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Booska-classic n°2: Oxmo Puccino, l’enfant seul

Booska-classic n°2: Oxmo Puccino, l’enfant seul

Il y a un mois nous lancions les Booska-classics avec le mythique Pas l’temps pour les regrets de Lunatic. Cette fois encore c’est un artiste Time Bomb que nous avons choisi d’honorer, en la personne d’Oxmo Puccino.

Parmi les nombreux morceaux d’anthologie qu’a signé le Black Popeye, un titre s’est imposé assez rapidement, en ces fêtes de fin d’année. Ce titre, c’est L’enfant seul, son meilleur peut être. Un « cri muet« , L’enfant seul, pour Noël, c’est tout un symbole. Les fêtes incarnent le superflu et l’abondance, elles sont un royaume d’artifices et d’apparences. Et pendant que le peuple se gave, boit et déballe ses présents, L’enfant seul reste terré dans son silence, à regarder les autres l’ignorer . Voilà pourquoi c’est la piste six du premier album d’Oxmo Puccino, que nous avons choisi, un titre touchant mais pudique, sans apitoiement ni voyeurisme.

 » Revenir à l’origine de cette oeuvre c’est réaliser son impact. Que douze ans après, on me parle de cette chanson, montre qu’elle a marqué les coeurs et les esprits. C’est forcément très émouvant pour moi. L’enfant seul c’est une sorte de cri étouffé, une émotion que je ressens et partage avec les gens lorsque résonnent les premières notes sur scène. Cette souffrance retenue, cette émotion intime valent mieux que tous les mots et résument assez bien ce lien que j’ai avec ceux qui m’écoutent et viennent me voir en concert  » nous dit Oxmo. L’émotion est justement bien présente dans ce titre. Oxmo s’adresse directement à l’auditeur: « T’es l’enfant seul, je sais que c’est toi. Viens-tu des bas-fonds ou des quartiers neufs? Bref au fond tous la même souffrance!« . En un court refrain, Ox’ résume parfaitement son message, si leurs origines sont parfois antagonistes, leurs vies totalement opposées, nombreux sont les enfants ayant en commun cette solitude et ce mal être.

Tout le morceau durant, le rappeur parisien va de métaphores en allitérations, joue avec la langue, sans que la forme prenne le dessus sur le fond pour autant. Le message ne peut laisser insensible, tant l’écriture est travaillée. Si le terme de poésie est souvent galvaudé dans le Hip Hop, il n’est pas de trop pour désigner ce texte. Texte qui, au contraire de beaucoup, n’a pas été rédigé en quelques minutes sur un bout de papier, comme nous l’explique Oxmo Puccino.  » C’est une de ces chansons qui fleurissaient sur une feuille avant que je n’ai vraiment le temps d’y réfléchir. Je pratiquais l’écriture spontanée pour peu que je la ressente vraiment. C’est un sentiment qui m’arrive sur quelques chansons que j’ai tellement ressenties avant de les écrire en quelques minutes que j’en ai oublié leur création. L’enfant seul était la première de ce genre, il m’a fallu six mois pour l’écrire, et un mois pour trouver la phrase sur la Côte d’Azur. « 

Mythique, ce morceau doit également son statut à l’excellente instrumentale réalisée par Dj Sek. Beat qui à la base n’était d’ailleurs pas destiné à Oxmo, mais à ses collégues les X-men.  » A cette époque la saine compétition qui régnait dans Time Bomb était aussi dûe au fait qu’il fallait mériter les instrus! En général le meilleur se voyait tout simplement proposer les meilleure instrus! Il y avait donc cette musique étrange, triste et lancinante sur laquelle les X avaient posé un morceau qui serait sans doute devenu légendaire, mais je la voulais! J’ai commencé par chercher le sample car à l’époque je commençais à programmer. C’est alors que j’ai samplé le début de Hill street blues et fait composer une instru à Kessey. Ill est tombé sous le charme des mélodies puis m’a échangé la musique dotée de mon sample avec ce qui allait devenir L’enfant seul. J’ai annoncé dans la foulée à Cassidy que je pressentais l’écriture d’un grand morceau. Et je me rappelle lui avoir dit cela pour que quelqu’un s’en souvienne. « 

L’enfant seul est effectivement un grand morceau, tout comme l’album dont il est issu est un grand disque. Un opus qui, comme en attestent les masques de la Comedia dell Arte sur la jaquette, est partagé entre joie et tristesse, sourires et larmes. L’enfant seul est à ranger du côté de la mélancolie, et de la beauté qu’elle inspire aux artistes. « Je me suis laissé aller à écrire sur la tristesse des enfants et je me suis rendu compte que je parlais de la douleur de l’âme en général, et qu’il y avait des problèmes que l’on pouvait tirer très longtemps.« 

Et douze ans après, l’enfant seul ne se sent pas plus entouré. Il a vu passé des Noël, des réveillons, des dindes et des cadeaux, sans jamais trouver au pied du sapin ce dont il avait besoin…

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