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Haristone, spontané et dans son monde [PORTRAIT]

Haristone, spontané et dans son monde [PORTRAIT]

Vendredi premier décembre sortait OFF, le deuxième projet d’Haristone. L’occasion de rencontrer un rappeur unique en son genre.

Crédits Photos : Antoine Ott

Haristone, voilà un artiste sur lequel Booska-P s’était penché en tout début d’année, dans sa liste des jeunes rappeurs à suivre en 2017. A l’occasion de la sortie de son deuxième projet, l’EP OFF, l’heure est donc venue pour nous de rencontrer le rappeur pour un portrait en bonne et due forme. Avenant, sûr de lui, le bonhomme en impose naturellement, sans se prendre la tête. Une spontanéité qui se retrouve désormais dans sa musique, lui qui s’est délesté des références hitchcockiennes pour mieux toucher sa cible. Entrevue avec un rimeur qui s’est trouvé.

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Une pause salvatrice

Dans une époque où la productivité est presque devenue la règle pour mesurer le talent d’un rappeur, Haristone a décidé de faire les choses à sa manière. Jeune et talentueux, il ne s’est pas grillé les ailes en surfant sur un buzz quelconque ou en multipliant les sorties pour ne pas qu’on l’oublie. Sa vie de tous les jours et la musique, deux choses qui s’entremêlent et qui ont fini par donner vie à OFF le premier décembre, un an après Bates Motel. Douze mois, quasiment une éternité pour un artiste aujourd’hui.

Je peux tout essayer pour arrêter la musique, mais c’est plus fort que moi

Qu’importe, car le jeune homme vêtu d’un bandana est revenu plus fort, plus spontané, plus naturel que jamais. Plus lui, tout simplement. Un fait qui s’explique par un drôle de chemin parcouru. Affable, il explique avoir voulu faire une pause pour se ressourcer : « La progression s’est faite avec le temps. Il y a eu des bonnes périodes. La période post-Bates Motel et la période vers janvier-février 2017 où j’ai bossé à fond sur ce nouveau projet. On a envoyé Je me fais vieux et juste après j’ai fait comme un break, coupé de la musique« .

Lucide, il apparaît comme mature. A même de s’écouter avant de se lancer dans du neuf : « J’aurais peut-être dû continuer, car il y avait un petit engouement après ma collaboration avec Hayce Lemsi. Mais j’avais envie de couper un peu, j’étais dans les études et je sentais que c’était pas le moment de m’y mettre à 2000 %. Du coup, j’ai laissé passer deux ou trois mois et après, c’est revenu. Je peux tout essayer pour arrêter la musique, mais c’est plus fort que moi« . Même en tentant le coup, impossible pour lui de se défaire d’un rap qui lui colle à la peau. Eduqué au R’n’B de la fin des ninties (Jennifer Lopez, Aaliyah, etc.), il a réussi le pari d’en faire une musique plus accessible, moins cloisonnée que dans son premier effort.

Mature avant l’heure

Capable de se remettre en question, Haristone n’est pas un bonhomme buté, enfermé dans ses certitudes. Ce dernier parle librement de ce qu’il considère comme ses « prises de risques » et n’hésite pas à aborder la question de la critique. Ainsi, lorsque Booska-P écrit « Haristone est de ce cru de rappeurs dont la surqualité peut leur couper une partie du grand public« , il le retient et nous le ressort : « Je suis très à l’écoute sur les critiques et dès qu’il y a quelque chose d’intéressant, susceptible de me faire progresser, je le prends. Ce que vous écriviez sur votre site, Mac Tyer me le disait aussi« .

J’ai été naturel. Pour toucher les gens, ça ne sert à rien de s’enfermer dans sa bulle, il faut se dévoiler

Sa musique d’alors, cru 2016, s’orientait vers des références cinématographiques cossues : la série Bates Motel et le film Psychose, évidemment. Une époque aujourd’hui révolue, pour laisser place à un quelque chose de plus parlant dans OFF, de moins calculé et de plus introspectif : « J’suis arrivé avec un délire plus spontané. Avant, dans ce que je rappais, il y avait beaucoup de références culturelles, beaucoup d’informations. Aujourd’hui, il y a peut-être plus de sentiments« . C’est ce qu’on découvre dans le réussi Petit Coeur, un morceau dédié à un amour qui part en lambeaux.

Travailler sur ce genre de thème, voilà qui ne lui fait pas peur : « Les risques, j’estime en avoir souvent pris. Pour moi, parler de meufs, c’est un risque par exemple, comme sur Appel en absence. C’est pas forcément commun en France, on te catalogue vite soit comme un fils de p*te, soit comme un canard« . Sur OFF, c’est la spontanéité qui parle avant tout : « J’ai été naturel. Pour toucher les gens, ça ne sert à rien de s’enfermer dans sa bulle, il faut se dévoiler. Dans le travail, c’était fluide. Dès que quelque chose me parle, je le fais« .

OFF, un projet spontané

S’il juge qu’il se prenait peut-être trop la tête avant, Haristone tisse aujourd’hui sa toile dans des sons où le calcul n’a pas sa place. La preuve avec Tango, le morceau le plus exotique de l’album, où il s’essaye à des sonorités sud-américaines avec justesse. Un risque de plus pour un jeune gars qui aime justement flirter avec le danger, comme sur scène par exemple, où il se refuse à utiliser le vocodeur. Le live, une expérience essentielle pour lui : « J’ai goûté à la scène avec Josman notamment, et j’ai kiffé de ouf. C’était au New Morning, je m’attendais pas à ce que le public soit aussi réceptif. La scène, c’est vital pour moi, si tu n’arrives pas à kiffer ça, c’est qu’il y a un problème. Quand tu vois des chiffres sur YouTube, tu ne captes pas le délire. En concert, tu partages des choses avec des gens qui t’écoutent vraiment« .

Que je fasse mille ou un million de vues, je fais ma musique comme je le sens, je suis dans mon monde

Désormais plus mature, il aura dompté entièrement son personnage, sans pour autant se cacher. S’il a coupé le cordon avec certaines de ses influences, il n’oublie pas ce qui fait de lui un rappeur différent : « Les trucs mélancoliques, ça fait partie de moi, j’en ferai toujours, mais dans Bates Motel j’ai trop mis l’accent dessus. Au final dans la vie, je ne suis pas un mec qui est tout le temps comme ça. Je n’ai pas les idées noires, j’ai la joie de vivre, j’rigole tout le temps« .

OFF est là comme une belle carte de visite, un projet dans lequel il apparaît libéré, comme Haristone nous l’a expliqué : « Après ma période de pause, je me suis lâché. Le projet s’est fait en un mois. Quand on a sorti Sanji, il était quasiment terminé. Tout ce que j’ai enregistré, ça s’est retrouvé dans le projet, je n’ai jamais trop eu de déchets. J’ai pas tendance à travailler en studio, j’aime bien être tout seul, chez moi. Je fais des trucs d’autiste (rires)« .

D’ailleurs, si l’EP se nomme OFF, c’est parce que le bonhomme se décrit comme « un peu déconnecté de tout ce qui se fait« . Le dernier mot d’Haristone prouve le fait qu’il est bien sur son Nuage Magique, loin du qu’en-dira-t-on : « Que je fasse mille ou un million de vues, je fais ma musique comme je le sens, je suis dans mon monde« .

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