Dossiers

SZA, la meuf qui fait du bien au R&B [DOSSIER]

SZA, la meuf qui fait du bien au R&B [DOSSIER]

Le label Top Dawg cache une artiste à la personnalité complexe…

Après 3 EP (See SZA Run, S, Z) et une attente de plus d’un an (son album était annoncé pour l’année dernière) SZA est revenue son premier gros projet « CTRL » le 9 juin dernier. Plus mûr et plus réfléchi que ses précédents projets. Malgré des feats avec Rihanna ou Travis Scott, SZA reste encore dans l’ombre de ses compagnons de Top Dawg. Mais plus pour très longtemps…

L’atout féminin de l’écurie Top Dawg

SZA signe en 2013 chez Top Dawg, label qu’on ne présente plus, qui compte Kendrick Lamar et Schoolboy Q parmi ses membres éminents. Elle qui est la seule personne du label à ne pas faire de rap parle de soncrew comme d’une grande famille : « Ils nourrissent ta créativité c’est comme ça qu’ils travaillent. Ils ne sont pas du genre à faire péter des bouteilles dans des restos ou soirées et d’ailleurs la moitié d’entre eux ne boit même pas. » On ressent ce côté famille dans les différents morceaux qu’elle a enregistré avec les autres mecs de Top Dawg que ce soit sur les albums de schoolboy Q ou de Isaiah Rashad mais aussi sur ses propres projets. On peut même entendre sa voix dans le 4ème morceau du fameux « Untitled Unmastered » de Kendrick.

Avant de faire carrière dans la chanson, SZA étudiait la biologie marine à l’université et voulait être dresseuse chez SeaWorld. Elle a grandi dans le New Jersey avec un père musulman et une mère très conservatrice. SZA, (de son vrai nom Solana Rowe) a reçu une éducation religieuse très stricte; elle avait le droit d’écouter que ce que ses parents écoutaient comme musique et elle portait le voile jusqu’aux attentats du 11 septembre 2001. Alors âgée de 16 ans, elle affirme que le regard des gens après cet évènement a changé et qu’elle ne se sentait plus en sécurité. Cette éducation stricte et son paradoxe avec le monde « occidental » dans lequel elle a grandi lui a permis de construire son univers artistique un peu rêveur, éloigné de la réalité et proche de la nature. Son pseudo SZA fait d’ailleurs référence à cette culture de l’Islam car il provient de l’alphabet suprême de la « Nation des Cinq Pour Cents » (mouvement supremaciste noir fondé sur les bases de la « Nation of islam », voulue par Malcolm X) : le S vient de « Savior », le Z de « ZigZag » et le A de « Allah » (Le producteur RZA ou GZA du Wu-Tang Clan ont aussi des pseudonymes qui proviennent de cet alphabet).

Experimentale et touchante

Sa signature chez Top Dawg marque le début de sa carrière musicale et anticipe la sortie de ses premiers EP « See SZA Run », « S » et « Z » qui présentent son univers au public. Elle sort des vidéos à l’esthétique travaillée pour Teen Spirit et Babylon (en feat avec Kendrick Lamar). Dans ce dernier clip, on la voit dans une forêt se déshabiller avant de s’enfoncer petit à petit dans l’eau profonde, une séquence qui donne une petite sensation de malaise, à vrai dire on a l’impression d’assister à un suicide. Quant à Teen Spirit, quelque chose de très brut ressort du morceau, comme si tout venait d’un coup, de manière viscérale : « Nous n’avons pas mixé ce morceau, je crois qu’on m’entend même me racler la gorge. Il n’y avait pas d’ingénieur du son, on a enregistré en 2h. Il y avait tellement de passion dans le processus d’enregistrement, les choses volaient naturellement de ma bouche. »

Son inspiration, SZA la puise dans sa vie personnelle, ses amours et son histoire. Lors de ses interviews, elle dit souvent que la chose la plus importante qui doit ressortir de sa musique c’est l’honnêteté. Elle n’hésite pas à parler de façon très crue de choses personnelles, de ses sentiments et de ses premiers amours, car elle considère que ce sont les expériences où tu vis les choses plus ouvertement, sans te mettre vraiment de barrières au coeur. Dans « Supermodel », SZA nous parle de ses peurs et d’une histoire d’amour avec un homme volage. Elle explique qu’elle aimerait pouvoir s’auto suffire mais qu’elle n’y arrive pas et a besoin de ce boyfriend et de son affection (elle répète plusieurs fois « I need you » dans la musique).

Féministe à la voix de miel

L’album devait normalement s’appeler « A » et ainsi compléter la trilogie avec ses deux premiers EP « S » et « Z ». Sorti le 9 juin 2017 après une attente de presque un an, « CTRL » se veut comme un album plus réfléchi, plus vrai et plus proche d’elle. L’album était précédé de la sortie de plusieurs extraits comme « Drew Barrymore » (d’ailleurs la vraie Drew Barrymore apparaît dans le clip !) ou « Love Galore » en featuring avec Travis Scott. Cette dernière chanson parle d’une histoire d’amour où un homme est attiré par une femme, sans forcément vouloir d’une vraie relation. « Why you bother me when you know you don’t want me ? Why you bother me when you know you got a woman ? » (Pourquoi tu me déranges si tu ne veux pas de moi ? Pourquoi tu me déranges si tu as déjà une femme ?) : une situation plutôt actuelle, dont SZA parle sans filtre.

L’autre son qui retient notre attention est « Doves in the Wind » en compagnie de Kendrick Lamar. La chanson est une ode à la sexualité féminine (le mot « pussy » est répété plus de 20 fois) où K-dot nous explique à quel point les femmes peuvent faire perdre la tête aux hommes (un thème récurrent dans la musique de Kendrick avec la fameuse phrase « Put that pussy on a piedestal« ). SZA compare le sexe féminin à des « colombes dans le vent » : la colombe représente la pureté et la paix. Ce qu’elle essaye de dire à travers cette métaphore, c’est que la sexualité féminine est quelque chose qui doit être glorifiée, respectée et non pas banalisée et dégradée comme il l’est dans notre société actuelle. Une vision de l’amour et du sexe « fastfood » que SZA attaque aussi dans « Normal Girl », où la jeune femme ne comprend pas pourquoi les hommes qu’elle fréquente préfèrent la ramener dans leur lit plutôt que chez leurs parents.

Leave me lonely for prettier women / You know I need too much attention for shit like that / You know you wrong for shit like that

« CTRL » nous donne une impression de mise à nu : on rentre dans ses pensées et ses inquiétudes et cela nous remet nous aussi en question. La chanteuse se livre totalement, nous parle de ses histoires d’amours, pas très heureuses ni morales (dans « The Weekend », SZA partage son homme avec une deuxième femme) mais sa voix de miel et la douceur qui se dégage de l’album permet d’équilibrer avec ses histoires. La première dame de Top Dawg nous montre que Rihanna a eu raison de l’inviter sur Anti (sur le titre « Consideration ») et nous prouve qu’elle a un potentiel incroyable, qu’on attend de voir se déployer pleinement sur ses futurs projets.

Dossiers

VOIR TOUT

À lire aussi

VOIR TOUT