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Sizlac, un rap teinté de vécu

Sizlac, un rap teinté de vécu

Rencontre avec l’artiste orléanais à l’occasion de la sortie de son premier projet « Morne ».

Crédits Photos : Antoine Ott

Tout droit venu d’Orléans, Sizlac est un jeune rappeur qui fait de plus en plus parler de lui. Découvert en premier lieu grâce à sa série de freestyles Baboulousquare et à sa participation au Planète Rap de Vegedream en 2018, le newcomer a connu une véritable exposition lors de son apparition dans la compilation Game Over 2 aux côtés de Dosseh sur le morceau Les histoires. Depuis, l’artiste originaire de la cité johannique s’est engagé auprès de Sony Music sous le label Arista et compte bien prouver sa valeur au grand public. Preuve en est avec la récente livraison de son tout premier EP, Morne. C’est d’ailleurs à l’occasion de cette sortie que le jeune rappeur est passé dans nos locaux.

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Une implication tardive

Sizlac, ou l’histoire d’un rappeur qui n’était pas destiné à en devenir un. En effet, tout lui est tombé dessus sans qu’il le réclame, à commencer par son nom d’artiste : « J’étais interdit d’Orléans en 2012. J’étais dans un lycée à Chelles (77). Le premier jour où je suis arrivé dans l’établissement, il y avait un mec qui s’appelait Sizlac, sauf que lui, il était absent ce jour-là. Et moi quand je suis arrivé dans la classe, le prof a cru que c’était moi ce fameux Sizlac. Il a commencé à me dire : « Sizlac, vous commencez bien ! Premier jour et vous êtes déjà en retard ! » Du coup, les gens de ma classe ont continué à m’appeler comme ça. Et quand je suis rentré à Orléans, il y a un mec de la ville qui m’a aussi appelé Sizlac alors qu’on me surnommait comme ça qu’à Paris à l’origine. C’est comme ça que le pseudo Sizlac est resté. C’est un truc tout bête. » C’est uniquement à partir de 2015 que le jeune artiste commence à s’ouvrir au monde du rap, doucement, mais sûrement : « Ouais j’ai débuté le rap en 2015, mais en vrai, je n’avais pas vraiment commencé à proprement parler. Je faisais des sons pour faire des sons quoi. C’était juste comme ça, on crée, mais ça ne sort pas, on le fait juste pour nous. »

Mais entre soucis personnels et manque d’implication, Sizlac ne prend jamais le temps de se lancer pleinement dans le son. Le déclic ? Un simple freestyle organisé dans la voiture d’un de ses proches qui crée un mini-buzz sur la toile : « Il ne se passe pas grand-chose de 2015 à 2018 parce que je suis incarcéré. De base, ce n’était vraiment pas prévu que je rappe. Ca c’est fait comme ça en fait. Un jour, un de mes potes a mis une instru dans sa voiture, moi j’ai rappé un texte que j’avais fait à l’ancienne et ça collait bien. Après, il m’a filmé, il a balancé ça sur Snapchat, les gens ont adhéré et j’ai continué à partir de là. C’est à ce moment que c’est devenu sérieux. »

De base, ce n’était vraiment pas prévu que je rappe

La critique n’est pas chose facile surtout lorsqu’elle s’adresse à nos proches et ça, Sizlac en avait bien conscience : « Y en a plein qui te disent que t’es chaud alors que t’es éclaté. Même moi je l’ai fait à des gens. C’est grave, mais des fois, tu ne peux pas blesser des personnes proches de toi. Après, c’est vrai que c’est mieux de dire la vérité, mais il y a des gens qui vont croire que t’es juste jaloux si tu leur donnes des mauvais retours alors qu’on essaye juste d’être honnête pour le bien de la personne. Moi, je préfère m’éviter ça. » C’est donc à partir de cet engouement manifesté par des personnes extérieures à son cercle proche que l’Orléanais a pris pleinement conscience de sa valeur en tant que rappeur : « Quand j’ai commencé, je ne prenais pas le truc au sérieux, mais après quand j’ai vu des inconnus me donner leur point de vue extérieur, et valider mon travail, ça a changé ma vision des choses et ça m’a poussé à m’y mettre de manière plus sérieuse. »

Premier coup de projecteur

Après quelques années dans la scène rap, Sizlac connaît sa véritable première exposition lors de son apparition dans la compilation Game Over 2 sur le morceau Les histoires en featuring avec Dosseh, le porte-drapeau du rap orléanais à l’échelle nationale. Un artiste avec lequel Sizlac était proche bien avant de démarrer sa carrière musicale : « Dosseh c’est un gars que je connais depuis longtemps. Il traînait dans mon quartier quand j’étais petit, je le voyais déjà. Il savait que je rappais mais sans plus, après, au fur et à mesure, il a vu que j’ai commencé à enchaîner les freestyles et il s’est dit que j’étais chaud. C’est à partir de là qu’il a partagé mes sons. Après comme je t’ai dit, j’étais en contact avec lui bien avant de rapper. Suite à ça, il a vu que je m’impliquais de manière sérieuse dans le son, et c’est là qu’il a commencé à me donner des directives et à me conseiller. » Conscient de son potentiel, Yuri a donc fait appel à ses services pour la compilation du label 50K : « Je ne sais pas comment il a pensé à moi pour la compil’ Game Over 2. Moi j’étais chez moi, mon téléphone a sonné, je décroche et Dosseh me dit : « Là j’ai un morceau, faut que tu fasses le deuxième couplet, que tu craches ton meilleur feu ». Je devais le faire pour le lendemain. Mais en vrai, même s’il était 4 heures du matin et que le studio était bloqué pour 9 heures, j’allais encore même écrire le couplet. C’était une trop grosse opportunité ! Donc il m’envoie l’instru, j’écris et c’est tout, ça s’est fait aussi simplement. Après je ne sais pas s’il avait prévu depuis longtemps de faire ce titre avec moi, si c’était prémédité de sa part, je ne lui ai pas demandé. Je ne demande jamais rien moi. »

Au-delà du simple featuring, Dosseh n’a pas hésité à faire parler sa riche expérience dans le circuit afin de conseiller au mieux le rookie : « Je ne vais pas te dire exactement ce qu’il m’a dit (rires). Je me souviens qu’il m’a beaucoup conseillé sur les réseaux sociaux. Comment gérer ton réseau, comme quoi il y a des choses qu’on ne peut pas faire en tant qu’artiste. Moi, en plus, je suis du genre à faire n’importe quoi. Dosseh m’a dit qu’on ne pouvait pas dire telle ou telle chose, poster telle ou telle chose ou prendre parti pour certains sujets. Rester tout le temps neutre. Aujourd’hui c’est des conseils que j’applique au quotidien. » Positionnée à la première place du tracklisting de la compilation, cette collaboration aura fait office de gros coup de projecteur pour l’artiste : « Au début, je tournais autour de trois mille auditeurs par mois sur les plateformes de streaming et d’un coup, je suis passé à cinq cent mille auditeurs par mois. Après ça n’a pas fait grimper mes réseaux parce que les gens ne connaissaient que ma voix, pas mon visage. Ca m’a aussi apporté au niveau de ma ville parce que les gens ne savaient pas forcément qu’on se connaissait Dosseh et moi. »

La signature chez Arista m’a structurée

Quelque mois après la sortie de la compil’, Sizlac annonçait sa signature au sein du label Arista. Une étape clef et décisive dans son développement artistique : « La signature chez Arista m’a structurée. Tout est plus carré maintenant. Par exemple, tu annonces une date pour un clip et tu sais que cette date sera respectée. Moi, si je t’annonce un clip à midi, finalement il sortira à minuit. Ca t’apporte une sérénité parce que tu es géré par d’autres personnes, ça te libère d’un poids. »

Un EP comme carte de visite

Le 19 mars dernier, le rappeur dévoilait son EP intitulé Norme sur toutes les plateformes de streaming. Un premier projet dans lequel Sizlac se raconte et se livre sans concession : « Rien que le titre « Morne » c’est en rapport avec moi. C’est vraiment une carte de visite, quelque chose qui me résume. […] Quand tu vis les mêmes événements au quotidien, que tu es confronté aux mêmes scènes, tu as plus de facilités à raconter ces choses-là. Si j’étais un habitué des boîtes de nuit, je t’écrirais des textes sur les boîtes. Sauf que moi, c’est pas le cas, je suis tout le temps au quartier. Je vois des choses, je fais des choses donc j’ai plus de facilité à raconter ces choses-là. »

Long de sept titres, le disque peut compter sur un beau panel d’invités : Lihn, Kaaris ou encore Dosseh. Un casting prestigieux pour le premier projet d’un jeune artiste. Si la connexion avec K2A s’est faite par le biais de connaissances mutuelles, c’est bien Sizlac qui a été à l’initiative de celle avec Yuri : « Je suis revenu vers lui. Je lui ai dit que je préparais un projet et que j’aimerais bien qu’il pose dedans. Il a tout de suite accepté. »

Le but, c’est de toucher un maximum de personnes

Désormais, il est d’ores et déjà temps de penser à l’avenir pour Sizlac. Alors que Morne vient tout juste de paraître aux oreilles des auditeurs rap, le jeune artiste semble avoir une idée précise concernant la suite des opérations : « La suite, c’est Morne 2. On va sortir une réédition du projet d’abord et après on va envoyer le second volet. Cela va peut-être déboucher sur une série de projets, mais on ne va pas trop en abuser non plus (rires). » Et lorsqu’on questionne le principal intéressé sur son envie de collaborer avec d’autres artistes de la scène actuelle, ce dernier ne réfléchit pas une seule seconde : « J’aimerais bien collaborer avec Kalash, Vegedream, après pour le reste on verra. Il faut varier et s’ouvrir un peu. Le but, c’est de toucher un maximum de personnes. » Elargir son public, un défi très ambitieux, mais tout de même faisable pour l’artiste. Et puis qu’on se le dise, sans ambition, il n’y a pas de talent…

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