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Les cinq covers d’Armen!

Les cinq covers d’Armen!

La jaquette d’un album, comme la première de couverture d’un livre, a de l’importance, beaucoup d’importance. C’est elle qui attire l’attention des potentiels acheteurs, et une cover s’avère souvent révélatrice du contenu d’un album. Si l’on prend le visuel de Convictions suicidaires de Despo Rutti, il est à l’image du message délivré par le rappeur dans son album: douloureux, torturé et rageur. Mais ce n’est là qu’un exemple parmi tant d’autres. Tout rappeur consciencieux vous le dira, il faut que le visuel d’un disque soit réussi pour qu’il soit satisfait de son projet.

Pourtant sous l’ère du téléchargement et du tout numérique, les auditeurs prêtent assez peu d’attention aux jaquettes des albums qui remplissent leur disque dur. En ce sens, d’ailleurs, la qualité d’une jaquette prend encore de l’ampleur, puisque elle peut s’avérer être le dernier moyen de donner envie d’acheter l’album sous sa forme physique. Il est effectivement très agréable de regarder une jaquette en détail, et si celle-ci est travaillée, l’album ne peut que gagner en consistance.

C’est pourquoi nous avons choisi de mettre un peu en lumière le travail que mènent les photographes, graphistes ou encore photographistes, autour d’un disque. Ainsi, nous avons demandé à l’un d’entre eux, le plus célèbre du petit milieu rap français peut-être, Armen, de nous parler de ses 5 visuels préférés. En professionnel, Armen, à qui l’on doit notamment le visuel de l’album éponyme de La Cliqua, a eu du mal à choisir ses cinq covers. Sans fausse modestie, le photographe et réalisateur s’est donc prêté au difficile jeu que nous lui avons proposé. Depuis les Etats Unis, où il vit désormais, Armen passe au crible quelques jaquettes, d’Oxmo Puccino à NTM en passant par Booba, et nous livre de petites anecdotes sur celles qu’il a lui même réalisées, dont Le combat continue d’Idéal J. Spéciale dédicace à Guerlain!

Opéra Puccino d’Oxmo Puccino

 » Le rap est une musique qui cherche souvent à faire passer un message.IMG1 J’aime comme la pochette d’un album reflète la musique et l’univers de ce dernier. Pour moi, c’est la base de notre travail de photographe et directeur artistique. Cette pochette est juste magnifique et pleine de symboles qui reflètent, à mes yeux, tout à fait l’artiste et ami qu’est Oxmo.Cette photo a été prise par Jean Baptiste Mondino, déjà rien que ça pour moi c’est terrible.JBM est une sorte de mentor à mes yeux. C’est une des personnes qui m’ont donné envie d’exercer ce métier. Photographe et réalisateur, Jean Baptiste est également parti vivre aux Etats Unis histoire de changer d’air. Quand il est revenu vivre en France, il avait dans ses bagages des clips réalisés pour Prince ou encore Madonna. Il fait partie des personnages importants qui ont révolutionné le clip en France en y apportant cette qualité qu’on ne trouvait qu’aux US sur MTV à l’époque. Pour en revenir à la pochette, il faut comprendre plein de choses à travers cette image, le premier album d’Oxmo arrive juste après la dissociation de Time Bomb, c’est désormais l’enfant seul du label. Celui qui est attendu au tournant! Aussi les masques représentant les rires mais aussi les pleurs de la « Comédia dell Arte » symbolisent les bons et les mauvais moment de la vie, l’amour et la trahison, surtout lorsqu’on écoute cet album aux sentiments ouverts à vif: « L’enfant seul » « Amour et jalousie » « Mourir 1000 fois« . Comme tout premier album, ce dernier restera « LE »classique d’Oxmo, sa pierre à l’édifice. « 

J’appuie sur la gachette de NTM (Album et single)

« Je n’ai jamais été un grand fan de la musique de NTM.IMG2 Mais il y a une chose qu’on ne peut leur enlever, c’est leur professionalisme sur tous les points et détails de leur image. Certainement le meilleur groupe en la matière. Au delà du respect que j’ai pour les deux membres du groupe et leur ancienneté et authenticité dans cette culture qui nous berce depuis vingt cinq ans, je trouve le travail de cette pochette juste magnifique. La cohérence entre le single du même nom et la pochette de cet album, réalisée par Seb Janiak, autre grand photographe et réalisteur de renom et ami. Seb a également réalisé de nombreux clips pour le groupe, allant de « Soul Soul » à la trilogie sous forme de moyen métrage pour Paris sous les bombes. Du grand travail. Seb est l’un des premiers photographes à avoir utilisé le logiciel Photoshop comme un outil supplémentaire à la photographie, et dans ce domaine, c’est un maitre, je vous invite à découvrir son travail: https://sebjaniak.com « 

Quelque chose a survécu d’Ärsenik

 » Je suis très partagé sur ce coup, parce que mettre trois de mes pochettes dans le top cinq n’aurait pas été très humble de ma part, et qu’il y a quand même pas mal d’autres pochettes qui auraient leur place dans ce top.IMG3 J’ai longuement hésité entre Rocca Elevacion, Busta FLex Sexe, violence rap et flooze et 113 Prince de la ville réalisé par Alex Wise et 360 Communication, mais j’ai finalement décidé de mettre Ärsenik, Quelque chose a survécu, saluant ainsi un de mes groupes de rap favoris et ce label mythique qu’a été Secteur A. Je n’ai pas vraiment d’explication, mais tout le monde connait mon travail avec La cliqua, puis Rocca puisqu’ils ont participé à établir mon nom, donc l’idée est de parler du travail des autres. En l’occurence de cette pochette d’Ärsenik qui donne suite à leur premier album, en y reprenant le même visuel mais dans une version moins épurée et pleine de symboles: le micro, la platine, les vinyles, le cd, en un mot: le Hip Hop! Ce duo, digne d’un EPMD vêtu de la même manière, sur fond de couleur rouge. Une image forte! Quant à la musique n’en parlons pas, Lino reste une des meilleures pumes du Hip Hop français! « 

2° & 1°  » Franchemant, je ne sais laquelle de ces pochettes mettre en première ou seconde position, alors disons qu’on les met ensemble! « 

Ouest Side de Booba

 » J’ai eu la chance de shooter la première édition en version cd de « Temps mort » ainsi que la réédition du même album. Booba est un artiste que je connais depuis ses débuts.IMG4 Nous nous sommes rencontrés au sein de la Cliqua (1994/95) alors que le nom Lunatic existait à peine. Au delà de l’aspect business, nous avons toujours entretenu une relation amicale, qui perdure encore, que l’on travaille ensemble, ou pas. Cependant je dois avouer que l’épisode Ouest Side marque un grand moment de ma carrière. En effet, lorsque Booba me contacte pour me faire découvrir cet album, comme tout le monde j’ai pris une claque. Même si beaucoup s’accordent à dire que Temps mort est son meilleur album, il est à mon goût ce qu’un Illmatic est à Nas. Il n’en reste pas moins qu’un artiste se doit d’évoluer et vivre avec son temps. Aussi quand il me joue Ouest Side en studio, je sens l’extrême « lourdeur » de cet album, et son potentiel à tout révolutionner, « Boulbi » en tête, mais aussi et surtout « Pitbull« . Quand il me demande ce que je verrais comme visuel pour cet album, je lui ai aussitôt répondu une image forte, celle d’un leader: d’un homme qui n’a pas peur de dire ce qu’il pejnse avec parfois un zeste d’arrogance, quitte à choquer son audience, partagée entre ses fans et ses détracteurs. Une sorte de Malcolm X! Je savais que KRS 1 avait repris cette image de Malcolm se tenant derrière sa fenêtre, un m16 à la main, en attendant dans un état de paranoïa totale que ses ennemis débarquent chez lui. Quand j’ai fait le rapprochement entre ses deux images et les ai évoquées à Booba, il a aussitôt été séduit. Il m’a par la suite confié la réalisation de tous les clips du même album et l’expérience reste inoubliable. Parce que comme par hasard, le regard porté sur mon travail a soudainement pris un interêt nouveau. J’entends par là qu’on a beau dire, mais travailler avec un artiste en vogue, ça a chyangé la perception des gens de la profession à mon égard. J’avais beau avoir shooté la majeure partie des pochettes d’albums du rap en France, faire soudainement Boboba c’était comme avoir travaillé avec le messie! Alors que derrière tout ça, j’avais dix ans de photographie presque oubliés (une trentaine de pochettes), enfin c’est une manière de s’exprimer. Même si je dois reconnaitre que est une de mes plus réussies avec…

Le combat continue d’Idéal J

Un album classique à la pochette simple… mais efficace! Même situation que pour tous mes précédents travaux. Je me retrouve en studio alors que Kery et ses compères terminent cet album d’anthologie.IMG5 Brian « JR Ewing » l’un des producteurs du label Arsenal Records, Sweel du label Alariana, Kery et moi, nous asseyons dans une salle un peu en retrait histoire de parler tranquillement du concept de la pochette. Avec un titre pareil, il ne fallait pas se louper sur le visuel. Je crois que c’est Brian qui a eu la première idée d’enrouler un homme issu des minorités africaines dans le drapeau français. Lui et Kery voulaient une image qui choque, quelque chose qui résume la situation des minorités en France et pas uniquement dans les banlieues, mais juste fort historiquement. Nous voilà partis à shooter cette image, quand, pendant la séance photo, je trouve lrendu pas assez fort et provoquant. Je demande donc à notre modèle de prendre le drapeau dans sa main et de le serrer aussi fort qu’il pouvait ayant en tête une symbolique forte. Celle de dire qu’aujourd’hui ces minorités ont suffisamment travaillé pour la France pour enfin avoir les droits et la reconnaissance qu’elles méritent. Ce qui est drôle c’est qu’aujourd’hui encore,avec des réflexions comme celle de Monsieur Guerlain, cette image prend tout son sens. Mon idée se retrouve donc sur la pochette du disque et la précédente version au dos de l’album. La suite, on la connaît tous. Un album qui marquera l’histoire du rap français et qui n’a pas pris une ride! « 

Armen tenait également à placer un mot de remerciement à plusieurs personnes, ayant participé à l’élaboration des covers qu’il a choisi: Xavier de Nauw & Realeyez, Wilee, Dimitri Simon, Tous des K, Seb Janiak, Philipe Bordas, Alex Wise & 360, Tom Kan, Wahib, et aussi à la « nouvelle école », Koria, David « 5 in the morning » Tamayo, Phoks et Fish High.

Par ailleurs, vous pourrez retrouver très prochainement sur Booska-p quelques unes des personnes citées ci-dessus, pour qu’elles aussi nous parlent de leurs jaquettes favorites!

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