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Floyd Mayweather est-il vraiment « The Best Ever » ?

Floyd Mayweather est-il vraiment « The Best Ever » ?

Le 26 août à Las Vegas, « Money » va mettre en jeu son invincibilité dans ce qui est sans doute le combat le plus intriguant de l’histoire, à tous les niveaux…

49 combats remportés et aucune défaite. Mais, faute d’avoir un style agressif pour emballer les foules, il est sans doute le boxeur le plus détesté de tous les temps. Comment marquer l’histoire si la loi des chiffres ne suffit pas ? Peut-être en affrontant le meilleur combattant de notre ère, peu importe s’il n’est jamais monté sur un ring de sa vie. A 40 ans, Floyd Mayweather a une ultime chance de remporter le cœur des fans de boxe.

Un combat pour marquer l’Histoire ?

A 10 jours du combat qui se profile comme le plus lucratif de l’histoire, l’heure du bilan arrive pour le meilleur boxeur de sa génération, statistiquement parlant. Embarqué dans un tour de conférence de presse dans trois pays : Etats-Unis, Canada et Angleterre, Floyd Mayweather semble avoir trouvé son meilleur rival, en termes marketing. Celui que l’on a longtemps surnommé « Money » patine devant l’irlandais à la gouaille impressionnante. Est-ce que l’on assiste aux prémices de la fin de l’ère Mayweather ?

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Dernière conférence de presse dans le stade de Wembley chaud bouillant, Conor McGregor répète « I am boxing » devant un Floyd effacé, presque ailleurs, les yeux rivés sur son portable.

Partout où ils sont passés le coeur des supporters balance pour McGregor. Assez fou pour croire qu’il peut renverser le meilleur boxeur au monde en montant sur un ring pour la première fois, il n’a absolument rien à perdre. Floyd a même plutôt bien accepté le fait que McGregor pose la main sur sa tête, manque de respect ultime. Plus surprenant encore, dans une récente interview, il a déclaré que McGregor avait l’avantage, sur le papier. Il est même allé jusqu’à prononcer cette phrase : « Je ne suis plus celui que j’étais ». Est-ce qu’il douterait pour la première fois de sa carrière ? Est-ce du bluff ?

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Itinéraire d’un surdoué de la boxe

Floyd est un prodige du sport, entré dans une salle de boxe avant même de savoir marcher. Il reçoit sa première paire de gants de boxe à 7 ans, délaissant peu à peu le sac de frappe pour se livrer à ses premiers échanges. Chez les Mayweather, c’est une histoire de famile. Son père, homonyme, a été boxeur profesionnel, tout comme ses deux oncles : Jeff Mayweather et Roger Mayweather, champion du monde dans deux catégories de poids.

S’il a baigné dans la boxe depuis tout jeune, rien n’était pourtant acquis pour Floyd. Sa vie familiale a toujours été compliquée. Son père flirtait sans cesse avec le danger, alternant deal et petits boulots. Il a même reçu une balle dans la jambe en tenant son fils en 1978 et, en 1993, il est allé en prison pour trafic de cocaïne. La mère de Mayweather, Deborah, a également subi des problèmes de toxicomanie. Des embrouilles se réglant arme à la main ont encore récemment fait la Une des journaux. Mais Floyd restera focalisé sur son objectif numéro 1 : devenir le meilleur au monde.

Avant de passer professionnel, il a remporté 3 titres nationaux aux Golden Gloves (compétition amateur de haut niveau aux Etats-Unis), et une médaille de bronze aux Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996. Le bulgare Serafim Sodorov est le dernier homme a avoir battu Floyd Mayweather sur un ring (amateur), en demi-finale des Jeux Olympiques. Une défaite qui n’en est pas vraiment une puisque la décision était très contreversée. Vexé, Floyd choisi de passer profesionnel dans la foulée.

A cette époque, il n’aimait déjà pas prendre des coups, ce qui lui a valu le surnom de « Pretty boy » par l’équipe de boxe nationale.

Qu’est-ce qui fait de Mayweather un boxeur unique ?

Invaincu en 19 ans de carrière professionnelle, Floyd s’est débarrassé de tous types d’adversaires en utilisant à peu près la même recette. Doté d’une vitesse d’exécution impressionnante, qu’il a su conserver en gravissant 5 catégories de poids, il sait aussi quand lâcher un coup, comment et à quel endroit. Le timing est un élément clé de son travail. La quasi totalité des coups envoyés par Mayweahter atteignent leur cible. On parle d’une boxe « propre », dépourvue de déchets et donc de dépenses inutiles d’énergie.

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La défense de Floyd Mayweather est considérée comme l’une des meilleures de l’histoire. L’évolution de la boxe et le poids des années rendent difficiles les comparaisons avec les légendes Willie Pep et Niccolino Locche. Mais Floyd ne se contente pas seulement d’éviter les coups, il retourne la situation à son avantage et dégoute littéralement ses assaillants. La qualité des boxeurs offensifs qu’il a affronté en témoigne. Arturo Gatti, Ricky Hatton, Saul Alvarez, Manny Pacquiao… tous sont repartis écoeurés de leur affrontement avec « Money ».

« Il est comme un serpent que tu ne peux pas toucher, mais il continue de te frapper. » DeMarcus Corley, ancien adversaire de Mayweather.

Son jeu défensif est au service de ses attaques. Il excelle aussi dans le choix de ses angles d’attaque, des contre-attaques et de ses déplacements. Si Floyd exécute un roulement d’épaule (mouvement rotatif effectué avec l’épaule située à l’avant), c’est pour mieux contre-attaquer avec son direct de la main droite. Il sait l’envoyer aussi furtivement qu’un jab et choisit la dose de punch exacte pour faire le maximum de dégats sans trop se fatiguer.

D’ailleurs, il n’est jamais à cours de souffle pendant ses combats. Voilà un autre élément qui casse le moral de ses opposants. Floyd peut tenir 12 rounds en conservant sa vitesse et son coup d’œil. Au moindre moment de faiblesse de son adversaire, aussi infime soit-il, il le remarquera et en profitera pour marquer des points. Le très combatif Miguel Cotto en a fait les frais, en mai 2012, lorsque Floyd le surclassa complètement au 12ème round.

Il tue ses adversaires à petits feu. Pour cela, rien de mieux que les coups au corps, envoyés furtivements, juste après un accrochage ou en sortie d’attaque.

Le diable est dans les détails. Floyd Mayweather utilise un arsenal que l’on pourrait qualifier de « dirty boxing » (littéralement : boxe sale), flirtant avec l’illégalité. Le meilleur exemple est sans doute l’utilisation de ses coudes afin de bloquer les mouvements de ses adversaires. Le plus souvent, contre un adversaire agressif, Floyd lève son coude avant (gauche) à hauteur du visage. Au minimum, son opposant ne peut déplier son bras arrière (le plus puissant) lorsqu’il ne s’empale pas dessus…

De la même manière, Floyd se sert de ses avant-bras pour bloquer ses adversaires. Parfois même, il s’en sert pour frapper ! On se demande presque s’il ne s’est pas inspiré des techniques de corps-à-corps en muay-thaï. C’est évidemment interdit sur un ring de boxe mais il agit tellement subtilement que les arbitres ont du mal à sanctionner.

Passage en revue des 10 techniques de combats de Mayweather :

Avis à tous ceux qui conseillent à Conor McGregor de casser la distance pour aller au corps-à-corps contre Mayweather. Vous risquez d’être très surpris !

Y a-t-il des failles dans la boxe de mayweather ?

Mayweather aime parler de lui mais fait tout pour faire oublier ses combats les plus disputés. Deux combats reviennent directement à l’esprit. En mai 2007, il gagne dans la douleur et par décision partagée contre un Oscar De La Hoya très en forme. La décision sucite le débat aujourd’hui encore. En 2006, il se fait cueillir par Zab Judah avec un crochet du gauche. Sa main touchera le sol sans que l’arbitre n’intervienne pour le compter.

Trois adversaires ont aussi particulièrement touché Floyd Mayweather, bien qu’ils soient ressortis perdants à l’unanimité des juges : le rouleau compresseur Marcos Maidana (en 2014, combat suivi d’une revanche dans la foulée), l’expérimenté Shane Mosley (en 2010) ou encore l’artiste DeMarcus Corley (en 2004).

Perfectionniste, Mayweather n’a jamais répété les erreurs qu’il avait commise.

Mayweather, l’homme et le personnage ?

La qualité de la boxe de Floyd a beau être impressionnante, ce n’est pas ce qui contribuera le plus à l’élever au rang de star planétaire. Une boxe défensive n’est jamais vraiment populaire. Les fans veulent des KOs, des échanges musclés, de la rage, des retournements de situation… Bref, tout le contraire de ce que Floyd propose.

La grande majorité de ceux qui visionnent et payent pour ses combats veulent le voir tomber. Il est l’homme à abattre depuis plus de 20 ans.

« La boxe c’est comme le jazz. Mieux c’est, moins les gens l’apprécient. » George Foreman.

Alors comment vendre ses combats et attirer l’attention du peuple autrement qu’en se créant un personnage ? Floyd cutlive l’image du privilégié, se trimbalant avec des valises de billets, de jet en jet. Sa boxe est beaucoup trop compliquée pour le fan de base. Au contraire, son compte instagram fait saliver des millions de personnes.

Cette omniprésence de l’argent, qui a d’ailleurs largement inspiré Conor McGregor, lui attire tous les regards. Il s’est récemment montré avec une casquette arborant le nombre « 48 », étonnant lorsque l’on sait qu’il est actuellement invaincu en 49 combats. Mais il fait en réalité référence au combat contre Manny Pacquiao, en mai 2015.

Celui qui sera bientôt milliardaire a déclaré modestement : « Le numéro 48 a été le plus grand combat de l’histoire de la boxe. Il m’a rapporté 300 millions de dollars. C’est mon préféré jusque là. Mais le prochain rapportera plus. » Le culte des chiffres, toujours…

Et s’il se montre avec des personnalités, il choisira les numéros un dans leur domaine, avec un choix assez large qui va de Lil Wayne à Justin Bieber !

Pour ce qui est de Floyd Mayweather, l’homme, difficile de le cerner. Sa communication est maîtrisée dans les moindres détails. Seules ombres au tableau : plusieurs condamnations pour violences domestiques, en 2002 et 2011. Mayweather a tendance a se défouler sur les femmes, allant même jusqu’à menacer ses propres enfants. Il a d’ailleurs écopé d’une peine de sursis et de travaux d’intérêts généraux qu’il a effectués en 2012. McGregor prend d’ailleurs beaucoup de plaisir à le rappeler devant les cameras. Sinon, on ne sait absolument rien d’autre sur lui qui ne soit pas passé par ses propres filtres. Floyd est tombé dans la boxe, poussé par son entourage qui ne vit que pour cela. A-t-il eu le choix ?

Au niveau sportif, il donne constamment l’impression de survoler ses entraînements. Il multiplie les publications de vidéos le mettant en scène sans jamais révéler l’essentiel. Personne ne connaît son programme d’entraînnement, les exercices ou encore la totalité de la quinzaine de sparrings partenaires qu’il convoque pour préparer ses combats. Devant l’objectif, Floyd balance quelques touches sur des cibles tenues par ses coachs, ultra détendu, sans même regarder devant lui. « Money » passe nonchalement d’un atelier à l’autre, sous le crépitement des flashs.

Il a inventé le concept, avec le diffuseur Showtime, et cela plaît. En tout cas à ceux qui n’ont jamais vraiment poussé les portes d’une salle de boxe.

Mais tous ceux qui l’ont cotoyés sont unanimes, c’est un travailleur acharné. Il s’entraîne deux à trois fois par jour, et surveille son corps dans les moindres détails. David Attias, un ostéopathe français de son équipé, a révélé qu’il est entouré 24 sur 24 par deux kinés.

Aussi doué soit-il, son règne ne s’appuie pas seulement sur ses capacités de boxeur. Pour durer, Floyd a élevé les stratégies de choix de ses adversaires au rang de science. Tout est dans le calcul, ce que les analystes lui ont souvent reproché. S’il affronte un grand nom, il s’arrangera pour qu’il soit déjà sur le déclin (exemple : Manny Pacquiao). S’il se frotte à un jeune loup, ce sera juste avant son apogée (ex : Saul Alvarez).

Floyd Mayweather, en trader averti, cherche à faire le meilleur choix pour maximiser ses gains tout en prenant le minimum de risques. Cette stratégie vient d’atteindre son apogée.

Il y aura un avant et un après 26 août !

L’annonce du combat contre la star de l’UFC Conor McGregor aura permis de révéler un nouveau visage de Floyd Mayweather. D’habitude très pointillieux sur les détails du combat (taille du ring, entrées, équipement…), il a récemment accepté de combattre avec des gants de taille 8oz (au lieu de 10oz). A ce niveau, la différence est énorme. Les petits gants avantagent le combattant de MMA qu’est McGregor.

En cas de victoire, Mayweather dépasserait le légendaire Rocky Marciano, le boxeur détenteur du record de 49 combats disputés sans aucune défaite. A 40 ans, un retour contre un des ténors actuels de la boxe aurait été très risqué. Mayweather va probablement empocher une somme à 9 chiffres et battre le record de victoires sans défaites. Mais quel souvenir laissera-t-il aux fans de boxe ?

Il pourrait par exemple foncer sur McGregor, profitant de ses qualités de boxeurs très largement supérieures à l’irlandais, pour offrir aux fans de boxe ce qu’il n’a jamais été en mesure de leur proposer : un combat engagé. Il a d’ailleurs déclaré sur le plateau du Jimmy Kimmel Live : « Il va prendre des bombes, car avec ce combat je vais aller tout droit. Normalement je prends mon temps, en étant très prudent, mais cette fois je vais foncer droit devant. Les fans le méritent. »

Sauf que ce n’est pas la première fois qu’il promet une « guerre ». Et il a toujours déçu.


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