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Elias Mahmoudi, étoile montante du muay thaï [PORTRAIT]

Elias Mahmoudi, étoile montante du muay thaï [PORTRAIT]

Rencontre avec le jeune prodige franco-algérien.

Il a tout juste 20 ans mais son style de combat spectaculaire et sa longue liste de titres mondiaux font de lui l’un des meilleurs combattants français. Dimanche 21 octobre, il sera en tête d’affiche du prestigieux Muay Thaï Grand Prix contre l’anglais Macauley Coyle au Bataclan, à Paris. Booska-P est parti à sa rencontre à Bonneuil-sur-Marne (94), là où tout a commencé, pour comprendre son parcours atypique et ses ambitions.

Le muay thaï dans la peau

Une dizaine d’enfants frappent sur des cibles en cuir sous la houlette de Christophe Levêque, en charge de la section enfant du Mahmoudi Gym. Quelques années plus tôt, Elias Mahmoudi était l’un deux. Assis dans un local en arrière-salle, il revient sur les premiers coups échangés.

Déjà, il surprenait par la facilité avec laquelle il comprenait les principes du combat et pour ses qualités physiques hors normes. Pour Elias, le muay est avant tout une affaire de famille. Les frères Amar et Nordine Mahmoudi, respectivement père et oncle, ont fondé le gym dans les années 80 et n’ont cessé de former des combattants d’élite. Pionnés parmi les français qui ont pris le risque de se frotter aux thaïlandais chez eux, ils ont logiquement inoculé le virus au petit dernier.

« Mon premier souvenir avec la muay thaï, ce sont les fins de cours où je venais avec mon père. Je ne pratiquais pas encore. Je marchais à peine mais je savais envoyer des coups de pieds ! C’est devenu un rituel, je venais à chaque fin d’entraînement embêter les autres avec mes coups. »

Premier voyage en Thaïlande

Dès 7 ans, Elias commence à pratiquer avec Christophe. Il écume les rings français en assauts (KO non autorisé) avec une facilité déconcertante. C’est d’abord un jeu. Mais tout s’accélère. A peine 4 ans plus tard, il se retrouve en Thaïlande pour disputer son premier combat pro, sans casque, avec KO autorisé. Rien d’exceptionnel pour Elias, pour qui le muay était un passe-temps comme un autre, ni pour son entourage qui emmène des combattants dans le Royaume du Siam depuis plusieurs années.

A Pattaya, il remporte son combat avant la limite. Il en tire une « expérience fascinante » et des rêves plein la tête. Dès lors, il rêve d’une ceinture du Lumpinee (stadium le plus renommé), le graal pour tout combattant de muay thaï.

Elias retourne parmi les siens pour développer son art. Il enchaîne une deuxième sortie victorieuse en Thaïlande puis il commence à remporter des victoires partout en Europe en battant tous les meilleurs juniors avec la manière.

Le choix d’une vie

Dès 14 ans et après quelques victoires marquantes, Elias saute le pas. Il fera carrière. C’est décidé. Son entourage s’assure que le jeune est conscient des difficultés qui l’attendent.

« Mon père m’a prévenu très tôt : c’est un sport très dur, un sport ingrat. Tu peux monter mais du jour au lendemain, en cas d’échec, tout le monde t’oublie. Il ne reste que la famille et les amis. Ma mère m’a toujours poussé, c’est grâce à elle que j’ai obtenu mon bac. Elle a toujours été là pour me motiver.»

Une victoire aux championnats du monde IFMA, à seulement 15 ans, vient confirmer son choix. Il retourne en Thaïlande après avoir battu des grands noms de sa catégorie. Il s’entraîne maintenant avec les meilleurs thaïlandais dans le but de progresser. Les victoires par KO s’enchaînent à un rythme effréné, dont une au mythique Rajadamnern Stadium. Plus tard, Elias mène de front études et combats de hauts niveaux au prix de sacrifices énormes.

« J’ai arrêté les études l’année dernière. J’ai terminé mon bac pro en commerce en même temps que mes débuts au K-1. C’était très difficile de gérer les deux. Je préparais de grosses dates. J’enchaînais entraînements et cours, sans pause, de 6h à 23h. »

Sa vie n’était pas celle d’un jeune insouciant. Pas de sortie, pas de soirées interminables, pas d’excès. Elias en est conscient mais il ne regrette pas son choix. Les choses sérieuses commencent alors. Il se consacre à la boxe après avoir assuré ses arrières.

« On ne peut pas savoir de quoi demain est fait. Si la boxe s’arrête pour une blessure ou n’importe quoi d’autre, je dois être capable de rebondir. Je ne remercierais jamais assez mes proches de m’avoir inculqué ça. Ils ont toujours été derrière moi pour me soutenir. »

Un statut de star au Japon

Depuis ses débuts, Elias n’a jamais hésité à se frotter aux meilleurs mondiaux, chez eux. Son manager Nordine Mahmoudi est parvenu à le placer sur le circuit du Krush puis au K-1, tout en évoluant dans les grandes soirées européennes.

« Dernièrement, mon meilleur souvenir est a été ma victoire au Muay Thaï Grand Prix (en novembre 2017). J’ai gagné le trophé devant toute ma famille et plein de gens importants pour moi. J’ai été touché au cœur. Il y a aussi le K-1 au Japon, là-bas ça n’a rien à voir. Je suis aimé, adulé. J’ai beaucoup de fans. C’est un soutien énorme. On se dit qu’on ne fait pas tout ça pour rien. Je n’oublierai jamais la première fois au Japon. C’est un souvenir encore plus marquant que mes débuts en Thaïlande. »

Du haut de ses 1m76 pour seulement 57 kilos, Elias sait parfaitement se servir de son allonge. Il marque les esprits à chaque sortie. Son style est agressif, sa panoplie faite de coup de genoux, coups de coudes et d’impressionnants coups de pieds de face assure le show. En novembre 2016, à tout juste 18 ans, il fait une entrée remarquée dans les rangs du K-1, organisation nippone qui a marqué plusieurs générations de fans.

« J’étais très malade au japon, mon oncle ne voulait pas que je boxe. Sous perfusion, j’ai dormi un jour entier. »

Elias ne pouvait pas reculer. Le destin se joue dans ce genre de moment.

« Je me suis dit : c’est peut-être ma première et ma dernière fois au japon. Même si je tombe KO, je dois tout donner pour ne rien regretter. Au final j’ai perdu, mais ma boxe agressive a impressionné. »

Début 2018, il bat Luca Roma pour la ceinture mondiale WPMF avec un KO mémorable au 1er round. En juin dernier, Elias s’inclinait aux points en quarts de finale du tournoi mondial K-1contre le futur gagnant Yuta Marukoshi. Pas de quoi rougir. Le français a une fois de plus conquis les japonais.

Elias est allé assez tôt en Thaïlande pour comprendre dès ses débuts qu’il s’agissait d’un travail. Peu à peu, l’ambition évolue. Les titres des stadiums thaïlandais ne sont plus les seuls objectifs d’Elias. Il souhaite surtout conjuguer travail et nouveaux projets.

« J’aimerais prendre pas mal de titres mais je ne peux pas être certain d’être encore dans le muay à 30 ans. La boxe n’est pas vraiment quelque chose qui me plaît. Enfin, (il se reprend) ça me plait de faire vibrer les gens, de combattre, mais il y a énormément de sacrifices, des choses très dures. Il faut voir tout le travail technique, la préparation, les régimes… Les gens ne voient que ce qu’il se passe sur le ring. Je donne le meilleur mais je ne sais pas de quoi demain sera fait. Je veux juste aller le plus loin possible. »

L’homme derrière le combattant

Lorsque l’on évoque ses modèles, Elias ne tarit pas d’éloges sur ses inspirateurs.

« Ramon dekkers m’a toujours impressionné, c’est un très grand champion. Actuellement, il y a Fabio Pinca et les frères Boughanem. On parle beaucoup de Youssef mais les deux sont extraordinaires. Je les respecte profondément pour ce qu’ils ont fait. Ils sont partis en Thaïlande et ont percé là-bas, en étant seuls. Je suivais aussi Damien Alamos, il était très jeune au moment où il a pris la ceinture du Lumpinee. C’est un grand personnage. »

Mais le muay n’est pas toute sa vie et ses vraies passions n’ont rien à voir avec la boxe. Elias élèves des serpents : boa, python… et s’adonne à la pêche.

« Je pourrais passer mes journées à pêcher. Je ne suis pas quelqu’un d’excité. J’ai le virus du muay thaï mais je veux aussi développer d’autres passions, d’autres projets. »

Peu à peu, d’autres portes s’ouvrent. Elias est tenté par le modeling. Et il ne s’interdit pas d’aller s’essayer à d’autres sports de combat. S’il avoue n’avoir pas encore commencé à s’entraîner en MMA, il regarde avec intérêt l’évolution de la discipline.

« Si l’on prend en compte la globalité du sport, le MMA est plus reconnu. Plus intéressant financièrement aussi. Très peu de boxeurs vivent de leur sport en France. Dans les pays les plus forts en muay thaï, nous sommes les seuls à ne pas pouvoir nous concentrer 100% à l’entraînement. On arrive à rivaliser avec d’autres en s’entraînant beaucoup moins. »

Avec maintenant 25 combats pour 22 victoires dont 10 par KO, ce n’est encore que le début de l’ascension. Elias prend un combat après l’autre, se souciant peu des potentiels rivaux. Entre chaque combat, il prend le temps de remercier son équipe et tout ceux qui le soutiennent, avec une modestie digne des plus grands champions de la discipline. Sur le ring, il ne recule jamais. Il donne tout.

Il y aura forcément du spectacle, dimanche 21 octobre au Bataclan, à Paris.

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