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Booba : « Ouest Side » le détonateur… [CHRONIQUE]

Booba : « Ouest Side » le détonateur… [CHRONIQUE]

Il y a eu un avant et un après dans la carrière de Booba…

C’est à ce moment là que tout a basculé… Longtemps resté solidement installé du côté obscur sans pour autant avoir le pedigree d’un seigneur Sith, Booba a été, durant plus d’une décennie, cet homme de l’ombre que l’on se plaisait à écouter en secret. Une sorte de plaisir solitaire bien gardé. Devenu maître de son art, l’ancien Padawan a logiquement cherché la lumière… Il y a onze ans jour pour jour sortait Ouest Side, son troisième album solo. S’il reste pour certain, le projet le plus abouti de Booba artistiquement parlant, il est surtout celui qui a marqué un véritable tournant dans sa carrière de rappeur. Retour sur un album pas comme les autres…

Le personnage prend de l’ampleur

La mutation la plus criante s’est faite dans l’image. Déjà soucieux de son aspect, Booba a poussé le concept beaucoup plus loin à partir de Ouest Side. Conscient de l’importance prise par l’apparence et de toute la fantasmagorie qui peut en découler, l’homme s’est créé un personnage à la fois extrêmement puissant et clivant. A la manière de ses homologues américains, Booba reprend alors tous les codes du gangsta rap. Cela passe par une importante prise de masse, le développement des graffitis sur son enveloppe charnelle sans oublier, des tenues vestimentaires facilement identifiables. Tout est fait et étudié pour que Booba devienne une marque, une icône d’un nouveau genre.

L’impact par l’image

Si la greffe a pris, c’est que cette transformation visuelle a été habilement accompagnée par une mise en scène particulièrement soignée. Comme tout personnage, Booba doit avoir un univers qui lui est propre. « C’est pas le quartier qui me quitte, c’est moi je quitte le quartier » clamait-il récemment. Pour donner corps à ses chansons, Booba tourne le dos aux halls au bénéfice de tournages réalisés partout dans le monde (Canada, Brésil, Russie etc…). Sa passion pour le septième art peut alors pleinement s’exprimer en collaboration avec Armen Djerrahian, réalisateur de tous les clips du projet. Entre scénarios bien ficelés où Booba se réinvente en cible de la mafia russe (Pitbull), en tête de réseau victime de trahison (Au bout des rêves) ou en intouchable (Boulbi) et des clins d’oeil à des oeuvres réservées aux initiés (The Baseball Furies de The Warriors dans Garde la pêche…), l’imagerie détonne par son caractère maitrisé…

Une volonté d’ouverture

Réputé pour être un « game changer« , Booba n’est pas de ceux qui regardent dans le rétroviseur, il n’est donc pas du genre à nous servir du réchauffé, quitte à déplaire à certains nostalgiques d’une autre époque. Artistiquement, Ouest Side est composé d’une grande diversité en matière de sonorités. Que ce soit sur du reggae (Au bout des rêves), du rock (Couleur Ebene), du clavecin (Duc de Boulogne) ou encore un sample de Mistral gagnant (Pitbull), Booba surprend par ses prises de risques et démontre que le rap peut se marier à bien des univers musicaux. Une ouverture inédite que l’on retrouve également au niveau des featurings puisqu’il ne se limite plus seulement à son équipe (Akon, Mac Tyer, Intouchables, Kenedy, Trait D’union), qu’il n’oublie pas pour autant (Malekal Morte). Finalement, la seule continuité avec les projets précédents se situe au niveau des Beatmakers (Animal sons, Kore, DJ Mehdi…) et dans les procédés d’écriture (punchlines, variations des flows, sens de l’égotrip).

Un rappeur bankable

Volontairement plus accessible, Booba touche rapidement sa cible. Non seulement l’album s’écoule bien mieux que ses prédécesseurs et permet à Booba de décrocher son premier disque de Platine mais il place également l’artiste comme une tête d’affiche du rap français aux yeux du grand public. Presque soudainement, l’enfant terrible devient bankable et multiplie les apparitions TV’s. Conscient de son nouveau pouvoir médiatique, Booba casse les barrières de la communication en s’invitant sur le plateau de la Star Academy. Après avoir fait de nombreux indignés, B2O en a vu plusieurs lui emboiter le pas. Possédant désormais un public élargi, Booba lance le « Ouest Side Tour », sa première véritable tournée à grande échelle.

Booba est mort, vive Booba !

Si cet album a donné débouché sur un nouveau Booba, cela signifie également qu’il a mis fin à celui d’avant et pour certains, cela n’a jamais réellement été accepté. Oublié le jeune banlieusard longiligne aux baggies trop larges et aux paroles acerbes. Place désormais à un homme d’affaire bodybuildé, au costume bien taillé et aux ambitions ultra-capitalistes comme en témoigne les innombrables placements produits pour la marque Unküt dans toutes ses représentations. Plus qu’une passion, le rap est devenu un moyen de faire de l’argent. Une nouvelle manière de voir les choses qui l’a mené à la carrière qu’il a aujourd’hui. Finalement, que ce soit celle de ce que vous aimez ou détester le plus chez lui, Ouest Side ressemble fort à une nouvelle naissance.

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