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Fabrice Eboué : « Un jour j’aimerais être à fond dans la réalisation »

Fabrice Eboué : « Un jour j’aimerais être à fond dans la réalisation »

A l’occasion de son film Coexister, Fabrice Eboué s’est confié à Booska-P. De quoi aborder sa deuxième carrière derrière la caméra…

Un imam, un prêtre et un rabbin dans un même groupe de musique, c’est la dernière recette étonnante concoctée par Fabrice Eboué pour son nouveau film qui débarque dans les salles ce 11 octobre.

De la Case Départ de sa seconde carrière à son dernier long-métrage Coexister, l’humoriste s’est mué en un cinéaste plus accompli et sûr de ses forces. Pour Booska-P, l’ancien du Jamel Comedy Club s’est livré sur son dernier film, sa conception du métier de réalisateur et son goût prononcé pour le rap.

La promo ça se passe bien, pas trop fatiguant ?

(rires) Aujourd’hui, c’est la journée où on enchaîne tout, donc on a l’impression d’être un peu un perroquet, mais tout métier a ses aléas. On passe un bon moment quand même donc ça va. Il y a une bonne équipe, avec le casting de Coexister ça déconne bien entre deux et puis on fait la promo d’une comédie donc tout va bien.

Tu fais partie de cette France métissée avec un père camerounais et une mère française. Ca te tenait vraiment à coeur de faire un film qui parle de la mixité, du vivre-ensemble ?

C’est pas que ça me tenait à coeur parce que la genèse du projet, ce n’est pas la mixité. Au départ, je voulais parler de l’industrie de la musique. Ce qui me met la puce à l’oreille, c’est le groupe Les Prêtres Chanteurs, je trouve intéressant de raconter l’histoire de ces trois gars qui étaient prêtres, mais qui deviennent d’un coup rockstars. Je sais ce que c’est de remplir des grandes salles et d’avoir tout d’un coup des gens qui t’applaudissent, ça agit forcément sur ton cerveau. D’ailleurs, à l’issue de la tournée le plus jeune des trois dit « je veux plus être prêtre finalement, je vais me marier, etc ».

Tout ça d’un point de vue philosophique, c’est intéressant parce que c’est des gens qui sont totalement aux antipodes des rockstars. Je commence à écrire là-dessus au départ comme ça, je peux parler du monde de la musique. Ensuite petit à petit, je me dis qu’il manque quelque chose : ce qu’il faut rajouter dans un scénar’, c’est-à-dire du conflit. Et là, je me dis que ça serait beaucoup plus intéressant d’avoir trois religieux de confessions différentes et c’est comme ça qu’est né le groupe Coexister. Mais au départ mon sujet, c’est plus le monde de la musique.

Sur scène, tu as l’habitude de parler de manière décomplexée des religions. Comment tu as appréhendé le fait de t’adresser à un plus grand public et forcément d’une manière plus cadrée ?

En spectacle, je suis avec « mon public », c’est un rapport de potes et honnêtement je peux quasiment tout me permettre parce qu’on est dans une certaine liberté. C’est parfois totalement gratuit, mais les gens viennent aussi pour ça. Un film c’est totalement différent, comme tu dis l’auditoire est plus large et puis surtout, on raconte une histoire. En dehors de l’équilibre pour dire qu’on ne stigmatise pas plus les uns que les autres, j’ai fait attention à ce que les vannes, les gags viennent faire avancer le récit. Si ça avait été gratuit, ça aurait été maladroit et c’est ce que j’ai essayé de ne pas faire dans ce film-là.

Il y a eu beaucoup de progrès, je pense que c’est mon meilleur film

Dans ta manière de travailler justement, il y a quelque chose de différent par rapport à Case Départ et au Crocodile du Botswanga, c’est qu’ils étaient en co-réalisation alors que là, tu es crédité seul. Qu’est-ce que ça a changé dans ta manière de travailler ?

D’abord, c’est une histoire de maturité, je pense que j’avais suffisamment appris et que je me faisais assez confiance pour me dire cette fois ça va être mon film à 100%. Ensuite, dans la façon de travailler, la réalisation est bien meilleure sur celui-ci que sur les deux premiers qui étaient de la comédie française un peu plate. Mon deuxième film, j’en étais pas spécialement fan parce que je me suis un peu précipité après le succès du premier. Sur Coexister, j’ai pris plus de temps sur le scénario, il y a plus de personnages aussi donc ce n’est pas la même chose pour diriger. Il y a eu beaucoup de progrès, je pense que c’est mon meilleur film et que sa qualité vient de ces nouvelles rencontres parce que quand tu élargis ta famille artistique, c’est une ouverture d’esprit, de création et ils amènent pleins de nouvelles choses sur le tournage.

Tu évoques les différences au niveau des personnages de tes films. Il y a quand même une habitude, c’est que tu es toujours à l’affiche. C’est quelque chose que tu aimes bien faire, un kiff personnel ?

Un jour, j’aimerais pouvoir être à fond dans la réalisation parce que, soyons franc, tu ne peux pas être à 100% dedans quand tu fais les deux. J’ai un conseiller artistique avec moi en qui j’ai entière confiance. Je me prépare aussi beaucoup en tant qu’acteur en amont. Mais disons les choses clairement, j’ose espérer qu’un jour, je pourrai le faire. Il se passe aussi que pour les comédies en France, quand je dis que j’ai mon nouveau film, tout de suite les distributeurs vont dire « c’est ton film, il faut que ce soit marqué Eboué donc tu joues dedans ». Après, ce qui va bien c’est que le rôle que j’avais à interpréter finalement n’est pas si loin de moi, ce n’est pas une grande performance d’acteur. A partir de là ça va, j’arrivai à peu près à jongler avec les deux.

On a l’habitude de voir beaucoup d’humoristes en tant qu’acteurs dans des films et depuis quelques années aussi derrière la caméra…

Je suis arrivé par hasard au cinéma. Je viens du one-man show et j’ai connu les « années galères », même si je n’aime pas ce terme parce que ça donne l’impression que c’était l’enfer… J’ai démarré en 98/2000 dans la salle des Blancs Manteaux où il fallait écrire mon spectacle, je le mettais en scène tout seul, j’allais coller les affiches, je répondais à la presse. Il y a ce côté omniscient que je crois que tu conserves. Pour un film, je me dis que je vais rester sur la même lancée, c’est-à-dire continuer à vouloir porter mon projet jusqu’au bout. Je l’écris, je le réalise, je joue un des rôles aussi et maintenant, je le présente. Je crois que ça vient du one-man show et c’est pour ça qu’il y a beaucoup d’humoristes qui font ça.

Pour revenir sur le contenu du film, il y a cette scène où Audrey Lamy te fait écouter des groupes que tu pourrais produire. Puis arrive ce fameux clip de rap sur lequel vous avez fait pas mal de com’. C’est un petit clin d’oeil à ton passé de rappeur ?

(rires) C’est un petit clin d’oeil à mon passé de rappeur, mais c’est surtout un clin d’oeil au rap en général, dont je suis un grand fan. J’en écoute certes beaucoup moins aujourd’hui, mais ce que je voulais, c’était reprendre tous ses codes. On sait que dans ce genre de clips il y a ce côté très viril, très masculin. Ce qui m’amusait, c’était de mettre un peu d’homosexualité là-dedans. Je voulais pas une grosse parodie de rap comme on pouvait voir à une époque du type les Inconnus. Je me suis aperçu qu’en changeant deux ou trois mots… Après, on y va à fond dans le refrain pour que ça soit quand même drôle. C’est assez amusant parce qu’on sait qu’homosexualité et rap ça a jamais fait très bon ménage, mais là, je me suis dit qu’une fois le pas franchi, il ne manque plus grand chose.

T’écoutes quoi par exemple niveau rap aujourd’hui ?

J’ai 40 piges cette année donc ma période phare du rap c’est le début des années 90 quand j’ai 16 ans. Forcément, c’est la fin de N.W.A, c’est Dr. Dre. Je suis très West Coast, Los Angeles… Donc, aujourd’hui, je continue à être abonné à des mecs comme Kendrick Lamar, Anderson .Paak ou des choses comme ça. J’ai toujours été beaucoup moins rap français que rap US.

Au niveau de tes projets, tu prévois de rester pour le moment sur le cinéma ou de revenir sur scène ?

Je fais toujours la même chose. J’ai pris mon temps pour faire Coexister donc je fais toujours une alternance. J’ai mon nouveau spectacle qui arrive au Théâtre de la Renaissance fin janvier. J’aurai à peine fini de présenter ce film que je serai déjà en train de préparer une petite tournée de rodage et d’écriture en province où je vais essayer des choses pour débarquer sur Paris fin janvier.

Pas de repos donc…

(rires) Non, pas de repos. On kiffe quoi.

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