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Ce jour où… DaBaby a tué un homme

Ce jour où… DaBaby a tué un homme

Avec la série « Ce jour où… » Booska-P revient sur ces anecdotes de plus ou moins grande importance qui ont marqué l’histoire du rap. Aujourd’hui place à ce jour où le plus « baby » des rappeurs a fait couler le sang…

Dans le rap très nombreux sont ceux qui parlent de flingues. Moins nombreux sont ceux qui ont pressé la détente (Jay Z qui a collé une balle dans la jambe de son frère, NBA Young Boy qui a été accusé de double tentative d’homicide après un drive-by-shooting…). Et encore moins nombreux (et fort heureusement) sont ceux qui ont tué.

Parmi eux on compte notamment Gucci Mane, Cassidy, C-Murder ou encore Max B, ainsi que Jonathan Lyndale Kirk alias DaBaby qui a rejoint le club le 5 novembre 2018.

Auteur d’une toute première mixtape intitulée Nonfiction sortie en 2014, si à l’époque des faits il n’est à 26 ans déjà plus un rookie avec une douzaine de projets au compteur (God’s Work, la série des Baby Talk, Billion Dollar Baby…), il n’est pas encore la star qu’il est à l’heure actuelle, lui à qui il arrive de monter sur scène en couche culotte pour faire monter son buzz.

Toujours est-il que comme c’est souvent le cas dans l’histoire du rap (Snoop Dogg et son procès pour complicité de meurtre, 50 Cent et ses neuf bastos prises dans le buffet…), c’est un évènement qui n’a rien à voir avec sa musique qui va le projeter pour de bon sous le feu des projecteurs.

Des faits encore aujourd’hui incertains

En vadrouille en début de soirée dans un centre commercial Walmart de Huntersville, une commune limitrophe de Charlotte d’où il est originaire, DaBaby est accompagné de sa meuf Meme et de leur fille de 1 an, ainsi que du fils de cette dernière âgé de 5 ans.

Là, il tombe dans un magasin sur deux jeunes hommes qui le reconnaissent. Très vite la situation dégénère et un coup de feu est tiré. Touché en plein abdomen, Jalyn Craig, 19 ans, s’effondre sans vie au sol.

Alerté par le bruit de l’arme et le mouvement de foule qui s’en est suivi, un officier de police appelle alors du renfort quelques minutes plus tard. Il est 18 heures 30.

Ça c’est ce que l’on sait avec certitude.

En revanche pour ce qui est du déroulé exact, nul ne sait avec précision ce qui s’est vraiment passé, et ce d’autant plus que si le Huntersville Police Department confirme dans la foulée un décès par balle et assure avoir identifié toutes les personnes impliquées, ne sont précisés ni les noms, ni d’éventuelles charges.

DaBaby livre sa version sur les réseaux !

Rapidement présenté comme l’auteur du coup de feu fatal, le rappeur apparemment bel et bien en liberté diffuse deux jours plus tard sur son compte Instagram une succession de stories dans lesquelles il revient sur l’incident.

Avare en détails, l’auteur de Suge justifie son geste devant ses 164 000 abonnés sans exprimer le moindre regret.

« Quand l’histoire va sortir, quand les images vont sortir vous verrez que j’étais avec ma fille, ma baby mama et son fils. Nous étions en famille et un renoi vient vers moi, commence à me tester moi et ma famille. »

« Beaucoup de renois me doivent des excuses sur ce coup. Ils parlent comme si leurs familles étaient en danger. C’est ma famille qui était en danger, eux ils n’ont entendu qu’une détonation. Ma p*tain de fille aurait pu être touchée. Mon fils aurait pu être touché. J’aurais pu être touché. »

« Ces p*tains d’avocat me conseillent de ne rien dire, mais rien à foutre. Deux renois viennent sur toi et ta p*tain de famille, te menacent, commencent à se la jouer… Dis-moi ce que tu fais ? »

« J’achetais des fringues d’hiver pour mon bébé, il fait froid dehors. Le mec me voit acheter des fringues pour bébé et là il veut me montrer à quel point c’est un dur. T’es sérieux renoi ? Arrête de jouer. »

« Franchement j’en ai rien à foutre de que vous pensez, un renoi a essayé de me tuer devant ma fille de un an. De quoi vous me parlez ? Arrêtez de jouer avec moi. »

Deux jours plus tard, n’accordant toujours pas plus d’importance que ça aux recommandations de ses avocats, DaBaby remet cette fois-ci le couvert sur Snapchat.

S’il présente cette fois brièvement ses condoléances, il semble avant tout particulièrement remonté qu’on lui reproche d’avoir profité de l’occasion pour promouvoir sa mixtape Blank Blank sortie quelques jours auparavant.

« Déjà je veux vous sachiez que les ‘Free DaBaby’ et les ‘REP DaBaby’ n’ont pas lieu d’être. Je suis aussi libre que l’air et mon cœur bat bel et bien. Condoléances à la partie adverse (…) Et à tous ceux qui l’ouvrent, bicth vérifiez les dates, vérifiez les posts. J’avais commencé la promo bien avant cette m*rde quand j’allais à Walmart, et je vais continuer à en faire la promo jusqu’à la fin. »

Toujours est-il que le 9 novembre, soit quatre petits jours à peine après la fusillade, sort le clip du morceau No Tears dont l’intro compile différents extraits de flashs info relatifs à l’affaire.

Libre comme l’air

Quand vient l’heure du procès au mois de mars 2019, étonnamment DaBaby n’est absolument pas inculpé pour meurtre, mais pour port d’arme prohibé. Reconnaissant les faits, il écope de trente jours de prison avec sursis assortis d’une année de mise à l’épreuve.

Bien qu’aucun document relatif au verdict n’ait été rendu public, tout porte à croire qu’il a bénéficié de la conception pour le moins étendue de la légitime défense en vigueur en Caroline du Nord, un état où s’applique la Stand-your-ground law (« la loi Défendez votre territoire »).

Rebaptisée la Shoot-first-law (« loi Tirez d’abord ») par ses détracteurs, elle autorise tout citoyen à faire usage de la force sur le champ en cas de danger imminent, quand bien même (et c’est là la différence majeure avec la conception traditionnelle de la légitime défense) il aurait été possible de fuir en premier lieu.

Invoquée très régulièrement par les forces de l’ordre en cas de bavures/d’arrestations qui tournent au drame, elle permet de se prévaloir d’une immunité totale contre toute procédure judiciaire (aucune poursuite, aucune d’arrestation, aucune détention).

La version de la famille

Du côté des proches de Jalyn Craig, le son de cloche est lui bien différent.

Dévastée par la mort de son fils (et probablement ulcérée par la photo de son cadavre qui tourne sur la toile…), sa mère Lawana Horsley déclare « avoir le sentiment que justice n’a pas été rendue », non sans dénoncer le comportement de DaBaby qui d’après elle se serait fendu « d’un sourire en coin à l’énoncé du verdict ».

« Personne ne pouvait dire le moindre mal de Jaylin. C’était le mec plus cool qui soit, avec le plus beau sourire qui soit. Il ne fumait pas, parce qu’il ne voulait pas abîmer ses dents. Il avait des dents parfaites… Nous allons continuer de nous battre. »

À sa décharge, outre le fait que son père certifie que contrairement à ce qui se raconte Dababy est celui qui a frappé le premier et qu’il n’a jamais été victime d’une tentative de braquage, au cours du procès le témoin clé (un employé du centre commercial) ne s’est pas présenté à la barre, tandis que la vidéo de surveillance n’a même pas été utilisée – un ajournement du procès avait à ce titre été demandé par le procureur, mais refusé par le juge.

Le 9 novembre 2019, quasiment un an jour pour jour après la disparition tragique de Jalyn Craig, 25 de ses amis et de ses proches ont ainsi tenu à lui rendre hommage en organisant une journée de collecte des déchets habillés de t-shirts fluo à son effigie sur lesquelles était imprimé « Keep Charlotte Beautiful ».

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