La question a été posée de manière très sérieuse. La réponse risque d’en surprendre plus d’un…
Booba avait eu droit en son temps à un article élogieux dans la Nouvelle Revue Française qui le comparait à Céline. Le marseillais Jul vient de faire l’objet d’une étude du magazine culturel Profondeur de champs.
L’auteur du texte, Alexandre Lourié, étudiant en Sciences Politique et à HEC, intrigué (comme beaucoup) par le succès sans précédent de l’homme à la « teinture blonde-tribale », s’est donc longuement interrogé sur les causes profondes de ce de raz-de marrée.
Pourquoi lui, et pas les milliers d’autres aspirants-rappeurs français ?
L’explication tient selon lui en plusieurs points. Tout d’abord il se distingue de ses congénères par ce sens du savoir-faire si particulier digne d’un Léonard de Vinci : « Homme-orchestre, il est une incarnation contemporaine du courant artistique du pré-raphaëlisme ».
Vient ensuite sa simplicité fruit de sa cohérence entre le personnage, les paroles, la mélodie et la voix : « Comme William Morris voyait dans l’artisanat et la beauté des objets du quotidien le salut de la classe ouvrière, Jul esthétise les moindres détails de son quotidien dans la lignée du mouvement Arts and crafts ».
Jul est générateur d’une véritable mythologie générationnelle qui se repose sur l’esprit populaire.
L’interprète de Cross volé reprendrait ainsi à sa façon le flambeau de ses glorieux prédécesseurs sudistes. Ici il n’est point question de trap, mais bel et bien de ces « figures littéraires incarnant leur territoire ensoleillé » tels « Alphonse Daudet, Marcel Pagnol ou encore George Brassens ». Rien que ça.
Le rappeur sait faire écho aux préoccupations de son public, avec en premier lieu ce « fantasme de la solitude » mais aussi « le questionnement même de son existence et de son élan créateur ». Quand Jul évoque le succès, le renvoyant vite à la vie et, surtout, à la mort, il se situerait ainsi dans la droite ligne d’un Cicéron , s’appropriant à peu de chose près l’une de ses citations les plus célèbres : « rapper c’est apprendre à mourir ».