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McGregor a-t-il la moindre chance de battre Mayweather ? [DOSSIER]

McGregor a-t-il la moindre chance de battre Mayweather ? [DOSSIER]

L’irlandais roi de l’UFC et l’américain légende de la boxe s’affronteront le 26 aout prochain lors du combat le plus attendu (et le plus improbable) de l’année…

Et dire que tout avait commencé sur le ton de la plaisanterie… Interrogé en juillet 2015 au détour de la conversation par le présentateur de télévision américain Conan O’Brien sur un hypothétique combat contre Floyd Mayweather, Conor McGregor, tout juste auréolé du titre de champion du monde des poids plumes après avoir envoyé au tapis José Aldo en treize secondes à peine, répond alors qu’il considérerait « très certainement » la chose. Une déclaration au demeurant assez anodine qui va contre toute attente mettre le feu aux poudres.

Deux ans plus tard, bien que cette affiche fantasme ne fasse initialement écho à aucune demande du public ou au moindre impératif sportif, le monde s’apprête à assister à ce combat annoncé d’ores et déjà comme le plus lucratif de l’histoire toutes disciplines confondues – pour rappel, malgré des circonstances éminemment plus favorables, il avait fallu pas moins de cinq longues années à Mayweather et Manny Pacquiao pour se retrouver face à face.

Gloire doit être rendue sur ce point aux deux principaux intéressés qui ont usé de toute leur verve et de toute leur science marketing pour faire monter la sauce comme jamais, notamment via une série quasi interrompue de piques échangées sur les réseaux sociaux (menaces physiques et sous-entendus raciaux inclus). Sur ce point, Conor s’est ainsi révélé le digne héritier de Floyd qui a trouvé là son égal tant en matière de mise en scène de soi-même que de trash talking, une première dans sa carrière.

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Pour le reste la comparaison risque de vite tourner court dès l’instant où la cloche va retentir. Le combat se déroulant selon les règles de la boxe anglaise (pas de coup de pied, pas de coup de coude, pas de projection), sur le papier tout porte à croire que Money ne fera qu’une bouchée de son adversaire.

Une manière de résumer le combat serait en effet de dire que l’un des boxeurs les plus doués de l’histoire du noble art va affronter un type qui n’est jamais monté une seule fois sur un ring chez les pros. Détenteur de cinq ceintures de champion du monde, invaincu en 49 rencontres, roi de l’esquive, Floyd Mayweather a défait deux décennies durant absolument TOUS les meilleurs boxeurs de sa génération, et ce sans jamais ou presque paraitre en difficulté

Un contexte qui incite donc à relativiser les bravaches à répétition du Notorious MMA, persuadé de pouvoir faire mordre la poussière à son meilleur ennemi

Pour autant, est-il complètement fou de penser que l’indomptable Conor McGregor déjoue tous les pronostics et réussisse le casse du siècle ? Non seulement, aucune compétition sportive ne va sans une forte dose d’imprévu, mais il existe également toute une batterie de sérieux arguments jouant en sa faveur.

Avant que la pression monte encore d’un cran, passons-les au crible.

1. L’ÉTAT DE FORME

Le premier facteur qui vient à l’esprit est évidemment celui lié à l’âge avec un McGregor qui du haut de ses 28 ans est au sommet de sa condition physique, face à un Mayweather qui penche désormais du mauvais côté des 40 et voit sa vitesse d’exécution (l’un de ses atouts majeurs) diminuer toujours un peu plus.

Mieux, contrairement à Money qui n’aura pas mis les gants depuis 23 mois (sa promenade de santé contre Andre Berto en septembre 2015), Conor a entretemps combattu lui à quatre reprises, accomplissant au passage ce qu’aucun athlète n’a jamais accompli dans l’octogone : remporter dans le même temps deux titres mondiaux dans deux catégories différentes !

Oui mais sauf que : Certes, Mayweather a profité de son nouveau temps libre pour voyager tout autour du globe dans son jet privé, siroter des Mai Tai avec Justin Bieber et squatter les strip-clubs (sans oublier son implication dans le clash entre Chris Brown et Soulja Boy), mais n’allez pas croire que tout ce qu’il poste sur Instagram.

Considéré comme le principal instigateur du combat, ce dopé de taf dont le mantra est « hard work and dedication » a repris l’entrainement bien avant de signer le contrat.

Pire, des deux hommes ce pourrait bien être Conor qui risque de manquer de souffle. Habitué à combattre 3 rounds de 5 minutes, il devra cette fois se plier à 12 rounds de 3 minutes, un exercice deux fois plus long et qui demande en outre une endurance tout à fait spécifique.

2. LE GABARIT

Conor McGregor peut se targuer d’un avantage de taille (1m75 contre 1m73), mais aussi de celui encore plus important de l’allonge (188cm contre 183cm), un excellent moyen de contrôler le combat en gardant son rival à distance.

C’est également un gaucher, ce qui en boxe est souvent considéré comme un avantage face à un droitier dont les repères se trouvent inversés. On peut d’ailleurs se souvenir que le grand Oscar De La Hoya assimilait le direct du gauche à de la « kryptonite » en évoquant les faiblesses de Mayweather.

Oui mais sauf que : Pour tout ce qui relève de la taille ou de la garde, Mayweather a affronté des pelletées d’adversaires affichant ce profil. Leur point commun ? Ils ont tous perdu.

Bon point pour Conor néanmoins, Floyd n’a que très rarement eu affaire à des opposants combinant ces deux caractéristiques en même temps.

3. LA PUISSANCE

« Quand Conor McGregor cogne quelqu’un, il tombe », voilà comment Dana White le grand patron de l’UFC résume la force de frappe de son poulain.

Une analyse corroborée par Mayweather lui-même qui a déclaré à USA Today que « sur ses jambes c’est un sacré combattant. Les seules fois où il a connu la défaite, c’est lorsqu’il était au sol. Debout, il a toujours été victorieux. »

Un atout conforté par la catégorie de poids du combat. À 69,8 kilos, McGregor évolue à son poids de forme, ce qui signifie qu’il conservera toute sa puissance sans avoir à s’astreindre au moindre régime amaigrissant.

Mayweather lui en revanche n’est absolument pas considéré comme un puncheur, son dernier « vrai » KO remonte d’ailleurs à 2007. Plus inquiétant, il souffre depuis quelques années de sérieux problèmes aux mains, à tel point que cela aurait murmure-t-on précipité son départ à la retraite.

Oui mais sauf que : Parmi tous les cogneurs rencontrés par Money (et là encore il s’agit de l’élite : Hatton, De La Hoya, Cotto, Maidana, Pacquiao…), aucun n’a réussi à l’entrainer dans un simili combat de rue.

Bien sûr la carte du « lucky punch » n’est jamais à exclure, mais encore une fois les chiffres parlent en sa faveur : en 49 combats il n’est allé en tout et pour tout qu’une seule petite fois au tapis.

Non seulement sa boxe défensive annihile celle de ses opposants (qui au fur et à mesure des rounds se frustrent, se font de moins en moins précis, tandis que lui monte en régime et exploite chaque faille), mais elle n’est jamais aussi efficace que lorsque ces derniers sont agressifs.

Attention au(x) contre(s) donc.

4. LA PHYSIONOMIE DE LA RENCONTRE

Paradoxalement le fait que McGregor soit novice sur un ring peut jouer en sa faveur. Son instinct, ses réflexes, sa façon de bouger ne seront pas ceux d’un boxeur. Mayweather devra donc faire face à un profil tout à fait atypique et qui de surcroit est complètement inconnu au bataillon (aucune vidéo, aucune archive).

Si beaucoup parient sur un début de rencontre mené tambour battant par l’irlandais (surtout qu’il arrive fréquemment au Pretty Boy d’être malmené lors des premiers rounds), qui sait ensuite comment les choses vont tourner ?

Habitué à prendre des coups avec des gants de MMA (beaucoup plus fins que des gants de boxe), McGregor reculera-t-il à la moindre touche ? Mayweather réputé pour accrocher ses adversaires lorsqu’il se trouve en difficulté lors d’un échange pourra-t-il en faire de même contre un McGregor dont l’art du clinch est complètement différent ?

Oui mais sauf que : S’il est peut être une qualité de Mayweather qui prime sur toutes les autres, c’est l’intelligence de son coup d’œil. Capable de s’adapter à tous les styles, il est aussi capable d’adapter son propre style au sein même d’un combat.

De plus, en fin stratège, l’américain a engagé le combattant UFC Kevin Lee pour être son sparring partner lors de ses entraînements histoire de s’adapter à un adversaire qui n’a pas la technique d’un boxeur professionnel et d’apprendre à se déplacer en fonction de ses mouvements.

[C’est également un bon moyen d’apprendre à se défendre face à d’éventuels coups de genoux et coups de coude, si le cas échéant la frustration faisait péter les boulons à McGregor.]

5. LA MENTALITÉ

Difficile de ne pas attribuer ici la palme du panache à Conor, plus « cocky and confident » que jamais.

Contrairement à Floyd, il sait qu’il n’a rien à perdre. Une défaite n’entacherait en rien son palmarès (s’il s’en tire avec les honneurs il s’agirait là d’un des plus grands premiers combats pro jamais vu), tandis qu’une victoire le ferait instantanément entrer dans la légende.

Outisder, il est déjà soutenu par une très large partie du public qui voit là une ultime occasion de fermer la grande bouche d’un Mayweather qui n’a jamais rallié la majorité des suffrages autour de sa personne.

Oui mais sauf que : Malgré son statut incontestable de favori, ce serait bien mal connaître Mayweather que de croire qu’il va prendre ce combat de haut.

Obsédé par l’idée de conserver son palmarès vierge de toute défaite, cette cinquantième victoire lui permettrait en sus de dépasser le record mythique de Rocky Marciano et de rentrer encore un peu plus dans les livres d’histoire.

LE VERDICT

N’en déplaise à ceux qui espèrent voir un combat « intéressant » (ne parlons même pas d’un beau combat ou même d’un combat d’équilibré), l’affrontement sera à sens unique.

Conor McGregor ne sera ni un nouveau Buster Douglas (cet inconnu qui défit en 1989 un Mike Tyson au sommet de sa gloire), ni un Rocky Balboa tenant tête à Apollo Creed 12 rounds durant – dans un cas comme dans l’autre, il s’agissait de deux boxeurs expérimentés rappelons-le.

Et pour cause, seule une fraction de son talent sera ici sollicitée. Un décathlonien aussi doué soit-il ne peut pas en un laps de temps si réduit se préparer à affronter un coureur de 100 mètres régnant en maître dans sa discipline.

Espérons tout juste pour lui que Floyd Mayweather ne l’abîme pas trop avant qu’il ne retourne faire ce qu’il sait faire… dans une cage de MMA.

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