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Defty, l’avenir du rap made in 225 [INTERVIEW]

Defty, l’avenir du rap made in 225 [INTERVIEW]

Rencontre avec la pépite ivoirienne à l’occasion de sa signature au sein de Def Jam Africa.

Désigné comme la nouvelle référence du hip-hop made in 225, Defty n’en finit plus d’affoler les compteurs et de faire parler de lui au sein du continent africain. Artiste au profil polyvalent, l’Ivoirien vogue entre les styles et propose un rap entre egotrip et de storytelling. Après des débuts dans la musique en tant que beatmaker, Defty prend la décision de passer de l’autre côté de la cabine et va très rapidement se faire adopter par une frange du public hip hop en tant que rappeur indépendant.

Désormais pleinement identifié au sein de la scène africaine du rap, Defty a récemment annoncé sa signature au sein de Def Jam Africa, le label estampillé Universal Music, lancé en juillet dernier. Un engagement qui signe une étape marquante dans la carrière musicale de l’artiste. C’est d’ailleurs à l’occasion de cette belle signature que le phénomène ivoirien s’est confié à notre média.

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Tout d’abord, j’aimerais que tu nous racontes un peu ton parcours. J’ai vu que tu avais commencé ta carrière en 2008.

En effet, j’ai commencé ma carrière en 2008 via un collectif nommé CRAC, avec lequel j’ai sorti un premier album plutôt bien accueilli. En 2010 on était sur la préparation d’une deuxième opus mais on a dû se séparer suite à la crise post-électorale survenue en Côte d’Ivoire. A cette époque, tout le groupe résidait dans une cité universitaire, un lieu que nous avons dû quitter pendant ces évènements. Après cette crise, les différents membres du groupe ont vogué vers d’autres horizons et je suis le seul à être resté véritablement dans la musique. De 2011 à 2014, j’opère en tant que beatmaker et des fois ingénieur son pour certains de mes collègues. Entre temps, j’ai fait des compilations et des petites mixtapes à mon nom. Dès 2014, je démarre enfin ma petite carrière solo avec le titre On va se laisser. C’est vraiment à partir de ce morceau que tout a commencé puisque le public a été réceptif et en a demandé davantage. Ensuite je sors le projet Def Row en 2017 et tout récemment j’ai sorti un EP intitulé Jagger.

Petit, j’ai connu une fièvre du hip-hop

D’où te vient cette envie de rapper ?

Petit, j’ai connu une fièvre du hip hop, ici même, en Côte d’Ivoire, vers 1997. Une période durant laquelle le mouvement était au centre des attentions. Moi, étant un jeune adolescent, j’avais comme unique passion la musique et le football. Je me suis donc mis rapidement à écrire des textes sans savoir pour autant que j’allais me lancer dans le rap. C’est par la suite que je me suis véritablement donné au rap.

Comment définis-tu ton style ?

Mon style n’est pas si différent des autres, mais il est légèrement unique. J’essaye de mettre toute ma personnalité dans mon rap. C’est une musique assez personnelle où je décris ma vie au quotidien. Je définis mon art comme une musique de tous les instants.

Tout récemment tu as signé au sein du label Def Jam Africa. Qu’est-ce que ça te fait de signer au sein d’une telle structure ?

C’est immense, surtout qu’on n’y croyait pas trop de base. Comme je t’ai dit, ma musique est assez personnelle et je ne pensais pas que ça allait forcément plaire aux maisons de disques. Mais pour le coup on nous a contactés, les personnes en question ont dit qu’on avait de la graine et qu’ils voulaient nous signer. De notre côté, on n’a pas hésité une seule seconde, on a juste bien pris de le temps de comprendre comment tout cela fonctionnait et on a vite compris que c’était une très belle affaire pour nous. Dans ce label, je serai supervisé par des anciens rappeurs tels que Pit Baccardi ou Black Kent. Travailler sous la demande de ces messieurs est un véritable atout pour moi. Il y a aussi une image de marque avec Def Jam, que ce soit en France ou aux Etats-Unis, le label a pu compter parmi ses rangs des artistes de renom tels que Jay-Z ou encore Kaaris. C’est véritablement une marque à laquelle on voulait associer notre travail.

On essaye de sensibiliser les jeunes de quartier et les encourager à adopter des comportements moins violents

En dehors de ta carrière musicale, tu es engagé dans l’humanitaire.

Oui, j’appartiens à une structure ivoiro-japonaise qui opère dans ce qu’on appelle la cohésion sociale. Avec cette association, on essaye de sensibiliser les jeunes de quartier et les encourager à adopter des comportements moins violents. Tu sais, généralement en Afrique, tout ce qui rime avec la politique est synonyme de grande violence. Nous nous engageons donc à diminuer ces agissements à travers des activités ludiques telles que des concerts par exemple.

Dans le morceau « La vérité » tu as déclaré : « On vient chanter nos racines, ce n’est pas pour plaire aux arbres ». Est-ce que cette phrase résume ta démarche artistique ?

Oui, cette phrase est relative à beaucoup de critiques. C’était une manière pour moi de dire que je ne fais pas de la musique pour autrui, je le fais pour moi avant tout. Dans ce même morceau je dis : « les grandes histoires ne s’écrivent pas avec des signatures ». Cette phrase signifie qu’il faut juste faire ce que tu as envie de faire avant de signer dans tel ou tel endroit. Beaucoup de gens me considèrent comme l’un des meilleurs lyricistes ivoiriens et cela ne date pas de ma signature avec Def Jam. Ce n’est pas pour rien, on a travaillé en amont avec mon équipe pour mériter un tel statut.

Quelles sont tes influences artistiques ?

Moi j’écoute de tout, surtout depuis que je suis devenu beatmaker. J’aime le jazz africain et l’afro. Après, bien sûr que j’écoute beaucoup de rap. Les classiques, 2Pac, Biggie, Jay-Z, Nas, mais aussi les artistes plus récents comme Travis Scott, Kendrick Lamar ou encore Joyner Lucas. J’écoute énormément les dernières sorties afin de rester branché. Après tout, on fait de la musique avec son temps (rires). En France, il y a Booba, NTM, IAM et pas mal de gars plus undergrounds.

Beaucoup de gens me considèrent comme l’un des meilleurs lyricistes ivoiriens

De quel oeil vois-tu l’évolution du rap africain ?

Le rap africain est très puissant. On commence à avoir nos grosses têtes. Surtout côté anglophone, il y a des gars qui tournent bien et qui sont amenés à collaborer avec des artistes américains de renom. La partie francophone, elle, est très clairement en train d’évoluer. On a le Sénégal, une véritable terre du hip-hop et la Côte d’Ivoire, un pays avec énormément de talents locaux qui manquent cruellement de visibilité, pour le moment.

Tu te vois collaborer avec des artistes de la scène française ?

Ah oui, avec beaucoup de personnes même. J’aime bien Dosseh, j’adore l’univers de Freeze Corleone. Il y a aussi Koba LaD ou Niska. Après, mon boulot de beatmaker fait que j’apprécie facilement le travail des artistes, je trouve toujours du bon dans tout ce que les gens font (rires).

Il y a quelques mois, tu sortais ton EP Jagger. Tu te sens prêt à passer ce fameux cap du premier album ?

Aïe. Etre prêt, je ne sais pas encore. Depuis trois-quatre mois, on bosse à fond. Avec la signature, on a énormément de pression et on essaye de bien faire les choses. Actuellement, je travaille sur un nouvel EP et je verrais par la suite pour un potentiel album.

J’aime bien Dosseh, Freeze Corleone, Koba LaD, Niska…

Quels sont tes objectifs sur le long-terme ?

Tout d’abord asseoir ma notoriété. Chez nous c’est la base, l’argent et beaucoup d’autres choses viennent avec la notoriété. J’ai aussi l’intention me lancer dans la production d’artistes.

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