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LOUD, à l’assaut du Rap français ! [PORTRAIT]

LOUD, à l’assaut du Rap français ! [PORTRAIT]

Au moment de composer notre fameuse liste des 11 rappeurs à suivre, un artiste tout droit venu du Québec est venu se glisser parmi des noms bien de chez nous. Cet homme-là, c’est Loud, un bonhomme qui aura mis tout le monde d’accord en moins de temps qu’un Concorde franchit l’Atlantique. Garant d’une identité musicale 100 % Montréalaise, il n’aura pas trafiqué son accent pour franchir les frontières de l’hexagone et s’exporter sur Paris, notamment le temps de deux concerts. Une belle occasion pour l’attraper au vol et causer de son album Une année record, désormais disponible en France.

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Demain c’est loin, mais pas le Québec

En 2018, le conservatisme n’est plus ou presque, en tout cas dans le rap. Si certains s’évertuent à perpétuer un son boom bap à l’ancienne, beaucoup d’autres ont pris la tangente, lorgnant vers la pop, les vocoders et autres habits de stars du glam-rock. Parfait pour s’ouvrir de nouvelles portes et enfin péter à l’étranger. Après le brisage de nuque, puis le cassage de code, la mode est donc au passage de frontières. Mais à ce petit jeu-là, les vainqueurs ne sont pas nombreux. Aujourd’hui, c’est Loud qui s’érige en pôle position de ce voyage par-dessus les préjugés. Oui, il est québécois, et oui, son rap fait l’unanimité chez nous.

Pour les Québécois, compter sur le public Français, aller à l’international, c’est une ambition

Tout est arrivé simplement avec un visuel balancé sur YouTube. Un clip, celui de 56K, qui a provoqué un premier soubresaut chez les Frenchies, mais chez les Belges et Suisses aussi : « 56K a été l’élément déclencheur. C’est vraiment ma première rencontre avec le public français d’une certaine manière. Il y a pratiquement 70 % des vues qui sont issues de la France, la Suisse et la Belgique. C’est assez énorme pour nous ». De quoi créer une demande, jusqu’à voir Loud débarquer à Paris le temps de deux concerts à La Boule Noire. Venu pour « répondre aux sollicitations et non pour se faire découvrir », il a fait face à une foule conquise : « Il y a eu un super accueil, les spectacles étaient vendus. On a eu beaucoup de demandes pour venir faire des shows, et finalement les spectacles se sont très bien passés. Les gens connaissent les paroles des chansons, même celles qui ne sont pas des singles. Pour les Québécois, compter sur le public Français, aller à l’international, c’est une ambition ».

Au contraire des artistes Canadiens qui débarquent dans l’hexagone pour se faire découvrir, lui débarque avec, déjà, une attente derrière lui. Pas de quoi bousculer un bonhomme sûr de lui, mais loin d’être vaniteux : « On n’a rien fait ici, on a tout à prouver. On ne peut pas s’enfler la tête non plus, c’est un énorme rap game en France. On est un embryon dans ce truc-là. On va faire une chose à la fois, lentement mais sûrement ». Sûrement et avec un accent, très loin de la « flèche » balancée dans le morceau Devenir Immortel : « Oh, tu voulais percer en France, hein ? / Du coup, t’as largué ton accent / T’as truqué ta voix comme T-Pain / Né pour un p’tit pain, mort pour un croissant ».

De Mobb Deep à Booba

Au Québec, le rap rencontre un traitement pour le moins particulier. Et si en France, la cérémonie des Victoires de la musique fait souvent débat, les francophones du Canada préfèrent trancher dans le vif. Loud et son manager expliquent que le genre est loin d’être le plus plébiscité dans les médias, aucune radio urbaine d’envergure ne peuplant les ondes. Et quand une rapstar est sur le point de se faire entendre, elle passe le plus souvent à la trappe. Kendrick Lamar en a fait l’expérience, voyant son couplet disparaître sur Bad Blood dès qu’il se retrouve programmé sur les antennes de nos amis Québecois. On se demande alors à quoi peut bien servir un featuring avec Taylor Swift…

J’ai surtout écouté du rap américain. Mes premières influences sont en anglais et mes dernières aussi

Loud nous le rappelle, « La population du Québec tourne autour de huit millions d’habitants. Pour le public potentiel qui écoute du rap, c’est donc beaucoup moins ». Ce qui ne l’empêche pas de se tailler la part du lion, représentant de son époque avec un talent certain et une assurance à toute épreuve. Comme sur son titre Nouveaux Riches : « I live the life that I deserve / 200 milles à l’heure dans les airs / Vers la mer azur / Oh, j’étais naïf, mais la life m’a ouvert les yeux / Les nouveaux riches seront toujours riches / You know how this works ». Il rappe en français, tout en y ajoutant des touches anglaises, la marque du carrefour que représente Montréal, une ville bilingue entre plusieurs cultures.

Cependant, il ne fait pas dans la langue de bois au moment de nous citer ses références. Le rap américain fait bien partie de ses premiers crushs musicaux, même si certains emblèmes de l’hexagone se sont glissés dans ses playlists à l’adolescence : « J’ai écouté un peu de rap français à l’époque, quand j’étais plus jeune. J’ai découvert ça avec IAM, puis toutes sortes de trucs avec le temps comme Booba par exemple. Mais oui, j’ai surtout écouté du rap américain. Mes premières influences sont en anglais et mes dernières aussi (rires) ». Sa première gifle, celle qui lui donne envie d’écrire, vient du Queens et non de Paris ou de Marseille : « Mobb Deep avec Hell On Earth, c’est le premier album que j’ai acheté personnellement, à l’âge de 13 ans, avec mon argent. C’est l’acte fondateur, la première vraie étape. Le rap américain, toute ma formation vient de là ». Ce n’est pas pour rien, donc, qu’il demande à être enterré sur du Prodigy…

Un album « sans failures »

Comme bon nombre de rappeurs, Loud a débuté au sein d’un groupe. Un trio particulièrement suivi nommé Loud Lary Ajust, composé de deux emcees et d’un beatmaker, qui aura balancé plusieurs gros projets depuis 2012. Après avoir fait ses armes en équipe, il a débarqué en solo avec un EP, New Phone, et donc son album Une Année Record.

En solo, je suis en compétition avec moi-même. C’est des fois plus compliqué pour la motivation aussi. Mais c’est super satisfaisant quand ça fonctionne

S’il a une plus grande liberté de création, sa manière de travailler est donc tout autre : « J’ai vraiment ma vision, c’est moi qui décide. Mais c’est plus complexe au niveau du travail. On était un trio, avec deux rappeurs. On écrivait en double et on pouvait s’appuyer sur les paroles de l’autre ou son énergie ». Néanmoins, il arrive à relever le challenge, se trouvant de nouveaux objectifs, comme un sportif : « La personne avec qui tu travailles peut établir un standard, et tu peux être amené à devoir te dépasser pour te tenir au niveau. En solo, je suis en compétition avec moi-même. C’est des fois plus compliqué pour la motivation aussi. Mais c’est super satisfaisant quand ça fonctionne ».

Au final, cela donne un opus impactant, garanti sans remplissage qui s’écoute d’une traite et qui se réécoute dans la foulée. Avec simplement 10 morceaux, Loud affiche une volonté claire de faire dans l’efficacité : « Personnellement, je n’aime pas les albums trop longs. Je ne vois pas pourquoi on garderait les failures. Et 10 chansons, c’est court dans le principe, mais c’est quand même beaucoup de matériel. Il y a l’EP qui est venu un peu avant, donc c’est comme s’il y a avait 14 nouvelles chansons qui viennent en 5 mois. C’est suffisant, je pense que c’est bien assez ».

Dans une époque où tout va plus vite, avec « tellement d’options, d’offres, et de choses à écouter », 14 morceaux lui auront donc suffit à attirer sérieusement l’attention de l’hexagone. Et s’offrir des concerts à guichets fermés et autres apparitions télévisées, par exemple sur France 5 dans l’émission C à vous. Si vous ne connaissez pas encore le bonhomme, vous savez donc ce qu’il vous reste à faire…

Crédits Photo : Antoine Ott

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