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Soolking, les recettes d’un succès à l’international

Soolking, les recettes d’un succès à l’international

Pour chaque artiste, le chemin classique du succès, si tant est qu’il y en ait un, s’établit étape par étape. D’abord, s’imposer dans sa ville, son département et sa région. La consécration intervient généralement lorsque la reconnaissance nationale pointe le bout de son nez. Et pour les plus ambitieux, la renommée dépasse même les frontières nationales. C’est le cas de Soolking, qui, cette année ainsi que la précédente, est l’un des artistes francophones les plus écoutés au monde. Retour sur une réussite fracassante, qui parle une langue universelle.

La France avant l’étranger : la construction d’une réussite

Pour conquérir le monde, la route est longue et périlleuse. Et comme chaque entreprise d’une telle ambition, de bonnes fondations sont nécessaires. Ça, Soolking l’a bien compris. Avant de partir à l’abordage comme Luffy, l’artiste s’est attelé à créer un engouement national. Et c’est à partir de 2017 que son nom commence à résonner sur la scène musicale française. Cette année-là, il enchaîne deux titres qui seront des cartons : T.R.W en featuring avec Alonzo et Mi Amigo. Aujourd’hui, ces deux clips culminent respectivement à 48 et 56 millions de vues sur YouTube.

L’année 2018 marque un tournant dans la carrière de Soolking. Et tout se joue en trois jours. Le 20 janvier, il publie le clip de Milano. Un morceau hommage à la ville italienne et tourné en Algérie. Les appétences pour l’international se font déjà sentir. Aujourd’hui, la vidéo compte 272 millions de vues. Le 23 janvier, Sofiane l’invite à son Planète Rap et l’artiste interprète Guerilla. C’est une déflagration. A l’heure actuelle, la vidéo est de très loin la plus visionnée de la chaîne YouTube de Skyrock, avec 327 millions de vues.

Ces deux bombes lâchées coup sur coup, l’artiste surfe sur la vague et sort son premier album Fruit du démon en novembre de la même année. Les premiers chiffres sont plus qu’honorables. En une semaine, le projet s’écoule à plus de 18 000 exemplaires. Disque d’or en un mois, il est certifié platine en juin 2019, sept mois après sa sortie. Plus que le succès territorial, Fruit du démon marque le début de l’avènement de Soolking à l’international.

En plus de Guerilla, la tracklist du projet affiche un autre hit : Dalida. Le titre fait son entrée directement à la sixième place du top 10 mondial de Deezer. Un succès que Soolking peine à assimiler : « Je ne réalisais pas. Quand t’es chez toi, dans ton appartement, tu ne sais pas que ta musique fait le tour du monde. Je ne m’en étais pas rendu compte. » Qu’importe, l’artiste a dépassé les frontières. Reprise du fameux morceau Paroles…Paroles…, l’hommage à la chanteuse se révèle être un titre universel au gimmick entêtant et dont le refrain est déjà connu de beaucoup. Une recette qui aide pour exporter sa musique.

Au-delà des frontières, les clés du succès maîtrisées

Sans visa, sans frontières, sans limites géographiques. Avec ce dernier album, Soolking a réaffirmé son statut d’artiste universel. S’il en a vendu près de 40 000 en France en trois mois, c’est bien moins qu’en Algérie où Sans visa s’est écoulé à environ 58 000 exemplaires. Sur l’ensemble du globe et sans compter l’Hexagone, le projet cumule 574 millions de streams. Des chiffres hallucinants. L’album est notamment porté par le hit Suavemente.

Soolking a repris la formule qui avait fait son succès avec Dalida. Voluptyk, le beatmaker qui a composé la prod de Suavemente, explique comment le morceau a vu le jour : « J’avais envie de faire une reprise. J’ai donc appelé Scar (qui est derrière Tout va bien) et on a cherché. Je tombe sur le morceau d’Elvis Crespo et on commence à chantonner. » Les deux artistes, convaincus que l’idée est bonne, se lancent. En une heure, le travail est bouclé.

L’idée de partager cette prod à Soolking s’impose presque naturellement dans l’esprit de Voluptyk : « J’ai trouvé que le morceau lui collait bien. Je savais que Soolking aimait bien faire des morceaux avec ce genre d’accords, un peu latino. Ce sont des rythmiques actuelles qui correspondent à son style. » Et la musicalité du morceau favorise son exportation : « La guitare joue beaucoup. Cet instrument fait beaucoup latino, cubain, il a un côté hispanique. C’est vraiment dans le thème du morceau d’origine. »

Suavemente est un morceau qui était destiné à s’exporter : « Déjà, je ne qualifierai pas ça de rap. On peut appeler ça de la pop urbaine. Et le truc, c’est que ça fait bouger. Que tu sois Français, Anglais, Espagnol ou Indien, ça fait bouger. Et surtout, le refrain, les gens le connaissaient déjà, ils l’avaient déjà en tête. C’est un son mythique. C’est plus facile à accepter pour les gens, c’est sûrement ce qui a dû faire le succès du morceau. Et puis la rythmique est grave tendance en ce moment. Ça ne peut qu’aider au succès. » détaille Voluptyk.

Déjà disque de diamant, Suavemente est un véritable carton à l’étranger et surtout en Europe. En excluant la France, le morceau accumule plus de 180 millions de streams sur le continent dont plus de 7 millions en Allemagne et en Italie. Et il fait déjà partie des 11 morceaux de Soolking qui ont dépassé les 100 millions de vues sur YouTube. En voici la liste :

  • Zemer (avec Dhurata Dora): 712M de vues
  • Guerilla : 327M de vues
  • Liberté (avec Ouled El Bahdja) : 324M de vues
  • Dalida : 283M de vues
  • Milano : 272M de vues
  • Melegim (avec Dadju) : 264M de vues
  • Adios (avec L’Algérino) : 170M de vues
  • Favela (avec Naps) : 164M de vues
  • Ça fait des années (avec Cheb Mami) : 126M de vues
  • Suavemente : 119M de vues
  • Vroom vroom : 114M de vues

Parmi ces titres, il y a trois collaborations avec des artistes étrangers : Zemer feat Dhurata Dora, Liberté avec Ouled El Bahdja et Ça fait des années aux côtés de Cheb Mami. Dans sa carrière, Soolking s’est entouré de nombreux artistes étrangers. Pêle-mêle, il affiche des collaborations avec Ozuna, Diplo, Ghali, en plus de ceux cités au-dessus. Une autre façon de s’exporter et de faire découvrir sa musique.

Quels autres accomplissements pour la suite ?

Collaborer avec des artistes étrangers, reprendre des morceaux déjà bien ancrés dans l’imaginaire collectif, jouer sur des rythmiques spécifiques : les clés du succès sont parfaitement maîtrisées par Soolking. Mais il ne faut pas oublier son passé. D’origine algérienne, l’artiste a été, pendant de longues années, membre du groupe Africa Jungle. Et il puise dans ses inspirations pour composer sa musique qui est un « mix de tout ce qu'[il] a pu écouter dans [sa] jeunesse : du R’n’B, du reggae, de la musique orientale et traditionnelle algérienne, du rap et même des musiques reggaeton et latino. »

Si Soolking reste proche de la scène rap français, il ne s’y est pas cantonné. A l’heure où cette musique se diversifie de plus en plus et que d’autres sonorités l’investissent, la versatilité de l’artiste n’est plus à démontrer. Et il avoue que c’est grâce à ce dans quoi il a puisé plus tôt : « J’ai écouté plein de musiques du monde et pas uniquement ce qui plait dans un seul pays comme le rap français par exemple. » Pourquoi pas, alors, revenir à ses premiers amours et se (re)mettre à faire du raï ? « Je pense que je ne changerai pas de style. Mais j’imagine que je m’adapterais à toutes les sonorités qui peuvent être à la mode, tout en gardant mon ADN musical » répond l’artiste.

Il ne faut pas l’oublier, Soolking a quitté l’Algérie en 2014 pour se lancer en solo. Et son succès ne fait que conforter sa décision. Sur ce coup, il a eu le nez creux. De quoi lui permettre de se lancer dans la production de jeunes artistes ? Cela ne semble pas être d’actualité. Satisfait par ce qu’il a accompli jusqu’ici, Soolking ne se projette pas sur la suite de sa carrière : « Je pense qu’elle sera comme elle est maintenant. S’il y a plus de réussite, c’est bien. S’il n’y en a pas plus, c’est très bien aussi vu comme je suis maintenant. » L’artiste affiche sa philosophie pleine de gratitude envers le public qui l’a mené où il est aujourd’hui.

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