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R.E.D.K, Marseille au coeur

R.E.D.K, Marseille au coeur

Membre éminent de la scène phocéenne, le rappeur amorce son retour et raconte sa ville.

R.E.D.K photographié avec l’iPhone X par Flora Metayer

Mettre le cap sur différentes villes de l’hexagone via le prisme du hip-hop, voilà le but de cette nouvelle série que vous propose Booska-P, en partenariat avec Apple. Notre visée est simple, dessiner un chemin entre les rappeurs et leurs origines, questionner leurs racines et proposer une cartographie du game. Pour la troisième étape de cette cartographie du game, nous avons rencontré R.E.D.K à Marseille.

La cité phocéenne, une ville particulière à bien des aspects, dotée d’une géographie dingue entre la mer, les quartiers nords et les pavés du centre. Côté rap, le constat est le même, on fait face à une multiplicité des styles. Au coeur de ce contraste, R.E.D.K est en bonne place, rappeur ayant connu les différentes époques du hip hop marseillais depuis les nineties jusqu’à aujourd’hui. A l’heure de son retour, le membre du groupe Carpe Diem nous embarque avec lui, de La Rose jusqu’au stade Vélodrome.

Marseille, capitale de la culture hip hop

Voilà plusieurs années que R.E.D.K était en sommeil. En 2018, il a pourtant décidé de revenir, avec à nouveau de « l’inspiration, de l’envie et des idées ». Pour teaser son dernier clip, Pied Levé, il a ainsi fait croire à une reconversion dans la chanson française. En un tour de main et quelques secondes au début de son titre, il s’est permis un twist musical qui a fait sourire. Une preuve que Marseille peut tout se permettre ou presque, sans jamais perdre ce qui fait sa force. Comme il l’affirme, le rappeur « retourne à ses débuts » et n’est pas là pour « subir le rap », mais pour continuer à créer.

R.E.D.K photographié avec l’iPhone X par Flora Metayer

Créer, c’est justement ce qu’il a fait très tôt aux côtés d’autres figures du hip hop phocéen. Sur la planète Mars, le rap est un art qui se transmet, qui pousse sur le bitume sans qu’on l’arrose. La rime est un dû, on la dissèque à plusieurs, comme des savants dans un laboratoire. Ici, les premières scènes de R.E.D.K ont des noms que les néophytes, tels de vulgaires touristes, jugeront comme chantants, « Saint-Ferréol » et « La Rose » : « La rue Saint-Fé, c’était quelque chose à l’époque. C’était un lieu de rencontre, de création, d’inspiration directe. Il y a avait le classic shit du samedi, on se retrouvait pour des sessions freestyles a capella ou avec du son, si on avait la chance d’avoir un poste. Dans mon quartier, La Rose, on se retrouvait avec Soprano et autres le dimanche après-midi pour rapper. On faisait tourner les instrus et on improvisait ».

Ce lien particulier qu’on entretient avec la culture hip hop, on le doit à notre héritage

Une « belle époque » qui n’a cependant jamais pris fin, car le rap irrigue toujours Marseille. Un lien dingue, comme un cordon ombilical jamais coupé. Il faut dire que la garde veille toujours pour que les jeunes puissent eux-aussi profiter de ce que le hip hop a à offrir. IAM, la Fonky Family, des groupes cultes comme un héritage qu’il ne faut pas laisser de côté pour R.E.D.K. Même lorsqu’on devient capitale européenne de la culture : « Ce lien particulier qu’on entretient avec la culture hip hop, on le doit à notre héritage. Des mecs comme ceux d’IAM font toujours en sorte que l’histoire continue, via des associations notamment. Par exemple, lorsque la ville a été nommée capitale européenne de la culture, on a fait des pieds et des mains pour mettre en avant le rap. Ici ce n’est pas rien, on a de gros artistes et des classiques du rap français, il ne faut pas l’oublier ».

L’unité d’une scène

A Marseille, ce qui marque, c’est également l’unité de sa scène rap. A la manière des habitants de la ville, qui aiment se désigner comme « Marseillais avant tout », ici, chaque artiste représente son quartier, tout en faisant corps avec la cité. Chez les Phocéens, tout le monde se croise, se salue et rappe, évidemment : « Sans être dans un aspect Bisounours, tout le monde se connait à Marseille, en dehors du rap ou non. Il y a toujours cette notion de rassemblement. Je pense que c’est propre à notre ville, on se connaît tous d’un endroit à l’autre, il y a toujours moyen de faire le lien pour un featuring. Moi je suis entre le centre-ville qui a vu naître FF, Carré Rouge ou IAM, et de l’autre côté j’ai Jul. Cette proximité qu’on ne trouve pas forcément à Paris, joue fortement ».

R.E.D.K photographié avec l’iPhone X par Flora Metayer

Massilia force le trait, en accaparant les villes de ses alentours. Dans la capitale du sud, on englobe la banlieue, on la fait devenir plus marseillaise que marseillaise. Les différences s’estompent et tous se rejoignent autour d’un même art, vu que les talent pullulent, de l’ouest à l’est, comme R.E.D.K le raconte : « Je peux citer Sch qui vient d’Aubagne, ou Kalash L’afro qui vient de Berre-l’Étang. Ils viennent de banlieue, mais pour nous, c’est Marseille quand même, on ne fait pas la différence ».

L’affranchi est la salle la plus active et la plus influente de Marseille. C’est un des lieux qui pousse au rassemblement

Certains lieux parviennent d’ailleurs à tisser les liens de la scène locale. Depuis 1996, une salle résonne particulièrement dans l’esprit de notre témoin : L’affranchi. Située dans le 11ème arrondissement, non loin de la gare Saint-Marcel, elle perpétue les traditions génération après génération : « Incontestablement, c’est une salle de concert qui m’a marqué. Quand j’étais jeune, tout se passait là-bas et encore aujourd’hui. Pour moi, c’est simple, c’est la salle la plus active et la plus influente de Marseille. Ils font venir tous les artistes, qu’ils soient d’ici ou de Paris. C’est un des lieux qui pousse au rassemblement, notamment pour les jeunes rappeurs du coin ». Outre la scène, le studio et l’autre élément clef de la vie d’un artiste… A ce petit jeu-là, c’est le studiO B-vice qui se fait remarquer : « Là-bas, d’une session à l’autre, tu croises énormément de monde. On y voit toute la scène marseillaise et quand je dis toute, je n’exagère pas » !

Une identité intacte

Jamais prisonnier d’une quelconque caricature, le rap marseillais est épargné par le temps qui passe. Les morceaux de la FF, de Carpe Diem et d’IAM n’ont pas pris une ride, pas plus que ceux des Psy4 de la rime. La planète Mars parvient à se régénérer, tout en gardant son savoir-faire : « Marseille a toujours été un pôle du rap, ça, ça n’a jamais changé. Je pense qu’aujourd’hui, il faut tirer le chapeau aux artistes qui ont su garder le flambeau, en particulier Psy4 de la rime, Soprano, Alonzo et bien d’autres. C’est désormais au tour d’une génération émergente : Jul, Sch, YL, Naps… Il y a une renaissance du rap marseillais, il peut prendre plusieurs formes. Avant, il était connu pour être un rap plus écrit. Désormais, il y en a pour tous les goûts, le rap conscient est toujours là, mais il y a aussi tout le côté festif de Marseille qui ressort ».

R.E.D.K photographié avec l’iPhone X par Flora Metayer

Une pluralité des styles « qui fait du bien », également dû à l’arrivée sur le devant de la scène de producteurs et vidéastes devenus des incontournables du hip hop hexagonal comme L’adjoint ou l’équipe multi-talents de Beat Bounce. De véritables professionnels qui braquent encore un peu plus les projecteurs sur la ville, un superbe fait pour R.E.D.K : « Ils participent à placer Marseille sur la carte du rap, mais d’une autre manière, ils sont influents. L’adjoint, c’est aussi la plaque tournante de Marseille, tous les rappeurs du coin sont passés dans sa cabine. Je suis vraiment content pour lui, car c’est un bon gars qui bosse depuis énormément d’années ».

La forte identité de Marseille pousse les artistes et peut les faire exploser… Moi, j’en suis plus que fier

Dernier sujet à ne pas zapper pour dessiner les contours de l’identité de Marseille : le football. Ici, le sang qui coule dans les veines de nos rappeurs est évidemment bleu et blanc, les couleurs de l’Olympique de Marseille. Un club particulier, le seule équipe française à avoir gagné la Ligue des Champions comme le rappelle notre rappeur qui se souvient du 26 mai 1993 « comme si c’était hier ». Aujourd’hui, l’équipe signe une saison de classe, avec une finale en Ligue Europa au compteur, pour le bonheur de R.E.D.K : « A partir du moment où tu arrives à intégrer la valeur de combat, tu ne peux que avoir le public derrière toi. Je pense que tout le peuple marseillais est derrière cette équipe. Les joueurs de notre équipes ne sont pas les plus grands virtuoses du siècle, même s’il y a beaucoup de talent, mais ils reviennent de très loin. Ils se battent à tous les matches ».

Mouiller le maillot et ne jamais rien lâcher, tous sous la même bannière, voilà où le rap phocéen forge sa différence, à l’image de son club. Une différence qui les pousse à se dépasser. Pour cloturer son propos, R.E.D.K prend alors de la hauteur et laisse même parler les sentiments : « La forte identité de Marseille pousse les artistes et peut les faire exploser. Moi, j’en suis plus que fier ».

https://www.youtube.com/watch?v=wx5_Vgsdu58

Après avoir découvert la relation unique entre R.E.D.K et Marseille, découvrez comment la cité phocéenne a inspiré Reef dans son nouveau morceau, Zoom. Regardez la vidéo réalisée avec l’iPhone et écoutez le morceau complet ici. Plus d’info sur apple.com.

A ne pas manquer, la ville de Lyon sous le prisme du rap, racontée par Casus Belli.

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