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Sam’s : « Je me nourris du rap pour m’épanouir au cinéma » [INTERVIEW]

Sam’s : « Je me nourris du rap pour m’épanouir au cinéma » [INTERVIEW]

Après la sortie de son EP « Deus Ex Machina », l’artiste se confie.

Crédits Photos : Antoine Ott.

Sam’s est un personnage aux multiples facettes. Un artiste qui a su tirer son épingle du game, imprimant son visage sur pellicule et laissant traîner sa plume dans les chansons des autres. A la fois rappeur, acteur et auteur, le Bordelais a également un passé de footballeur. Après ses rôles dans les films Patients, Surface de Réparation et une série pour Canal, il revient au rap avec un EP lucide, Deus Ex Machina. Un projet dans lequel il ne mâche pas ses mots. Il a choisi d’en discuter avec Booska-P, sans oublier de faire le point sur son parcours.

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J’ai l’impression que ton projet sonne comme une mise au point.

Cela peut être vu comme une mise au point. Après mon album, il y a eu quelques EPs, mais l’année dernière, je n’ai pas été présent en termes de projet. J’ai dû gérer énormément de trucs, donc là c’est comme une manière de dire que ce n’est pas parceq ue tu n’es pas omniprésent que t’oublies de bosser. J’ai continué à tout suivre, je ne stagne pas, je ne reste pas bloqué dans les mêmes carcans.

Tu ne restes pas bloqué, la preuve, il y a énormément d’invités : Naza, Demi Portion, Nemir, Brav, Anna Kova…

Il y a une connivence qui existe, faire des feats pour faire des feats, je déteste ça. Je pars d’un principe clair, l’humain. Il faut que tout le monde ait la même énergie. Ce n’st pas une question de vouloir faire un feat ou pas, c’est de trouver le bon timing, la bonne énergie. Avoir un gros nom pour un feat préfabriqué, ça ne donne pas forcément grand chose. Moi je pense que c’est une question de bonne énergie, il faut savoir ce que chacun doit faire, on peut s’inspirer, mais aussi partir vers d’autres délires. Par exemple, Demi Portion, on ne l’a jamais entendu sur ce type de sonorités. J’étais curieux de ce qu’il allait le faire sur la prod, j’étais bluffé. C’est quelqu’un qui sait tout faire. Moi, c’est ce qui m’intéresse. En featuring, tu peux t’amuser à créer des choses que l’auditeur n’a pas l’habitude d’entendre. Je peux aussi citer la collaboration avec Naza, qui est plus sombre que d’habitude.

Pourtant, on est dans une époque dans laquelle on cloisonne les styles. C’est aujourd’hui facile de mettre un artiste dans une case.

C’est ce qui me dérange, c’est pour ça que je ne suis pas fan de cette époque (rires) ! Même quand j’ai sorti mon album en 2015, on faisait de moi un rappeur conscient. Aujourd’hui, rappeur conscient, je ne sais toujours pas ce que ça veut dire. Je n’aime pas être enfermé dans une case, on le voit dans l’EP, t’as le droit à tout. En France, c’est ce qui nous pose problème, on aime coller une image, car tout n’est que marketing.

On peut dire que le personnage compte plus que la personne.

C’est exactement ça. Quand t’as été connu grâce à un certain style, si tu essayes quelque chose de nouveau, on va trouver ça bizarre. Je trouve ça con. Après, aujourd’hui, c’est un tout, on ne pas seulement compter sur la musique. L’image est aussi là pour faire passer ton message, c’est tout un packaging. Malheureusement, trop mettre des gens dans des cases, ça t’enlève une part de légitimité si jamais tu veux partir sur des délires différents.

Le rap et le cinéma, ce sont deux exercices similaires

Justement, tu ne t’es pas contenté de rester dans une case, car après la musique, il y a le cinéma. Est-ce que le rap t’a aidé à passer devant la caméra ?

Oui. Je vais me nourrir du rap pour aller au cinéma et vice-versa. Quand t’es devant les caméras, tu finis par les oublier, tu zappes le trac, ça me vient du rap. Car lorsque tu es sur scène, tu fais ce que tu as à faire face à tout un public. Au cinéma, c’est pareil, tu as des acteurs reconnus, de gros professionnels, tu joues ton personnage. C’est la même chose que lorsque tu es en freestyle ou à la radio. Le rap et le cinéma, ce sont deux exercices similaires.

T’es également passé par le foot et le centre de formation des Girondins de Bordeaux. C’est une expérience qui te sert encore aujourd’hui ?

Je m’en sers d’une manière particulière, car j’ai un parcours assez atypique dans le foot. J’ai côtoyé le haut-niveau, j’ai eu des hauts, des bas, des blessures, des rêves, des désillusions, de belles performances… Et je me suis rendu compte d’une chose, c’est que pendant les périodes où j’étais le plus proche d’accéder au niveau pro, je n’étais pas franchement épanoui. Tu peux voir ça comme un échec, mais moi, je préfère voir ça comme des leçons de vie. Pareil dans la musique, l’important ce n’est pas d’être constamment en haut de l’affiche, mais de pouvoir faire quelque chose que tu aimes, donner et recevoir en retour. Dans le foot, comme dans la musique, il y a beaucoup d’étoiles filantes. Le plus important, c’est d’être là le plus longtemps possible.

Dans cet EP, quand tu décris l’aspect fake du monde de la musique, tu peux le calquer sur le milieux du foot et du cinéma, non ?

Ce sont des milieux qui génèrent de l’argent. On te pousse à être le meilleur et c’est quand tu es le plus fort que tout le monde t’écoute. Ce qui peut te pousser à abuser de ça. On te parle de passions, de valeurs, mais au final ça te pousse à être bipolaire. Tu peux avoir des gens pourris, mais on va toujours te faire comprendre qu’ils ne sont pas là pour rien. T’es toujours sur une corde raide, car la réussite, c’est parfois loin d’être une question de valeurs. Que ce soit dans le foot, le cinéma, la musique, être un artiste, c’est être le sujet de plusieurs névroses. Quand tu as l’habitude, tu prends les retournages de veste comme un fait, ce n’est pas grave, il faut suivre sa route.

Le foot, je m’en sers d’une manière particulière, car j’ai un parcours assez atypique

Avec ton projet, tu fais un constat, tu ne juges pas. T’as une position d’observateur.

Peu à peu, tu prends du recul. J’ai la chance de pouvoir dire ce que je pense et de rester moi-même. Je suis arrivé à un stade où je prends les gens pour ce qu’ils sont et ce qu’ils font. Cela n’empêche pas de trouver des cons qui ont du talent, il faut se l’avouer ! Il ne faut pas faire semblant, on n’a pas besoin de se faire des courbettes pour avancer, mieux vaut se dire les choses.

Dans le foot, on dit souvent que quand on est bon, on peut tout se permettre.

Oui, mais à différents niveaux. Neymar peut clairement tout se permettre. Mais ça ne sera jamais le cas d’un Ben Arfa qui est pourtant plein de talent. Pourquoi ? C’est une question de chemin de vie.

Le partage de ton parcours, en somme, c’est le fil rouge de Deus Ex Machina.

C’est une manière de dire à tous que je vais bien, mais que je n’oublie pas qui est qui. Je ne fais pas la guerre, je tiens à creuser mon chemin. A certaines périodes, j’aurais pu me perdre. Heureusement, j’ai su resté dans ma bulle, mon propre univers. Je ne suis pas revanchard, je sais qui je suis et je sais où je vais. J’ai beaucoup travaillé pour d’autres personnes et ma première satisfaction, c’est d’arriver à me renouveler. Mon seul adversaire, c’est moi même.

Que ce soit dans le foot, le cinéma, la musique, être un artiste, c’est être le sujet de plusieurs névroses

T’as écris pour Tal notamment…

Oui, il y a eu Tal, S.Pri noir, Kendji Girac, des gens de la pop… Des artistes totalement différents les uns des autres. Cela te permet d’élargir tes skills. Je marche au feeling, donc j’ai essayé de donner tout ce que j’avais à donner, comme si c’était pour moi. Ecrire pour d’autres personnes, ça te permet d’aller voir ailleurs, d’exprimer les mêmes sentiments que dans le rap, mais sur des phases chantées. Je me suis rendu compte que je n’avais plus besoin d’écrire de longs pavés pour partager mes idées, des fois, ça fonctionne juste avec une petite punchline et une mélodie. C’est la meilleure manière de rester toujours dans le bain.

L’écriture, le rap, le cinéma… Où est-ce que tu es le plus épanoui aujourd’hui ?

Franchement, dans tous. Je me suis nourri de chacun de ces domaines pour être à l’aise de partout. Je peux écrire pour quelqu’un et oublier que je suis Sam’s, je peux m’investir totalement dans un rôle… Après, j’ai pRéféré ralentir l’écriture pour les autres, car ça demande beaucoup d’énergie. A un moment, peut-être que je l’ai trop fait. J’avais peut-être peur de moins m’inverstir à fond sur mes propres projets. Ensuite, il faut dire que c’est mal vu en France d’accepter que d’autres écrivent pour toi, tout le monde ne l’assume pas, c’est tout le contraire des USA à ce niveau. Mais ce n’est pas grave, aujourd’hui, je me refuse à la frustration, j’ai une belle volonté d’avancer.

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