mainstream un brin soucieux de ses parts de marché se doit d’afficher une bienveillance toute gay friendly pour ne pas froisser ce nouveau politiquement correct.

Comble de l’hérésie, ces dernières années ont même vu la montée en puissance d’un rap étiqueté queer ou LGBT – bien que beaucoup de ses protagonistes refusent d’être limités par cette appellation. Portée par les Mykki Blanco, Angel Haze et autres Zebra Katz, cette scène glam’ célèbre avec ferveur les joies de la flûte et les plaisirs du coffre en proposant aux fans de cagoules en cuir et de « pansexualité » une musique parfois d’excellente qualité.

Si cette évolution des mœurs a de quoi faire tousser les derniers australopithèques du game, elle n’est pas forcément des plus surprenantes pour qui s’intéresse un peu à l’histoire du rap.

DES DÉBUTS FLAMBOYANTS

On n’oublie parfois un peu rapidement que le hip hop était au départ une musique de clubs qui s’accommodait parfaitement des canons de la mode de l’époque.

Et à la revoyure, bien malin qui pourrait faire la différence entre l’excentricité des tenues des Furious Five ou d’un Grand Master Flash (casquettes gavroche, justes-au-corps et semelles compensées) et celles des Village People (ou même avec un travelo du Studio 54).

Ci-dessus c’est Dr Dre et son stéthoscope souagué façon World Class Wreckin’ Cru (mascara inclus) qui s’amuse comme un petit fou.

UN PREMIER DEGRÉ SUSPECT…

Pose lascive, moue boudeuse, moustache aguicheuse… Ladies Love Cool James peut-être, mais pas que.

Dans le rap, la mise en scène d’une certaine virilité a toujours beaucoup compté, à coups de culte du corps (torses imberbes et huilés), débardeurs mouillés sous la pluie et autres moments de camaraderie masculine franche et joyeuse.

[Ce genre de moment camaraderie masculine franche et joyeuse]

Dernièrement on a eu droit à The Game ou Cash Out qui n’hésitent pas à jouer sur Instagram au concours de qui a la plus grosse (littéralement) en slibard.

Qui a dit un peu trop ostentatoire pour être honnête ?

… VOIR CARRÉMENT GÊNANT

Recruté au début des années 2000 pour vanter les mérites du lactose, Nelly en a fait tiquer plus d’un avec cette moustache digne d’un hashtag de site porno pour garçons tant elle semble badigeonnée au pimp juice.

Malaise toujours, dans Where The Hood At DMX se laisse aller à l’homophobie la plus carnavalesque avant de s’emmêler les pinceaux en fin de morceau : emporté par sa fougue, il exige qu’un homme la lui tienne pendant qu’un autre lui fasse une gâterie (« Since we all right here, you hold my dick while he suckin’ it »), puis de prévenir menaçant que personne ne s’approche près lui.

Le pompon du degré 1 revient cependant sans conteste à 50 cent qui dans le clip de P.I.M.P. n’hésite pas à exhiber fièrement son « magic stick » (sic) devant un parterre de mâles visiblement ravis d’être là.

GAYNGSTA

Dans l’imaginaire collectif, 2Pac restera peut-être plus que n’importe quel autre rappeur l’incarnation du « real nigga »… et des contradictions qui vont avec.

Outre le cultissime débardeur en cuir à bretelles fines immortalisé dans le livret de All Eyez On Me ou cette séance photo hashtag malaise qui a depuis fait des émules, celui qui a passé la moitié de sa carrière torse nu (ou pire) a longtemps été un jeune homme sensible aux arts et à la poésie.

Et puis un jour il s’est mis à traiter toutes les femelles de biatch et tous les rappeurs de la côte Est de fiottes…

LA DOCTRINE NO HOMO

Gloire aux Dipset d’avoir populariser les expressions « pause » et « no homo », histoire de lever toute ambiguïté en cas de possible connotation gay d’une situation. Exemple : « Sympa ton short mec… No homo ».

Sauf que bon, à force de tomber dans la justification à tout va, certains ont cru déceler là une forme d’homosexualité larvée.

Il est vrai que l’on parle d’un crew connu pour son goût exacerbé pour la mode (coloris flashy, fourrures, pinky ring…) et dont le leader Cam’ron a popularisé le all-rose-everything (manteau, chapeau, Timberland… et même sa voiture !), tandis que Jim Jones s’autoproclamait « Jennifer Aniston du game »« les autres mecs sont des Lisa Kudrow ».

Paradoxalement l’apparition de ce gimmick très pemier degré peut être considéré comme un progrès, au sens où il a fait rentrer l’homosexualité dans le champ lexical rapologique.

LE COUP DU MEILLEUR AMI GAY

La carrière d’Eminem a beau donner depuis ses débuts dans homophobie décomplexée, le blondinet s’est trouvé un alibi de poids en la personne d’Elton John.

Ce qui avait commencé comme un coup de com’ s’est mué en amitié sincère, le chanteur ayant beaucoup aidé le rappeur à sa sortie de désintox’.

Depuis Em’ montre patte blanche et nous explique que l’emploi répété du mot « fag » dans ses textes n’est pas à prendre en tant que tel mais comme l’équivalent de « bitch, punk ou asshole ».

Mouais… pourquoi alors ne pas avoir employé le terme adéquat dès le départ ?

EN FLAG’ ?

Bien que « bird » puisse signifier tapette en argot, qu’on l’ait vu sur scène clamer haut et fort « I fuck with my niggas » ou qu’il s’entoure d’une jeune garde qui au mieux frôle avec la bicuriosité (Rich Homie Quan et ses cheveux rouges, Young Thug qui… qui fait du Young Thug), l’Homme Oiseau a toujours balayé d’un revers de main les accusations d’homosexualité.

Du coup pour voir sur cette photo autre chose qu’une marque d’affection (sur la bouche) entre un père et son fils adoptif, faut vraiment avoir l’esprit mal placé…

Toujours est-il que depuis Weezy (ancien membre des Hot Boys, ces quatre garçons bien chauds) et Baby ne se sont depuis plus jamais laissés photographier dans cette situation.

LA RÉVOLUTION OMAR LITTLE

Dans le rap, il y a un avant et un après The Wire. Non seulement parce que la meilleure série du monde abreuve de références les textes des uns et des autres (et dans leurs clips), mais surtout pour le personnage interprété par Michael K. Williams.

Vêtu d’un trench coat et d’un gilet pare-balles, il dévalise les dealers armé de son fusil à pompe. À côté de ça, il vit son homosexualité en plein jour, la caméra n’occultant guère cet aspect à base de galochages à pleines langues et de nudité intégrale.

Son orientation sexuelle n’est cependant qu’une composante du personnage. Omar n’est pas un homo qui joue les badass. C’est un badass qui se tape des mecs. On ne se situe ni dans la caricature, ni dans la morale à gros sabots.

Résultat à l’instar de Barack Obama, il est le personnage préféré de beaucoup de rappeurs.

LA RÉVOLUTION FRANCK OCEAN (BIS)

Okay Ocean n’est pas un rappeur mais un chanteur R&B. Mais il traine avec tous les mecs du crew Odd Future.

Lorsqu’il a révélé publiquement (et plutôt habilement) les sentiments qu’il a éprouvé adolescent pour un autre garçon, il s’agissait d’une première.

Ironie de l’histoire, il a engrangé les soutiens des 50 Cent ou des Jay Z qui il y a encore peu dégainaient l’insulte homophobe au moindre clash.

Dans cette lignée comment ne pas mentionner (au risque d’être victime d’un de ces sortilèges) toute la campagne de promotion Lil B pour la sortie de son projet I am Gay.

S’il n’est pas toujours expressément clair si le Based God vogue à voile et à vapeur ou s’il surfe sur un arc en ciel médiatique, le simple fait de voir un rappeur jouer avec ces codes est tout bonnement ahurissant pour tout auditeur qui a connu les 90’s.

CES HOMMES QUI S’HABILLENT EN FEMMES

Après les robes d’André 3000, les leggings de Lil Wayne ou un Diddy qui se vante de « passer plus de temps dans la salle de bains que n’importe laquelle de ses meufs », avec Young Thug le rap a finalement trouvé sa Mylène Farmer.

Le Jeune Bandit semble même prendre un malin plaisir à jouer avec les genres, exhibant collants, vernis et autres sapes achetées au rayon femme (et qui composent selon lui 90% de sa garde-robe).

Officiellement Thugger Motherfucker (au passage père de 6 enfants à 23 ans) n’a toujours pas fait son coming out.

« J’AI RIEN CONTRE, MAIS QUAND MÊME »

Malgré cette ambiance Benetton, être accusé de jouer avec l’autre équipe n’est pas non plus complétement anodin.

Récemment ce sont Vivica A. Fox et Amber Rose qui ont tenté d’afficher leurs ex sur les réseaux sociaux en balançant ouvertement le supposé penchant de ces derniers pour la spéléologie intestinale.

Si 50 Cent l’a plutôt bien pris (sans mauvais jeu de mots), concédant au passage des pratiques pas très orthodoxes, on n’imagine pas Kanye si détendu, lui qui a mis de longues années à se remettre de sa caricature dans South Park.

ET CHEZ LES FILLES ?

À l’image de la société dans son ensemble, le saphisme est beaucoup mieux toléré que l’homosexualité masculine, surtout chez les lesbiennes dîtes lipstick (en français celles qui ressemblent plus à Cassie qu’à Diams).

Les clips bling-bling jouent d’ailleurs depuis longtemps de ce cliché sans que personne ne soit jamais venu s’en plaindre.

Niveau artistes, s’il existe une scène underground goudoue (God-des and She, Kalae Nouveau, Nyemiah Supreme…), dans le mainstream aucune n’a vraiment percé (faute de se faire trouer ?).

Au début de sa carrière, Nicki Minaj a tenté quelques mois la carte de la bisexualité, avant de faire marche arrière et d’avouer que c’était de l’esbroufe.

Ne reste qu’Azealia Banks et son single à double sens 212 qui assume pleinement le truc.

VIVONS HEUREUX, VIVONS CACHÉS

En 2008 Terrence Dean publie Hiding in Hip Hop, un livre dans lequel il décrit avec précision les mœurs des down low brothers, ces membres de la communauté rap qui ont des rapports avec des hommes dans le privé mais qui s’affichent hétéro dans l’industrie.

Dean qui a fréquenté pendant deux ans un rappeur dont la musique était en rotation sur MTV raconte comment les homosexuels ont aidé à façonner la culture rap en se plaçant dans tous les corps de métiers.

Selon lui la proportion de bi-boys dans les rap avoisinerait les 30 à 40% ! Et oui, il se pourrait donc bien que ton rappeur préféré fasse partie du lot.

LES BONS CONSEILS DU ROI

Homme de la synthèse, le monarque montréalais s’est exprimé avec toute la sagacité qui est la sienne sur les rapports homme-hommes.

En tant que « gangster », son conseil à l’attention de ceux que l’homosexualité attire autant se veut aussi simple que concis : « Enculez votre femme, y’a pas de problèmes. »

Hun ?!

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