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Youri : « Le rap, c’est comme un exutoire » [INTERVIEW]

Youri : « Le rap, c’est comme un exutoire » [INTERVIEW]

Entretien à l’occasion de la sortie du projet « Tsar Trap Volume 3 ».

Crédits Photos : Antoine Ott.

Youri, l’un des rares rappeurs francophones d’origine russe, mais pas seulement. Loin d’être un simple représentant de l’ex-URSS, le bonhomme est surtout un artiste de talent, du genre à mixer les influences et à faire honneur à Stakhanov. En effet, comme le mythe soviétique, il affiche une productivité dingue avec pas moins de 5 projets et une grosse vingtaine de clips. Des disques travaillés en équipe, notamment avec DJ Weedim pour Tsar Bomba en 2018. Aujourd’hui place au troisième volume de sa série Tsar Trap, qu’il juge comme son opus le plus personnel. Voilà qui valait bien une interview au centre de Paris.

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C’est assez bizarre, mais on a l’impression que tu dis déjà tout dans ce projet. Du coup, on ne sait pas vraiment par où commencer…

On va dire que ça me fait plaisir, ça me soulage du coup (rires) ! Cela va m’éviter de devoir donner trop de réponses, de devoir trop parler, ce n’est pas trop dans mes habitudes. Mais oui carrément, on peut dire que c’est mon projet le plus personnel jusqu’à maintenant. J’ai amené plein d’éléments de mon vécu, plein de souffrances… J’ai réussi à me lâcher, à avoir plus de liberté. Je pense qu’avoir travaillé avec DJ Weedim m’a aidé. Qu’on me classe dans une case à un moment donné, ça m’a au final aidé à mieux en sortir. Avant, j’aurais jugé des sujets trop fragiles par exemple. Alors que maintenant, je peux aborder plein de choses.

Sur ce disque, tu t’épanches plus. Il y a notamment le morceau « Drogue », dans lequel tu t’excuses auprès de ta mère.

Normalement, je fais écouter mes projets à ma mère avant qu’ils sortent. C’est une artiste, donc j’aime bien avoir sans point de vue… Même si elle ne connaît pas bien le rap et qu’elle n’aime pas le côté vulgaire… Là je ne l’ai pas fait, elle ira l’écouter d’elle-même. Elle porte un regard bienveillant sur ce que je fais, même les conneries que je peux dire, c’est un exutoire. Lui faire écouter un titre comme Drogue, ça ne me fait pas peur car ça parle de plein de problèmes et que la drogue justement, était présente dans le passé… Aujorud’hui, je reprends le dessus. Je suis tout simplement fier de ce morceau.

On peut dire que c’est mon projet le plus personnel jusqu’à maintenant

C’est tout de même le cinquième projet en quelques années, t’as calculé ta carrière ?

C’est venu naturellement, comme tous les morceaux que je fais en général. Les productions aussi ont pu m’aider, j’ai reçu les bonnes prods au bon moment. On a bien taffé avec Asot One, tout est allé très vite… Je ne pensais pas que ça allait sortir aussi vite, donc c’est le feu ! Je n’ai pas agi selon une tactique particulière. Je peux parfois réfléchir de ouf, mais là ça fait deux ans qu’on est dans le game et j’ai sorti 5 projets. Les clips, les sorties de projet, ce n’est pas un truc que je calcule, mais voilà, on y est… Parfois je me sens un peu dépassé, car je ne sais pas trop où ça va. Là, ça me fait plaisir car Tsar Trap Volume 3 est un projet qui me ressemble bien.

On dirait que tu fonctionnes toujours avec le même naturel.

C’est plutôt cool de travailler comme ça, mais si le naturel peut avoir ses défauts. Même aux studios, avec les autres, on fonctionne de manière totalement spontanée… Avec Weedim, c’était notamment comme ça, dès qu’une prise était bonne, on la gardait. Pas besoin d’enregistrer tout mille fois, on préférait passer à la suite directement. Pour les mixes du dernier projet, c’était pareil. On évite de trop se prendre la tête pour ne pas partir sur des choses qui ne nous ressemblent pas… Mais au final, ça peut être un défaut dans le sens où certains morceaux mériteraient plus d’attention.

Du côté de l’écriture, comment tu travailles ?

Je suis complètement dépendant de la prod. Si c’est un truc que je kiffe, je vais y aller. Par exemple, je ne vais jamais voir un beatmaker pour lui dire qu’il me faut une instru dans un style ou dans un autre. Je préfère avoir un produit fini de la part d’un beatmaker que je kiffe et à qui je fais confiance. L’instrumentale, pour moi, c’est le plus important pour un rappeur. Là, j’ai changé de vibe un peu à chaque fois pour ne pas m’emmerder, j’ai essayé des trucs différents.

Aujourd’hui, on a envie d’exprimer le plus de trucs possibles, que ce soit dans le son ou dans la vidéo

Question productivité, tu affiches un sacré rythme. C’est un réel besoin ?

C’est ma volonté et celle de mon équipe. Aujourd’hui, on a envie d’exprimer le plus de trucs possibles, que ce soit dans le son ou dans la vidéo. On a envie de s’essayer à plein de choses, même si ça coûte de l’argent, du temps, et qu’on peut même se tromper. Je pense qu’aujourd’hui, avec tout ce qu’il se passe dans le rap, c’est impossible de concevoir une carrière de rappeur sans être productif et omniprésent. Si tu n’as pas de buzz à la base, il ne faut pas se décourager et envoyer la sauce.

Tu n’as jamais eu peur d’être bloqué dans une case ?

Non, parce que j’aime et j’écoute toutes sortes de rap. Donc je n’ai pas envie de me cantonner à un seul style et je reste dans le même état d’esprit, celui de vouloir découvrir plein de choses. De base, qu’on me mette dans une case, ce n’est pas une chose qui m’a fait peur. Je savais que ça allait arriver, j’étais juste prêt à en sortir.

D’ailleurs, à quel moment tu as commencé à prendre le rap au sérieux ?

J’ai commencé à taffer mon rap en parallèle d’études dans une école de cinéma. J’étais en deuxième année et on a préparé Tsar Trap Volume 1 puis Free Tsar Volume 1, ça a pris un peu, il y a eu de bonnes retombées. Du coup, je suis allé à l’école pour leur dire que j’allais mettre mes études en suspens. Je ne pouvais pas me concentrer sur deux choses en même temps, avoir le cul entre deux chaises. J’ai dû faire un choix et pour l’instant, je ne regrette pas.

De base, je suis un peu égoiste, si je fais de la musique, c’est pour moi

Est-ce que tu penses déjà arriver avec quelque chose de nouveau après ce « Tsar Trap Vol. 3 » ?

Non, le projet c’est de vraiment installer ce troisième volume, de plus l’illustrer. Même si c’est allé vite, on a pris le temps de penser à tout ça. Je pense que c’est un disque qui a sa force, qui a une envergure, alors on va le laisser vivre un peu de temps. De mon côté aussi, me poser va m’aider à ne pas me précipiter. De base, je suis un peu égoiste, si je fais de la musique, c’est pour moi et mes soc’… Pour qu’on s’amuse. Alors si d’autres personnes aiment ça et s’amusent aussi avec, c’est parfait.

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