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Le rap français accusé, sans preuve, de triche sur le streaming ?

Le rap français accusé, sans preuve, de triche sur le streaming ?

Le SNEP, syndicat d’éditeurs, trouve les chiffres en streaming des rappeurs démesurés.

Depuis que les streamings sont pris en compte dans les certifications, les rappeurs collectionnent l’or et le platine. Il n’aura pas fallu longtemps pour que cela alerte l’industrie du disque et que le SNEP (Syndicat d’éditeurs) pointe du doigt une éventuelle triche de la part des artistes de la musique urbaine. Une accusation sur fond d’incompréhension et sans preuves concrètes.

Soupçons de triche sur la Planète Streaming

Le SNEP (Syndicat National de l’édition Phonographique) est une société civile regroupant notamment les majors du disque et chargée de répartir les droits aux éditeurs. Cette dernière s’est inquiétée dans une note interne, datant de novembre 2016, de la surreprésentation des artistes rap dans les tops streaming « certains artistes de Rap Hip Hop cumulent des scores d’écoutes démesurés sur les plates-formes de streaming audio ». Des performances d’autant plus suspectes pour le SNEP qu’elles « sont loin d’être atteintes sur les autres canaux de distribution ou de diffusion de musique digitale », comprendre le téléchargement légal et la vente physique.

Les motivations de la triche en streaming

Les motivations de cette triche seraient assez simples, on retrouve sensiblement les mêmes arguments que la manipulation des vues YouTube dans le rap français. Des plus gros chiffres de streaming permettent de rentrer dans les playlists des plateformes streaming (et générer encore plus d’écoutes), d’être repéré par les maisons de disques et les radios, de générer plus de royalties et d’obtenir des certifications.

Une pratique qui s’avère relativement facile comme le souligne le SNEP « Petit Calcul : un titre écouté 31 secondes (seuil pour être pris en compte) en boucle via un logiciel génère 20 000 écoutes par semaine, explique le document du SNEP. Sachant qu’un titre classé dans le Top 10 hebdomadaire obtient en moyenne 1,4 million d’écoutes, 70 logiciels d’écoute en boucle suffisent pour propulser un titre dans le top 10 ». Nul besoin de mettre en place son propre système de triche, il existe des prestataires (y compris français) qui offrent, par exemple, 500 000 écoutes Spotify pour moins de 1 500€ (ce qui porte le single d’or à 30 000€ tout de même). Cependant, ces services ont été mis en place très récemment, bien après l’accumulation des certifications par les rappeurs français.

Peut-on parler de triche chez les rappeurs français ?

Lorsqu’on lit l’accusation du SNEP, on ressent une incompréhension des nouveaux modèles de consommation de la musique. Dès novembre 2015 nous vous annoncions le changement de modèle de l’industrie du disque de l’âge de la propriété à celui de l’accès. Si les rappeurs sont si présents en streaming c’est que leur musique touche particulièrement les jeunes, les premiers à avoir adopté cette pratique. Pascal Nègre, lui-même, parlait de cette tendance lors d’une conférence, en expliquant qu’à terme cette surreprésentation allait s’aplanir quand les générations plus âgées passeront au streaming. Lorsque l’on se penche un peu plus sur les singles et albums ayant cumulé des certifications ces derniers temps, on ne retrouve pas de corrélation avec les ventes CD et le téléchargement digital, par contre on constate le même buzz sur YouTube, dans les clubs et dans la rue. Pour les connaisseurs de rap français, on ne retrouve aucune certification « anormale » qui pourrait provenir de la triche. D’ailleurs les rappeurs très mainstream, de pop urbaine, font souvent des scores médiocres en streaming, plus proches de ceux des artistes de variétés.

Le SNEP voit son modèle en chute libre

Interrogé par nos confrères des Échos, Denis Ladegaillerie le patron de Believe déclarait « Nous avons des procédures de contrôle désormais efficaces pour repérer les fraudes et ne pas les comptabiliser, explique-t-il. Ni nous, ni les Deezer, Spotify ou Apple Music n’avons constaté de problèmes récemment». Lorsque l’on sait que les répartitions des revenus du streaming sont calculées selon les écoutes, nul doute que les plateformes de streaming, déjà impopulaires auprès des artistes, auraient depuis longtemps travaillé à l’éradiction de la triche. Peut-on dire que le SNEP, qui a tout misé sur la HADOPI pour mettre fin au piratage, soit plus à même que des géants d’internet comme Apple en matière de triche numérique ?

Ces accusations résonnent étrangement comme une bouée de sauvetage pour un syndicat d’éditeurs qui voit son modèle chamboulé. Le fait que le streaming soit favorable aux musiques urbaines est une chose, le fait qu’il le soit particulièrement aux artistes indépendants (non-membres du SNEP) comme JUL ou PNL en est une autre. Le métier de producteur souffre face au streaming, les plateformes de streaming elles-mêmes sont prête à aider les artistes à sortir en indépendant moyennant une exclusivité. Les chiffres ont parlé, le rap est la musique préférée des Français.

Source : Les Échos.

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