Nous sommes au beau milieu des années 2000 : les streets albums fleurissent comme des tulipes en Hollande. Seth gueko sort Barillet plein le 14 juin 2005, projet sur lequel figure le classique Patate de forain, en featuring avec Sefyu.
Avant que ce projet ne voit le jour, le rappeur de Saint-Ouen-l’Aumône ne compte qu’une seule ligne sur son CV, le maxi Mains sales, paru l’année précédente. Cette fois, Seth gueko passe à l’échelon supérieur en concoctant un tracklisting de prestige. De nombreuses têtes d’affiches sont sollicitées pour poser et répondent favorablement à l’appel du MC d’origine russo-italienne. Parmi celles-ci, on retrouve notamment Sinik, Alibi montana, Salif, Flynt… La crème de l’époque. Mais c’est un autre featuring qui va marquer les esprits pour devenir le morceau incontournable du double CD Barillet plein : Patate de forain.
Sur l’album de Rohff, La fierté des nôtres, le membre du label Neochrome a particulièrement apprécié le couplet d’un certain Sefyu, qui figure sur le titre Code 187 (avec Kamel l’ancien et Alibi montana). « Après avoir entendu Sefyu sur ce morceau, j’ai voulu faire un titre avec lui pour mon projet Barillet plein, se souvient Seth gueko. On a posé un titre qui n’a pas pété plus que ça. Et le génie m’a soudain frappé (rires). Je me suis dit que je ne pouvais pas me louper sur un tel duo. J’ai pris l’acapella de Sefyu et fait faire une nouvelle prod par Jack.S dans mon salon. Un savant mélange qui a permis la naissance de Patate de forain ».
« Savant mélange »
Ce titre, c’est le mariage de deux styles radicalement opposés entre un artiste en devenir (Seth gueko) et un autre s’étant déjà fait remarquer à cette période (Sefyu). Tous les ingrédients étaient réunis pour qu’il devienne un hit de rue. « Le titre du morceau est original. Ça kick… Je suis blanc, il est noir. Ça représente bien les cités françaises. La cave, la cagoule, l’effet de groupe dans le clip. Il y a aussi le fait que plusieurs figures du rap français mettent des patates dans la camera. C’était lourd : ça validait et certifiait le titre ultra-rue », poursuit Nicolas Salvadori (son vrai nom). Dans le clip, on peut effectivement apercevoir Rim-K, Lim, Kool shen ou même Kery james envoyer des coups de poings les uns après les autres. Patate de forain, c’est encore un concours de gimmicks (ou onomatopées, c’est au choix). Après que Sefyu ait multiplié les « crr crr » dans son couplet, Seth Gueks enchaîne avec les « pa pa pa papapa pa ».
« On ne pouvait pas faire plus caillera »
Enfin, Patate de forain, c’est un clip efficace, dont le nombre de vues sur la toile a dépassé toutes les attentes. Il s’agit d’ailleurs de l’un des clips les plus visionnés de l’histoire de Booska-P (plus de 300 000 vues). « Après le tournage, nous avons fini en garde à vue », se souvient Yonea. Les flics croyaient qu’il s’agissait d’une réunion de bandes ». « Nous avons eu plein de galères de caméras pendant le tournage. Il s’agissait de mon premier montage : j’ai passé toute la nuit devant mon ordi », précise le boss de Neochrome. Sur scène, Patate de forain fait bondir le public dès les premières notes. « Une fois, en concert, il y avait des jeunes en chaise roulantes au premier rang. Et ça nous a perturbé. On s’est melangé les pinceaux. On disait : « on vient des chaises roulantes ». Ça la fout mal », estime Seth gueko.
Pour celui-ci comme pour Sefyu, ce morceau s’est révélé être un booster de carrière. Moins d’un an plus tard, le rappeur d’Aulnay-sous-Bois sortira son premier album solo, Qui suis-je, couronné de succès. Quant au « fils caché de Jack Mess’ », son projet suivant fera directement référence à ce classique, puisqu’il en portera le nom. Seth Gueko gardera ce titre gravé dans la peau, à vie : « On m’en parle encore. A ce moment là, on ne pouvait pas faire plus caillera. J’ai été obligé de me faire tatouer ».