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Ninho, Les Secrets de la Création de Mamacita

Ninho, Les Secrets de la Création de Mamacita

Découvrez la genèse du titre qui a propulsé Ninho au rang d’artiste polyvalent.

Dans le cadre de La Sélection du mois de septembre consacrée à Ninho, Booska-P vous fait vivre le quatrième volet des « Secrets de la Création », un nouveau concept qui retrace la vie du morceau le plus important de la carrière d’un artiste. Rappeur ou autre, chaque acteur de la scène musicale connaît un titre dans sa carrière qui lui fait passer un cap. Cela peut être celui qui lui fait découvrir sa vocation, celui qui lance son ascension, celui qui marque une nouvelle direction artistique ou celui qui le fait exploser aux yeux du grand public. C’est sur cette dernière option que repose le choix de Ninho pour le titre Mamacita, devenu un véritable tube en l’espace de quelques semaines. Le single idéal pour lancer un album deux mois plus tard et le pont rêvé avec une précédente mixtape sacrée disque d’or. La distinction fut d’ailleurs célébrée au quartier dans « Roro« , premier extrait de Comme prévu, un album triomphant, disque d’or en 15 jours.

Mamacita, coup de projecteur décisif

Mamacita a été un tournant

Dans la hotte pleine de bangers made in ter-ter du jeune Ninho, Mamacita est un morceau qui se distingue des autres. Nul ne niera avoir bougé sur sa rythmique et l’avoir entendu à peu près partout cet été. La principale force du titre, c’est que chacun y trouve son compte: une frange massive du grand public et les amateurs de rap, y compris ceux qui repoussent l’ouverture du genre au plus grand nombre, invoquant le fléau de la zumba à tout bout de champs dès que la musicalité se trouve un peu plus prononcée.

Ninho conçoit Mamacita comme l’ultime marche qu’il y avait à gravir pour atteindre un grand succès national. Sur M.I.L.S, il y avait « Dis-moi que tu m’aimes », un premier pas vers le populaire, mais à l’impact incomparable face au mastodonte créé des mois plus tard, désormais à près de 35 millions de vues: « Mamacita ça a été un tournant par rapport aux autres sons. Il y avait beaucoup de vues d’un coup. ‘Dis-moi que tu m’aimes’ avait bien pris, mais Mamacita c’est celui qui m’a donné un plus large public. Il y avait déjà un public féminin, mais là, il s’est élargi de ouf ! J’ai aussi attrapé un public parisien. On a pris au moins 100 000 abonnés. J’ai passé un step, il y a au moins 10 millions d’écart en vues, le stream ça a rien à voir. Tout le public s’est rué avec ce son-là« .

Un rendez-vous presque manqué

Au début Ninho ne savait même pas qui avait fait l’instru

Si aujourd’hui l’alchimie entre le rappeur et la prod’ nous parait flagrante à l’écoute, les deux ont pourtant bien failli ne pas se trouver. Au commencement, il y a Guilty et ses associés du Katrina Squad, poids lourd du beatmaking en France (le Katrina Squad est composé de Guilty, DJ Ritmin, Ace Looky, Farid Next Level). Les producteurs font leur cuisine, notamment DJ Ritmin qui créé la base de la composition dans sa propre inspiration, sans penser à un rappeur en particulier et sans l’ambition de pondre un tube. Pourtant, l’instru est très mélodieuse et sonne grand public, plus que d’habitude. Si bien que l’équipe ne la signe même pas de son légendaire jingle « Katrinaaa Squaaad« . De passage dans les studios de Rec 118, Guilty dépose quelques productions : « Je pensais que, comme tout artiste à un moment donné, il y en a qui s’ouvrent, donc il faut leur faire des propositions pour ça. »

Ninho se souvient: « Je l’ai écouté une première fois, mais pas bien. Puis je l’ai réécouté plus tard et là, j’ai senti le truc« . Seulement voilà, l’instru non signée et égarée au milieu des autres ne permet plus à Ninho d’y associer un nom. Guilty raconte: « Il avait kiffé la prod, il a posé le morceau et il ne savait plus qui l’avait faite et du coup il nous a cherchés. Il a même fait une vidéo de lui en train de poser pour voir si le beatmaker allait tilter !« . Mais le Katrina Squad ne voit pas le message et quelques jours plus tard, Guilty se rend chez Rec 118: « Le directeur artistique me dit ‘Je vais te faire écouter un son pour que tu me dises ce que t’en penses, il est incroyable !’. La prod part et je lui dit ‘Mais, c’est une prod à nous !’. Il a explosé.« 

J’ai réussi à faire un tube de l’été

Inspiré par la composition, Ninho songe d’abord à écrire une lettre d’un homme enfermé à sa femme dehors. Après réflexion, Ninho change la forme du récit en gardant le même thème : « J’ai écrit direct, en un seul jet. On a pris 3 heures et on a fait le son. Ca s’est écrit direct. » Le rappeur du 91 et du 77 n’avait rien calculé, surtout pas l’issue explosive de ce qu’il percevait simplement comme un son de rigueur pour la saison. Mamacita a été conçu comme un son de l’été, un délire apprécié par Ninho: « Je ne l’ai pas conçu comme un tube, mais comme un bon son, j’aimais bien. Le temps allait avec ce son-là, c’était bientôt l’été, j’avais pas encore de morceau estival, qui faisait danser, un son caliente. Mamacita ça m’a permis de faire un son dansant d’été. Je savais que ça allait prendre. »

Est-ce que les gens vont kiffer ?

Le succès est un facteur imprévisible. Comme tout phénomène qui échappe à son auteur, N.I ne misait pas sur l’obligation d’obtenir des rotations en radio « Je me base pas sur la radio, vu que dans les paroles c’est toujours cru, c’est toujours moi. Si je me basais sur les radios, il y a plein de mots que je ne dirais pas. S’il passe, il passe. S’il passe pas…c’est pas grave. Je fais de la bonne musique et c’est tout. » Chez Ninho, l’assurance est bien là, mais il avoue volontiers avoir eu de l’appréhension par rapport à l’accueil de Mamacita, différent de son univers habituel : « Je me disais : est-ce que les gens vont kiffer ? Est-ce qu’ils vont me dire ‘ce genre de son, ça te va pas’ ?. Il fait écouter le morceau à son entourage, pour un premier retour: « Ils m’ont tous dit que c’était lourd, qu’il fallait le balancer. Je l’ai lancé et ça a pris. »

Le 6 juillet, la France découvre Mamacita, un hit urbain dépassant toutes les ambitions qui lui étaient réservées. Le buzz est immédiat. La responsabilité se partage entre un track redoutable d’efficacité et un visuel qui percute, signé par le grand Chris Macari, d’ailleurs l’un des plus optimistes : « Chris était très confiant, il me disait ‘Celui-ci il va péter !’ et il a pété. » nous confie Ninho.

Les cocotiers ou les barreaux

J’avais tout en tête

Tout état déjà limpide dans la tête d’N.I pour un clip qu’il visualisait déjà juste après avoir gratté les lyrics du titre : « J’avais déjà le scénario en tête, je voulais déjà couper avant le refrain, mettre le milieu carcéral et revenir au deuxième couplet et mélanger les deux. » Imaginant d’abord tourner le clip au Mexique, c’est finalement vers l’Ile d’Elafonisi, au sud-ouest de la Crète, que l’équipe de tournage s’envolera, sur les conseils avisés de Chris Macari. Ninho raconte : « Il m’a tout trouvé ! Il a cherché à Elafonisi, il est allé regarder, il nous a envoyé des photos de là-bas. On a surtout choisi cet endroit pour le sable rose« .

Si écrire Mamacita s’est révélé assez facile pour Ninho, le tournage du clip fut plus compliqué et surtout intense : « C’était très dur de faire les deux : revenir de Grèce, faire la partie en prison, bien jouer le rôle d’un détenu, de façon sérieuse… C’était une prison dans le 92, avec un studio monté pour un film. Il y avait un commissariat et une prison dans le même studio. » Le rôle de Chris Macari a été déterminant, non seulement pour la réalisation, mais aussi pour ses idées et la recherche, qu’il a brodé autour de la première vision de Ninho, jusqu’au choix de sa partenaire… »Il m’en a proposé 5 ou 7, et je l’ai choisi elle. Elle était mignonne, ça le faisait. J’avais juste un type précis en tête et elle remplissait les critères. Elle va bien avec le son. La fille, la plage, la prison, il a tout trouvé, on avait plus qu’à s’installer. Force à lui, il a fait un très bon boulot« .

Binks to World

Après Mamacita, beaucoup sont venus nous voir

Le potentiel du titre est vite perçu par les radios et la télévision, qui contribuent à diffuser le morceau et son clip à l’échelle nationale tout en atteignant d’autres espaces francophones, mais pas que : « Il tourne bien en Espagne vu qu’ils comprennent bien le clip et que je parle en espagnol. Je l’entends dans des voitures, dans des pays lointains, au Maroc, dans des clubs… » La France s’ambiance, jusqu’en prison : « Le clip passe à la télé l’après-midi donc les gens en prison peuvent le voir. Beaucoup de gens me suivent là-bas, j’ai un gros public dans le milieu carcéral. Je reçois beaucoup de snaps de gens en prison et ça les touche » nous explique Ninho.

Le succès se ressent aussi pour le Katrina Squad, à l’origine de l’instru, pour qui le plus gros succès jusqu’alors se trouvait dans la plupart des titres d’A7, première mixtape de SCH. Guilty évoque un regard nouveau sur leur travail : « Ce morceau, je trouve qu’il a marqué un truc. Même pour nous, ça nous a fait découvrir d’une autre façon. Beaucoup d’artistes sont venus nous voir par rapport à cette prod. Par exemple, j’avais une bonne connexion avec S. Pri Noir, mais on n’était pas encore rentré dans le vif du sujet. Là où il m’a appelé et il m’a dit ‘frère, celle-là, elle m’a vraiment tapé à la tête, si vous avez vraiment des délires comme ça c’est bien !’ S. Pri Noir c’est un rappeur qui est en train de s’ouvrir. C’est un exemple parmi tant d’autres, il y a beaucoup de monde, mais par politesse pour eux je ne vais pas donner les blazes. »

Bientôt ça puera le platine

J’ai réussi à faire un tube de l’été

Mamacita est un succès dense qui n’a pas encore terminé son ascension. Depuis sa sortie, le son n’a pas encore réellement rencontré le public en live, mais Ninho est serein: « Je n’ai pas encore fait de grands showcases depuis, je n’ai pas bien ressenti le truc encore. Et en concert c’est ton public, il connaît tes textes par coeur donc Mamacita va bien exploser. » Malgré son impact, le rappeur de la banlieue parisienne semble relativiser Mamacita: « Il est rentré dans ma discographie, c’est le meilleur. C’est pas celui que je préfère, mais le public l’a choisi pour me faire exploser, à un niveau national voire international. On a élargi la palette. Je ne dirais pas que c’est un classique, mais c’est un tube. Un tube d’été. »


Ninho gère avec modestie cette première rencontre avec le grand public et un succès populaire. Maintenant que le pas est franchi, il s’agit de doser pour contenter différents publics sans laisser personne sur la route. Un point que Ninho a parfaitement compris et qu’il a su maîtriser dans son premier album Comme prévu à travers des pistes comme « Rose », « Elle m’a eu » ou « De l’autre côté ». Le démarrage triomphant du projet pourrait donner encore une fois raison à Ninho, pas prêt d’accuser la prémonition.

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