Lil Wayne vient donc de fêter ses quarante ans le 27 septembre dernier. Plus qu’un anniversaire, cette date marque un palier pour qui a connu le rap dans les années 90 : l’éternel jeune prodige n’est plus.
Et oui, un changement de décimale et c’est tout un pan du public qui prend subitement un coup de vieux.
Malgré les cernes qui se creusent et ce début de calvitie qui se fait de moins en moins timide, il est en revanche une constante : hier comme aujourd’hui, Lil Wayne vit toujours autant dans sa bulle.
En vase clos depuis trois décennies, entre la célébrité, les yes men, le sirop violet et les problèmes de riches, il donne très souvent cette impression de se confondre avec un extraterrestre tout juste débarqué sur notre planète.
Petit florilège de ses sorties qui ont rendu le reste du monde des plus perplexe.
Quand à la télé, il s’est pris pour un gangster

Entendons-nous bien, avoir passé son enfance dans le quartier coupe-gorge d’Hollygrove à la Nouvelle-Orléans n’a pas dû être chose facile. Pas plus que d’avoir survécu à une tentative de suicide l’année de ses douze ans ou d’avoir vu son beau-père se faire assassiner par balles dans des conditions particulièrement scabreuses (son corps a été retrouvé en bord de route après avoir été jeté d’une voiture).
Après cela, la vie de Lil Wayne a toutefois bifurqué à 180°. Signé jeune adolescent sur Cash Money, il est expressément tenu à l’écart de toutes activités illicites par Birdman et passe, de son propre aveu, le plus clair de son temps en tournée.
Si de tous les rappeurs qui jouent les voyous, il est l’un des moins crédibles, cela ne l’empêche pas dans une interview donnée en 2009 à la journaliste Katie Couric (qui n’avait probablement jamais vu un renoi arborant tatouages et grillz de si près) de se vanter d’être un vrai dur.
« Je suis un gangster Miss Katie. Personne ne me marche dessus. Je fais ce que je veux, et ce, jusqu’à la fin de mes jours. Et si je ne le fais pas, j’en mourrai. »
À sa décharge, Wayne était à l’époque codéiné jusqu’à la moelle et lorsqu’il a retrouvé « Misss Katie » quatre ans plus tard en meilleure forme, il s’est publiquement amusé de sa réplique.
Quand il s’est retrouvé à faire cette déposition

En janvier 2009, le documentaire The Carter est présenté en avant-première au 25ème festival de Sundance.
Bien qu’il s’agisse très probablement de l’un des meilleurs documentaires rap ever, l’entourage de Lil Wayne ne goûte que très modérément l’honnêteté du portrait proposé (il est vu se droguer abondamment dans l’indifférence générale) et entame immédiatement des poursuites judiciaires à l’encontre des auteurs pour bloquer toute diffusion.
Convoqué par le juge, pour une raison qui n’appartient qu’à lui, notre gangster préféré décide de se montrer imbuvable… lui qui est pourtant à l’origine de la procédure.
S’ensuit cette séquence lunaire leakée par TMZ où, entre deux démonstrations d’agressivité passive, il passe pour le dernier des sales gosses et la plus outrancière des divas.
Il répète en boucle les questions qui lui sont posées, refuse de se souvenir de quoi que ce soit (s’être fait attraper pour port d’arme illégal, avoir donné un concert avec Kanye West…), vante sa célébrité et son argent (« Je suis une superstar, je n’engage personne. Les gens se battent pour que les engage. »), et va même jusqu’à menacer l’avocat de la défense (« Dans le vrai monde, aucun juge ne pourrait vous sauver »)…
Est-il besoin de préciser qu’après une telle performance aucune suite n’a été donnée à sa plainte ?
Quand il a sincèrement cru que Future lui envoyait des S/O

2018. Lil Baby et Drake joignent leurs forces sur le morceau Yes Indeed produit par Wesley Tyler Glass alias Wheezy. Ce dernier en profite pour se balancer une dédicace en intro avec un « Wheezy Outta here » que Future délivre avec sa nonchalance habituelle.
Très vite, ce tag devient sa marque de fabrique et se fait entendre sur toutes ses compositions (Hot de Young Thug, Turks de NAV and Gunna, Crushed Up de Future…).
Interloqué, Lil Wayne/Weezy prend la chose pour lui.
En 2020, au cours de son podcast Young Money Radio sur Apple Music, il raconte ainsi, non sans humour, son incompréhension face à cette homonymie.
« La première fois que je l’ai entendu ‘Wheezy Outta Here’, j’ai pensé que Future me mentionnait. Je me suis dit, il faut que j’aille demander à Mack [Maine]. Moi je ne connais rien à rien, je lui demande toujours tout. ‘Mack, pourquoi ce renoi Future dit mon nom alors que personne ne parle de moi dans le son ?’ »
Et puis bon, ce n’est pas comme si en 2016 Wayne avait posé en duo avec Gucci Mane sur Oh Lord… produit par Wheezy !
Quand il a confondu 21 Savage avec un groupe de 21 rappeurs

2020 toujours, invité du podcast Drink Champs, Lil Wayne en confie à nouveau une bien bonne à N.O.R.E. et DJ EFN.
« Je me souviens que je prenais 21 Savage pour groupe. Quand on a commencé à me parler de lui, j’étais là ‘Attends, il y a 21 rappeurs dans un seul groupe ?’ Sérieux, je me disais ‘Wouah, c’est le nouveau Wu-Tang.’ Depuis, je l’ai rencontré et on s’est parlé. »
Si sur le coup Rohff a dû se sentir moins seul (lui qui dans le même genre croyait que Offset, Takeoff et Quavo des Migos n’étaient qu’une seule et même personne), Lil Wayne en a rajouté une couche dans la suite de l’interview quand N.O.R.E. lui a demandé s’il préférait Quality Control Music ou T.D.E. (Top Dawg Entertainment).
Réponse de l’auteur de Mona Lisa avec Kendrick Lamar : « Je ne connais pas T.D.E. »
Quand il a osé écrire ces lyrics

Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, Lil Wayne possède au micro un style bien à lui qui consiste essentiellement à détourner syntagmes, adages et expressions de la vie courante en punchlines.
En équilibre constant entre le splendide et l’absurde, il lui arrive toutefois de se vautrer dans les grandes largeurs avec des rimes qui répètent trois fois le même mot, des lignes n’ayant absolument aucun sens (où dont on aurait préféré qu’elles n’en aient aucun), ou des jeux de mots dignes d’une cour de récré de CE1.
Sérieux, depuis dix ans Wayne peut être à ce point mauvais qu’à chacune de ses sorties les médias rap cainris s’empressent de publier des tops de ses pires fulgurances.
« J’ai un flow plus malade qu’un mec qui a le Sida », « J’ai dix salles de bains/Je peux chi*r toute la journée », « Mon argent est tellement vieux que je peux m’acheter un dinosaure », « Le F de Weezy F. est pour PHénoménal », « Je suis trop chaud bébé/Appelle-moi soupe »…
Et non, tant de médiocrité n’a rien de « fun » comme essayent de s’en convaincre ses stans les plus dévoués. C’est juste qu’à trop se prendre au sérieux, l’autoproclamé « best rapper alive » a fini par se persuader que tout ce qui lui passait par la tête valait la peine d’être répété à voix haute.
Quand il a accusé l’OKC Thunder de racisme

Oui, vous avez bien lu, Lil Wayne a un jour dans sa carrière évoqué la question raciale.
Bon attention, venant de la part de celui qui pourtant concède volontiers n’avoir jamais subi la moindre discrimination, il ne s’agissait pas de dénoncer quoi que soi, si ce n’est un manque de considération à l’égard de sa petite personne.
Figurez-vous en effet qu’à l’occasion du Game 3 de la finale de conférence ouest des playoffs NBA 2012, il s’est vu à sa grande surprise refuser un siège au premier rang dans la salle des Oklahoma City Thunder.
Outré par crime de lèse-majesté (alors qu’il s’était pointé au dernier moment), il s’improvise Rosa Parks du carré VIP.
« Qu’importe que les joueurs se soient manifestés en ma faveur. Les joueurs ne sont pas blancs. Je ne veux pas m’asseoir à côté de gens qui ne veulent pas que je sois assis à leur côté. »
Qui a dit caprice de célébrité et mauvaise foi ?
Quand il a expliqué pourquoi il parlait autant de cunnilingus

Obsédé par « le sanctuaire des sanctuaires », Lil Wayne référence l’acte bucco-génital a minima une demi douzaine de fois par album.
Sommé de se justifier sur le pourquoi du comment de cette passion dévorante, il assume complètement – ce qui est loin d’avoir toujours été le cas dans le rap.
« Et vous vous voudriez que je parle de quoi ? De la planète ?? Nan mais sérieux… Si tu veux écouter un mec qui te parle de ce que tu veux écouter, va écouter ce mec. Mais si tu veux écouter un mec te parler de ch*ttes, je suis ton gars. »
Lil Wayne, ou le mec qui passe ses journées à fumer, b*iser et se faire tatouer… et qui le vit très bien comme ça !
Quand il ne s’est plus rappelé pourquoi Pusha T lui en voulait

Entre Lil Wayne et la moitié des Clipse, les animosités remontent au milieu des années 2000 sans que l’on sache très bien pourquoi.
Une première version voudrait que Birdman n’ait pas payé aux Neptunes la prod’ de What Happened to That Boy, son duo avec Malice et Push’. Une seconde voudrait que Pusha T ait très mal pris que Weezy se soit mis comme lui à porter du BAPE.
Toujours est-il que plusieurs diss track voient le jour comme Mr Me Too ou Exodus 23:1 qui tout en sub’ moque le fait que son label YMCM soit « signé chez un renoi signé chez un autre renoi ».
Sur le coup, Lil Wayne ne capte pourtant pas un cachou.
« Quand un pote m’a demandé ce que je comptais faire, je lui ai dit que je voulais bosser avec lui. C’est là qu’il m’a expliqué qu’il me clashait. »
Ni une, ni deux, Wayne tweete alors « Fuk pusha t and anybody that love em » et sort Ghoulish où il l’insulte abondamment.
Si les hostilités redescendent ensuite d’un cran, les piques continuent tout de même de fuser à échéances régulières – plus Drake qui a fait office de victime collatérale.
Pour autant, quand en 2020 il est demandé à Wayne de revenir sur l’origine de ce beef qui n’en finit plus, ce dernier répond le plus candidement : « Je jure devant Dieu, je n’en ai aucune idée. »
Quand il s’est essayé à faire un live Instagram avec Nelly

Ce jour où tes anciens rappeurs préférés se mettent à ressembler à tes parents…
Avec respectivement 3,5 millions et 16 millions d’abonnés sur Instagram, on aurait pu penser que Nelly Nell’ et Lil Wayne aient un début de commencement d’idée sur la manière dont fonctionne l’application.
Sauf que pas du tout.
« Je vois des trucs en bas de l’écran, ce sont les gens quoi nous disent des trucs ? » s’interroge tout d’abord à voix haute un Weezy dont le visage affiche ce mélange de scepticisme et d’ahurissement propre à ces personnes d’un autre siècle lorsqu’elles tombent nez-à-nez avec une nouvelle technologie.
« Oui, il me semble que nous sommes tous les deux en live. Ils nous parlent » lui répond un Nelly, guère plus à l’aise.
Toujours aussi confus, Wayne poursuit en lui demandant pourquoi donc son visage scintille de toute part. Apparemment pas au courant qu’il venait d’activer un filtre, l’auteur de Country Grammar lui rétorque que c’est « à cause de ce qu’il a fumé ».
Que ceux qui ont pensé très fort « Oh, les boomers » lèvent la main…