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Interview Escobar Macson (seconde partie)

Interview Escobar Macson (seconde partie)

« Je conçois l’avenir avec une vision plus structurée. Même si on subit un certain boycott, je me dis qu’il sera compliqué d’arrêter une bagnole lancée à 120km/h sur un barrage de flics… »

Après avoir évoqué son parcours chaotique lors de la première partie de l’entretien, Escobar Macson se tourne vers l’avenir. De ses futurs projets au buzz de Kaaris, en passant par l’art de la punchline, « Tony Bamboula » n’élude aucun sujet sensible.

Depuis décembre 2010, tu n’as plus sorti de projet. As-tu songé à arrêter le rap à un moment donné ?

Honnêtement, j’ai vraiment pensé lâcher à un moment. A cause des déceptions liées à mon parcours mais pas uniquement. Quoiqu’il arrive, tu es obligé de travailler avec quelqu’un. Si tu veux viser le plus de monde possible, tu es obligé de passer par une distrib’. Tu es contraint de bosser avec certains intermédiaires. Quand un maillon de la chaîne cède, cela fait un effet domino : tout part en couille et on se retrouve à courir alors qu’on a une vie à côté. J’essaie de monter d’autres business en parallèle, au niveau du bled. A un moment, tu te demandes ce que tu dois privilégier. Toute est une question d’organisation. Quand j’ai fait le bilan de ma carrière, je me suis rendu compte que je n’avais jamais sorti d’album. Alors que pour les gens qui me suivent ou pour moi-même, cela doit être obligatoire. Je suis obligé de sortir un album. En fonction des retombées, je verrais si je poursuis le rap ou non. Mais je suis confiant.

Tous tes projets ont accouché dans la douleur. Comment l’expliques-tu ?

J’ai parfois fait de mauvais choix, notamment en ce qui concerne les personnes avec lesquelles j’ai pu travailler. A chaque fois que j’ai pris la décision de tout faire tout seul, les choses se sont mieux passées que lorsque je déléguais. Je me suis remis en question. Résultat d’analyse : j’ai mis les personnes indésirables sur le côté et décidé de prendre un peu plus mon temps.

Cette année, tu vas revenir avec un projet intitulé Red Business. De quelle manière va-t-il sortir ?

Ce projet sera disponible uniquement en digital. Cela va permettre d’évaluer mon potentiel sur Internet. Aujourd’hui, il n’y a pas besoin d’avoir fait Maths Sup’ pour s’apercevoir que le support physique se casse la gueule. Les bacs rétrécissent et la plupart de ceux qui y figurent sont signés en major. Il faut donc exploiter un autre réseau, qui est le numérique. Je ne sais pas si c’est l’avenir mais ne pas passer par là serait con. On va essayer de tâter ce terrain avec Red Business et, en fonction des retombées, voir ce que l’on fera pour le projet suivant.

On va rappeler au public que le nom Monsieur Punchline m’appartient

Red Business sera un album avant l’album.

Exactement, avec des inédits uniquement. Le recyclage est terminé. Les gens qui m’apprécient m’ont souvent reproché de tomber dans un engrenage où je réexploitais d’anciens morceaux. Désormais, c’est fini. Ce ne sera que de l’inédit, peut-être même qu’il n’y aura pas le moindre featuring. Actuellement, je suis en train de mixer le projet, qui est terminé. Il sortira pour la grande rentrée des classes.

L’album suivra-t-il dans la foulée ?

Oui, même si c’est un peu prématuré pour donner une date. Quoi qu’il en soit, ce ne sera pas le grand écart américain entre Red Business et l’album.

A quoi doivent s’attendre les gens qui ont suivi ton parcours avec ces deux nouveaux projets ?

Escobar Macson a pris de l’âge et du poids. Cela sera un peu différent de ce que j’ai pu faire par le passé, mais cette différence ne sera pas radicale. Ce ne sera pas choquant. Red Business est un pont vers l’album. On m’a connu avec de l’égotrip, cette fois il y aura plus de thèmes. Évidemment, les punchlines seront toujours au rendez-vous. J’entends des « Professeur Punchline » par-ci par-là, mais bon… Sans animosité envers le gars (Seth Gueko, Ndlr) que je connais très bien, voilà quoi… J’ai commencé avec l’appellation « Monsieur Punchline », cela a donné naissance à toute une déferlante de « punchlinistes » alors que « Monsieur Punchline » est en train de te parler. On va rappeler au public que ce nom m’appartient. C’est l’un de mes pseudos et je vais lui montrer que je le porte bien. Aujourd’hui, les gens ne savent même pas ce qu’est une punchline. C’est comme un pack : dedans, tu peux y mettre humour, violence, métaphore et image. C’est pas comme dire : « T’as les yeux bleus comme un girofar de keuf ». Si c’est ça la punchline, je peux t’en sortir à tire-larigot. Le terme de « punchline » a été galvaudé. On est tombé dans la facilité. Aujourd’hui, plus personne ne veut faire d’efforts, on est sur une pente descendante. Pour moi la punchline c’est de la recherche, surtout quand tu ne la piges pas tout de suite. C’est encore plus fort de la remettre dix fois avant de comprendre le sens que le mec voulait donner.

Ton public a été habitué à t’entendre sur des productions relativement sombres. Comment as-tu évolué à ce niveau là ces derniers temps ?

On se rapproche un peu plus du soleil (rires). On est moins dans l’ombre et les ténèbres. Les gens sont restés bloqués à Résurrection, un projet hardcore sorti d’outre-tombe. Les projets qui arrivent n’auront rien à voir en terme de sonorités. D’ailleurs, je n’en ai rien à foutre de travailler avec les beatmakers à la mode, ça ne m’intéresse pas. J’écoute tous les beats qu’on m’envoie sur les réseaux sociaux, même si parfois je mets du temps avant de le faire. Je ne vais donc pas faire un deuxième Résurrection mais tenter de m’adresser à un public plus élargi que celui qui se cantonne au rap underground hardcore.

Il y a quelques années, un album commun avec Despo, Lalcko et Seth Gueko avait été envisagé. Pourquoi ce projet n’a finalement pas vu le jour ?

Cela devait se faire avant le dernier album de Despo. L’un des trois rappeurs que tu as cités avais mis le projet sur la table. Il ne s’agit pas de Lalcko. Finalement, certains ont eu d’autres opportunités et cela a fini au fond du tiroir.

Despo va justement sortir un album commun, avec Mokless et Guizmo. Qu’en penses-tu ?

Je pense que c’est une erreur. Je ne vois pas de compatibilité entre ces trois personnes là. Despo n’a rien à voir avec leurs univers. Après, qui a le plus à y gagner ? Mokless n’a rien à voir avec l’univers de Guizmo, il se rapproche plus de Despo. C’est une formule que Yonea a mise en place, j’espère pour eux que leur projet fonctionnera, mais personnellement, je n’aurais pas misé sur une telle combinaison.

Kaaris va faire du boucan

Plusieurs rappeurs issus de ta génération connaissent une « seconde jeunesse » grâce à la scène. Est-ce un domaine où tu comptes t’investir davantage ?

Nous n’avons pas fait beaucoup de scènes et nous comptons donc corriger le tir. C’est un passage obligé quand tu fais de la musique, un moyen de conquérir beaucoup de monde, au-delà du CD ou du digital. Un artiste doit faire de la scène, je n’en ai pas fait assez et cela m’a porté préjudice. En plus, cela peut être intéressant d’un point de vue financier. Certains ne touchent pas un copec sur leurs ventes de CD’s mais retombent facilement sur leurs pieds en faisant des dates.

Ecoutes-tu toujours du rap français ?

Plus autant qu’avant. La plupart des tendances, les retournements de veste, les culottes qui se baissent ou même qui n’existent plus pour certains… Voilà, moi ça me fait chier. Les gens que j’apprécie, tu les comptes sur les doigts de la main. J’ai écouté Kaaris : c’est un mec qui va faire du boucan, encore plus qu’il n’en fait déjà actuellement. Il s’est ouvert une porte et est capable de la franchir sans aucun soucis. Il a le vent en poupe et, s’il ne fait pas le con, ça devrait le porter très loin.

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